#Opinion - Mon frère en humanité, par Marc knobel

08 July 2016 | 10 vue(s)
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"Tu aimeras l'étranger comme toi-même, car tu as été étranger en Egypte".

Par Marc knobel, Directeur des Etudes au Crif, publié dans le Blog du Huffington Post le 8 juillet 2016
 
Mon frère en humanité, lorsqu'un attentat ensanglante ta ville, lorsqu'un attentat perfore tes poumons, lorsqu'un attentat pulvérise ton quartier, ton marché, ton train, ton métro, ton souk, ton café, ton restaurant, ton cinéma, ta salle de spectacle, ton avion, tu n'as pas/plus de religion, tu n'as pas/plus de couleur, tu n'as pas/plus de sexe, tu n'as pas/plus de classe sociale, tu n'es ni noir, ni jaune, ni blanc, ni français, ni arabe, ni juif, ni chrétien, ni bouddhiste. Tu n'es plus qu'une victime. Nous devrions nous en souvenir.
 
Et pourtant...
 
Mon frère en humanité, lorsque tu meurs si subitement, éventré, perforé, écrasé, laminé, sans même savoir pourquoi tu es mort, pourquoi tu dois quitter si brutalement ainsi les tiens, pourquoi on te fait ainsi souffrir, toi et tes proches, alors que tu es du genre humain.
 
Mon frère en humanité, tu ne dois pas te sentir lésé parce que tu vis à Garissa, au Kenya ou à Sousse, en Tunisie, ou à Bagdad, en Irak. On te doit autant de considération que l'on en devrait à n'importe quelle victime, d'un point à un autre de la planète, lorsque les terroristes frappent aveuglément.
 
Mon frère en humanité, tu as bien un visage, une voix, des yeux, une langue, que ce fut l'arabe ou l'anglais, tu as bien une histoire, des amis, une famille, des proches, une vie sociale, tu as bien le droit que l'on se souvienne de ton regard, que l'on cherche ton nom, que l'on dise ton prénom, que l'on récite une prière, que l'on entonne une chanson, que l'on parle de toi comme si tu étais vivant.
 
Mon frère en humanité, même si ta langue maternelle n'est pas la mienne, même si ta peau est foncée, même si tes yeux sont noirs, même si ta religion diffère de la mienne, même si tu vis en un ailleurs que j'ignore, même si tu ne sais pas que j'existe, même si je ne sais pas que tu existes, tu as le droit au respect.
 
Mon frère en humanité, je n'accepte pas que l'on t'oublie, que l'on écrase l'information et qu'un attentat aussi terrible et dramatique que celui qui a frappé tes frères et tes sœurs en Irak, ne vaille que 13 secondes aux informations d'un journal télévisé du soir.
 
1.2.3.4.5.6.7.8.9.10.11.12.13 secondes...
 
Tu as bien lu, il a fallu 13 secondes pour évoquer cette horreur et parler de vous tous, de vous toutes: 213 êtres humains que vous étiez, morts déjà en une fraction de seconde.
 
Mon frère en humanité, notre silence nous accable. Notre indifférence nous remplit de honte. Tu as le droit de réclamer que l'on se soucie des tiens, que l'on n'oublie pas ton prénom : Ahmed, Amal, Asma, Aïcha, Cherifa, Dalal, Djihane, Emna, Ezzeddine, Farid, Fahed, Ghita, Hanine, Haroun, Issam, Jamal, Kadir, Kenza, Lofti, Malika, Mansour, Nawal, Nuri, Omar, Racha, Rana, Riham, Salima, Sherine, Talat, Wassim...
 
Mon frère en humanité, ton prénom vaut bien les nôtres.
 
Pourquoi devrais-je seulement pleurer lorsque Monique, Sylvie, Joëlle, Armelle, Christine, Jean, Pierre, Frank, Didier ou Alain meurent ici, à Paris? Pourquoi devrais-je forcément manifester pour eux et taire ta mort et ta douleur?... Lire l'intégralité.
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