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Published on 7 January 2020

Terrorisme - Robert Badinter: "'Parce que tu es né comme ça, je te tue'. On ne peut pas aller plus loin dans la dégradation humaine !"

Le 7 janvier 2015, le terrorisme frappait la France. Liberté de la presse, menace terroriste, montée de l'antisémitisme : cinq ans après, rendez-vous ce mardi pour un entretien exceptionnel avec Robert Badinter.

Publié le 7 janvier dans France Culture

Le 7 janvier 2015, la France découvrait avec sidération la présence de cellules dormantes sur son territoire, capables de perpétrer des tueries en plein cœur de Paris. Ce jour-là, les journalistes de la rédaction de Charlie Hebdo tombèrent sous les balles des djihadistes et, dans les jours qui suivirent, ce sont des clients de l’Hyper Cacher, porte de Vincennes à Paris, et une policière en service à Montrouge qui sont pris pour cible par le terrorisme islamiste. 

Cinq ans après la vague "Je suis Charlie", quelles sont les menaces qui pèsent sur la liberté d'expression ? Assiste-t-on depuis janvier 2015 à une résurgence de l’antisémitisme ? Où en est le risque terroriste cinq ans après ces attentats ?

Rendez-vous ce mardi pour un entretien exceptionnel en compagnie de Robert Badinter, avocat, essayiste, universitaire, ancien Garde des Sceaux et ancien Président du conseil constitutionnel.

Comme beaucoup d'entre nous, Robert Badinter garde en mémoire l'attaque tragique survenue il y a cinq ans jour pour jour. Si l'identité des auteurs de l'attaque ne l'a pas surpris, c'est l'attentat lui-même en plein Paris, des années après la publication des caricatures de Mahomet, qui l'a stupéfait. Amis de Cabu et de Wolinski, l'événement l'a particulièrement touché, mais au-delà même de ce sentiment personnel, c'est "l'assassinat délibéré, commis de sang froid, et l'atteinte à la liberté de la presse" qui demeurent pour lui douloureusement mémorables.

"Dans l'acte fanatique, vous avez des hommes qui se croient porteurs d'un message divin, ils se réservent le droit de vie et de mort sur les êtres humains, ce que je me refuse à tout homme, à toute société. Là a été le premier outrage." Robert Badinter

Cet attentat perpétré contre la rédaction de Charlie Hebdo a été suivi, deux jours plus tard, le 9 janvier 2015, par une autre attaque terroriste, ciblant cette fois les clients et le personnel de l'Hyper Cacher de la porte de Vincennes.

Acte évidemment antisémite, qui n'est pas sans rappeler à Robert Badinter un souvenir douloureux qui lui a été raconté plus tard, celui de la violente arrestation qu'avait subie sa grand-mère, apatride, durant la Seconde Guerre Mondiale. Face au refus d’obtempérer de la vieille dame, alors malade et affaiblie, l'officier en charge à cette époque trancha froidement : "Ça suffit, ça ne fera jamais qu'une "youpine" de moins ! Le premier qui continue, je lui brûle la gueule."

Robert Badinter de conclure ce parallèle : "Peut-on aller plus loin dans la barbarie que ce jeune homme, le gendarme mobile, tout comme Mohamed Merah qui a tué un enfant ? Jeter une femme mourante dans un camp de concentration, c'est la même barbarie. Et ça vaut pour tout, pour toutes les formes de racisme, de xénophobie, toutes les formes d'intolérance. Et on retrouve là Charlie Hebdo." *

"Tuer un être humain à cause de sa religion ou de son origine est en soi un crime atroce. Atroce parce que c'est une qualité inhérente, ce n'est pas au regard de l'action qu'il a commise, c'est l'expression la plus barbare du racisme ou du antisémitisme. [...] Quand vous dites : 'parce que tu es né comme ça, je te tue !' On ne peut pas aller plus loin dans la dégradation humaine."

"Longtemps j'ai cru que l'antisémitisme en Europe, après le génocide des Nazis, était terminé. Je crains de m'être trompé, je peux mesurer ce retour de l'antisémitisme. Je ne l'aurais pas cru possible. Bien sûr, ça n'a rien à voir avec un système entier fait pour génocider des millions d'êtres humains, mais on a d'autres signes".

 

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