CRIF Debates
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Published on 8 January 2016

Ils étaient visés parce que juifs

Le président du Crif Roger Cukierman estime intolérable ce sentiment qu'ont les Juifs d'être devenus des citoyens différents des autres

Les Juifs sont les sentinelles de la démocratie. On l'a vu avec le nazisme, on le revit avec l'islamo-fascisme. On commence par s'attaquer aux Juifs, puis on vise tous les défenseurs des valeurs démocratiques.

Publié dans le Figaro le 7 Janvier 2016 Par Roger Cukierman 

L'année 2015 a été une année épouvantable pour la France. Ça avait commencé les 7et 8 janvier par les journalistes de Charlie et les policiers ; ça avait continué le 9 janvier par les Juifs chez Hyper Cacher. Et puis, le 13 novembre, c'est toute la population qui a été visée. Aujourd'hui, toute la France est menacée.
Chacune des victimes reste pour nous le symbole d'une jeunesse brisée, d'une vie anéantie. Ces terroristes djihadistes ont assassiné des êtres sans défense avec lâcheté, préméditation et détermination.
 
Coulibaly a tué des Juifs parce qu'ils étaient juifs. Comment pourrions-nous oublier François-Michel, Philippe, Yoav, et Yohan, ces quatre victimes assassinées pour cette seule raison qu'ils étaient juifs? Frappés en pleine vie, en pleine jeunesse, en plein bonheur, alors qu'ils étaient venus ce vendredi matin préparer shabbat dans cette épicerie Kasher. Leur souvenir restera gravé dans nos mémoires. Nous partageons la peine de leurs familles éprouvées. Je pense avec une immense tristesse aux bonheurs brisés, aux familles détruites, aux enfants devenus orphelins, aux pères, aux mères, aux couples anéantis.
Depuis Ilan Halimi, depuis Toulouse, depuis Bruxelles, depuis Copenhague, nous, Français juifs, vivons dans l'inquiétude. Chacun se sent menacé, agressé. Et nous ne voulons pas, nous ne pouvons pas nous accoutumer à ce que nous soyons visés parce que juifs. Ce sentiment d'être devenus des citoyens différents des autres est intolérable.
 
Nous sommes reconnaissants aux policiers et aux soldats qui assurent la sécurité de nos synagogues et nous apprécions que nos enfants soient protégés dans nos écoles. Mais en même temps cela développe un sentiment d'angoisse. Après deux mille ans de présence dans l'Hexagone, c'est notre dignité qui est atteinte.
Les Juifs sont les sentinelles de la démocratie. On l'a vu avec le nazisme, on le revit avec l'islamo-fascisme. On commence par s'attaquer aux Juifs, puis on vise tous les défenseurs des valeurs démocratiques, les uns après les autres. Et dans la soirée du 13 novembre, 130 victimes qui ne demandaient qu'à profiter d'une soirée joyeuse, frappées en pleine jeunesse! Ces barbares ont ciblé des Français parce qu'ils assistaient à un spectacle ou à un match de foot, ou parce qu'ils buvaient un verre à la terrasse d'un café.
 
Au nom d'Allah, ils ont frappé de manière professionnelle, systématique, organisée, avec la volonté de tuer le plus possible d'hommes, de femmes, d'enfants, sur plusieurs sites en même temps, prêts à détruire tous ceux, y compris musulmans, qui ne partagent pas leur fanatisme. Oui, les musulmans sont les premières victimes de leur folie.Ces terroristes sont les mêmes fous d'Allah que ceux qui ont sévi dans 28 pays au cours des deux dernières années, sur tous les continents, en Europe, en Israël, en Asie et en Afrique. Au couteau, à la kalachnikov, à la grenade, à la ceinture explosive, à la voiture bélier, en tuant, en violant, en lapidant ou en coupant les têtes.
 
Mais heureusement, comme à chaque fois qu'elle est bousculée, la France sait se montrer profonde, généreuse, ouverte. C'est cette France que nous aimons, que nous défendons, celle qui fait la preuve de ses capacités de défendre la liberté, l'égalité et la fraternité. Elle l'a montré le 11 janvier avec la grande manifestation de plusieurs millions de Français qui disaient leur rejet de la haine, et qui étaient venus dire leur volonté de lutter pour les valeurs fondamentales de notre démocratie et notre mode de vie. Mais cet esprit du 11 janvier était encore hésitant ; on hésitait à nommer l'ennemi, on craignait les amalgames, on recommandait la prudence.
Depuis le 13 novembre, il n'y a plus de place pour les hésitations, les tergiversations. On ne doit pas accepter que ces victimes soient mortes pour rien. Maintenant, on nomme l'ennemi: le terrorisme islamiste. Et la France participe activement à la guerre contre ces fanatiques de Daech en Syrie, au Mali et en Centrafrique.
Nous sommes à la pointe du combat contre le fanatisme djihadiste aux côtés de toutes les forces vives de la nation dans le combat que mène le gouvernement français. Et nous combattrons tous ensemble parce que c'est notre dignité d'êtres humains qui est en jeu.
 

 

 

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