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Publié le 2 Juin 2015

Les territoires perdus de la République, sous la direction d'Emmanuel Brenner (*)

Un cri d'alarme salutaire. Un livre remarquable, à lire, à conseiller, à diffuser.
 

Une recension de Jean-Pierre Allali
C'est une excellente idée de publier, dans le cadre d'une troisième édition augmentée, cet ouvrage vraiment fondamental, mais qui, hélas, n'a pas connu la diffusion et le succès qu'il mérite.
Depuis septembre 2002, date de la parution de la première édition, les choses n'ont fait, hélas, que s'aggraver. Et si, à l'époque, l'accent était mis, essentiellement, dans l'esprit du rapport Obin, lui aussi complètement occulté, sur les problèmes rencontrés en milieu scolaire, c'est, en 2015, toute la société française qui est menacée par l'antisémitisme, l'islamisme et le sexisme.
Comme le dit Emmanuel Brenner en préambule, la nation est en désarroi. Il faut lire et relire ces  témoignages d'enseignants interloqués, désemparés, impuissants. À Paris et dans les banlieues, en Seine-Saint-Denis comme à Marseille et ailleurs, la République perd, peu à peu des territoires. Des élèves font la loi, refusent des minutes de silence si elles concernent la Shoah ou les Juifs, accusent ces derniers d'avoir fomenté les attentats du 11 septembre 2001, harcèlent, voire martyrisent leurs congénères juifs ou, dans un autre domaine, plus féminin, veulent imposer le port du voile et refusent de pratiquer sport et natation. Le porc disparaît des cantines et la nourriture « halal » devient peu à peu une obligation. Par lâcheté et pour ne pas avoir d'histoires, certains enseignants baissent les bras et, pour certains, choisissent de hurler avec les loups. Les classes, peu à peu, se vident de leurs élèves juifs qui rejoignent l'enseignement privé confessionnel. Dans la postface, Georges Bensoussan ne peut que le constater : douze ans après la première édition des Territoires perdus de la République, le départ des enfants juifs de l'enseignement public est devenu un fait massif. C'est le repli communautaire quand ce n'est pas l'exil. En 2014, et pour la première fois depuis 1948, l'immigration juive vers Israël, l'alyah, atteint des records. Face à cette véritable catastrophe qui menace gravement les principes fondamentaux de laïcité, Georges Bensoussan n'hésite pas à parler de cécité, de surdité volontaire, de terrorisme intellectuel et médiatique. Le phénomène ne se limite plus à la France ni même à l'Europe. « La vague antijuive qui traverse la France d'aujourd'hui est l'écho affaibli de celle qui ravage la plus grande partie du monde arabo-musulman. Elle s'enracine dans la longue histoire de la condition juive en terre arabe qui s'est conclue, après 1945, par une quasi-épuration ethnique ».
Un cri d'alarme salutaire. Un livre remarquable, à lire, à conseiller, à diffuser.
Note :
(*) Éditions Pluriel. Mars 2015. Troisième édition augmentée. Contributions d' Élisabeth Amblard, Rachel Ahrweiler, Arlette Corvarola, Emmanuel Brenner, Sophie Ferhadjian, Élise Jacquard, Valérie Kobrin, Gabrielle Lacoudre, Barbara Lefebvre, Iannis Roder, Élisabeth Sternell, Marie Zeitgeber et d'autres professeurs de collège et de lycée. Postface de Georges Bensoussan.
 

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