Lyon : discours de Marcel Dreyfuss prononcé à la Grande Synagogue le jour de Yom Hashoah

 
Il  y a 73 ans en avril 1943 quelques centaines de combattants ont eu le courage d’affronter les nazis sans aucun espoir de victoire.  
 
Ce soir nous commémorons Yom Hashoah, qui est devenu une triste habitude, un moment où l’on se retrouve, où l’on se rappelle, où l’on se souvient.   
 
Chaque année, nous rappelons ô combien la folie antisémite, criminelle et haineuse raisonnait en Europe.
 
Chaque année, nous nous souvenons d’Auschwitz-Birkenau, de Belzek, Chelmo, Maidaneck, Sobibor et Treblinka, lieux d’horreurs et de barbarie.
 
Chaque année, nous rappelons le souvenir des martyrs de la Shoah, 
ces hommes, ces femmes, ces enfants... ces anonymes, ces innocents…
Le calvaire de ces enfants, orphelins, arrachés de leurs lits à l'aube, arrètés comme des assassins, entassés dans les camions, terrorisés, envoyés à la Prison de Montluc, puis à Drancy, et ensuite exterminés dans les chambres à Gaz d'auschwitz puis jetés dans les fours crématoires.       
 
Chaque année, nous répétons avec mémoire, tristesse et émotion que ces hommes et ces femmes étaient envoyés vers la mort pour avoir commis le seul crime d’être né, d’être né juif.
 
Qui aurait pensé qu’il y a quatre ans  le 19 mars 2012 on puisse tuer un père, ses deux  enfants et une fillette à Toulouse parce que juifs !!! 
 
Qui pouvait imaginer que l'an passé on tue a bout portant, des journalistes  à Charlie Hebdo qui ne faisaient que leur métier et des Juifs qui faisaient leurs courses à la veille du chabbat dans l'Hyper Cacher de Vincennes.    
 
Souvenons-nous encore cette année, encore des années que la neutralité est criminelle, que l’indifférence est destructrice.
Ne pas se souvenir, ne pas commémorer, ne pas se rassembler, serait une insulte à la conscience humaine, à la conscience universelle.
 
Souvenons-nous. Souvenons-nous des ces mots, de ces témoignages, de ces récits que nous offrent les survivants. 
 
Mes chers amis, profitons de pouvoir encore croiser et parler aux rescapés. Profitons-en. 
Continuons à leur demander de nous raconter. 
Continuons à leur demander de parler. 
 
Dans quelques années, j’espère le plus tard possible, il n’y aura plus de survivants. Il n’y en aura plus. 
Nous serons devenus les témoins. 
Nous avons une telle responsabilité. 
Celui de porter et transmettre ces témoignages.
 
Aujourd’hui, Yom Hashoah, nous rappelons spécifiquement 
la mémoire des héros du ghetto de Varsovie.
 
En novembre 1940, la population juive est obligée de se rendre dans le ghetto de Varsovie avec interdiction d’en sortir.
 
Derrière des barbelés, isolée, affamée, malade, la population juive essaie de survivre malgré la brutalité de la répression.
 
Dès 1941, la rumeur de l’extermination se répand mais rares sont ceux qui y accordent du crédit.
 
En 1942, suite aux nombreuses exécutions de résistants et aux fusillades nocturnes, la population commence à comprendre que son avenir est des plus incertains.
 
C’est le 20 juillet 1942 que les rafles commencent.
Ces rafles se succèdent au rythme de 5 à 6 mille juifs par jour.
 
En septembre 1942, il ne reste plus que 60 000 habitants dans le ghetto et en octobre, les organisations résistantes se réunissent  et créent l’Organisation Juive de Combat (OJC) avec un commandant de l’Hashomer à sa tête, Mordehai  Anielewicz et un adjoint du Bund Mareck Edelmann.
 
Ils n’ont que peu d’armes, quelques dizaines de revolvers en mauvais état, des grenades, quelques fusils et un seul pistolet mitrailleur.
 
 
Les S.S. commencent à être attaqués. 
Des prisonniers sont libérés par l’organisation juive de combat.
Les nazis décident alors d’en finir !! 
 
En avril 1943, la plupart des Juifs de Varsovie sont exterminés, 
Pourtant pendant 20 jours, quelques centaines de combattants vont affronter les nazis.
 
Quelques centaines de combattants sont parvenus à défier l’occupant nazi et à l’affronter 20 jours durant. 
 
Aucun espoir d’une issue victorieuse ne leur était permis.
 
Le souvenir de la révolte du ghetto de Varsovie, en avril 1943, ne doit pas s’estomper.
 
Le Ghetto de Varsovie est un symbole : de courage, de force, de résistance.
Cette révolte est une leçon pour nous tous. La révolte du Ghetto n’a malheureusement pas empêché que la plupart des 300 000 Juifs de Varsovie soient déportés et gazés à Tréblinka.
 
Les révoltés avaient un seul objectif : témoigner.
 
Nous devons reprendre ce flambeau pour continuer d’hurler au monde que le peuple juif ne sera plus opprimé.
 
Nous devons reprendre le flambeau des révoltés de Varsovie pour s’indigner, pour combattre les injustices sans sélection, pour porter un message de paix, un message universel.
 
C’est cela la conscience juive des révoltés du Ghetto de Varsovie.
 
Aujourd’hui, souvenons-nous, souvenons-nous, que dans les années 30 en Allemagne, le nazisme est arrivé démocratiquement au pouvoir.
Ne nous laissons pas berner par des discours édulcorés des extrêmes.
Soyons attentifs, vigilants et réactifs.
 
C'est aussi la conscience juive qui ne doit pas nous laisser indifférents au sorts des migrants. 
Nous, enfants, petits enfants ou arrières petits enfants, de migrants, d'exilés, ou d'expulsés.
Nous, Juifs, Nous Français, nous ne pouvons détourner le regard d'une tragédie moderne comme celle vécue par les migrants. 
Il ne s'agit pas de jouer aux bonnes âmes ou aux donneurs de leçons mais ne faisons pas comme si nous ne voyons rien. 
 
Mesdames et Messieurs, Chers amis, je vous remercie d'être présent aujourd'hui, d'être encore présent et de nouveau demain ! 
 
Nous vous remercions de faire vivre la mémoire de Martin Gray et de son oeuvre remarquable " Au nom de tous les miens ". 
 
Ce message universel est le notre, soyons en les porteurs et les messagers.
 
Ce message est celui de la mémoire, de la fraternité, de la tolérance du chalom et de la vie.
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