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Publié le 30 Juin 2015

Mineurs de charbon à Auschwitz - Jawischowitz 15 août 1942-18 janvier 1945, par Christian Langeois (*)

Une étude aussi utile qu'intéressante.

Une recension de Jean-Pierre Allali
Constituant l'une des annexes extérieures d'Auschwitz, le camp de Jawischowitz a été ouvert le 15 août 1942 après avoir été construit durant les six premiers mois de la même année par des équipes de prisonniers véhiculées quotidiennement par camion depuis Birkenau.
Ce camp était une commande, en somme, de la société Hermann-Göring Werke et avait comme finalité d'exploiter les mines de charbon de Brzeszcze et de Jawischowitz.
Dès lors, explique l'auteur de cette étude, il bénéficiait de certains avantages : un environnement coquet, un hôpital, un local de désinfection et des douches d'eau chaude. Il y avait même, les premières semaines, des lits métalliques à deux étages garnis de draps et de couvertures. Et l'on parlait d'un salaire en marks !
Cela n'empêchera pas une surveillance stricte et, finalement, comme le racontent les 47 témoins, parmi lesquels Henri Krasucki, futur secrétaire général de la CGT, dont les récits sont fragmentés tout au long du livre, Jawischowitz sera, à l'instar de toutes les structures pénitentiaires du système concentrationnaire nazi, un camp de la mort. Avec les kapos, les maladies, le froid, la dénutrition, les accidents du « travail » et, au bout du rouleau infernal, la chambre à gaz. Le « confort » inattendu des premiers jours se révélera être, rapidement, une tromperie.
Les premiers déportés juifs portaient les matricules de la série 58 000 et avaient été extraits des camps du Vernet, de Gurs, de Noé et du Récébédou. La plupart étaient des militants de gauche, communistes et trotskistes, des antifascistes, d'anciens résistants ou encore des brigadistes de la Guerre d'Espagne.
Venus de toute l'Europe et sélectionnés pour leur vigueur supposée, quelque 6 000 déportés vont littéralement s'épuiser. Les plus fragiles, 3 800, mourront d'épuisement. Car le travail demandé se révèle très vite harassant. Les équipes de jour se lèvent à 3h30 pour être prêtes au fond de la mine à 6 heures. Alors commence le percement de galeries, le foudroyage, l'extraction du charbon et son transport à l'extérieur. Avec le danger que cela représente pour des ouvriers non spécialistes. Dès lors, les accidents étaient nombreux, car les déportés mineurs charbonniers n'ont ni casques ni genouillères. Sans compter les coups de grisou.
Rendement. Tel était le maître mot à la mine. « Kohlen, Kohlen, immer mehr Kohlen » ("Du charbon, du charbon, encore du charbon, toujours du charbon").
Des pages sont consacrées à la résistance organisée sous différentes formes dans le camp, à l'esprit de solidarité ou encore au procès du kapo et chef de block juif, Judek Oleg ( un pseudonyme), en juillet 1948, où l'on apprend, au passage, qu'il dirigea, après Jawishowitz, un block de Juifs palestiniens à Belsen. Ce procès s'est achevé le 26 août 1948 par une ordonnance de non-lieu.
Face à l'imminence de l'arrivée des troupes de l'Armée Rouge, le camp de Jawishowitz est évacué le
18 janvier 1945. Il reste 1988 déportés dont 1850 vont rejoindre la tristement célèbre « Marche de la Mort », les autres, trop faibles ou malades, resteront au camp avec deux médecins. Le 22 janvier, ils sont 500 à atteindre le camp de Buchenwald.
Pour l'anecdote, on notera que si la quasi-totalité des déportés qui témoignent dans ce livre sont originaires d'Europe Centrale, deux d'entre eux sont sépharades : Eugène Ayache, de Meknès, au Maroc et Maurice Benroubi, de Salonique, en Grèce.
Une étude aussi utile qu'intéressante.
Note :
(*) Éditions du Cherche Midi. Août 2014. 274 pages. 17 euros.
 

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