Blog du Crif - L’antisémitisme djihadiste est aussi en procès à Paris

15 September 2020 | 143 vue(s)
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France

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Actualité

Après notre étude sur les Juifs de Finlande, voici, comme convenu et pour coller à l’actualité qui fait que le conflit russo-ukrainien est en train de s’étendre à d’autres pays, un regard sur les Juifs de Suède.

Dès le début de l’offensive russe contre l’Ukraine, nous avons, le 23 février dernier, proposé à nos lecteurs, une étude sur les Juifs d’Ukraine. Depuis quelques jours, le conflit semble s’étendre à deux autres pays, la Finlande et la Suède. Nous vous proposons de découvrir les communautés juives de ces deux pays. Aujourd’hui, les Juifs de Finlande.

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Antisémitisme

Dimanche 12 janvier 2020, le Crif a organisé un voyage de mémoire à Auschwitz-Birkenau. À l'issue de cette journée, je me suis exprimé devant les participants. Voici les quelques mots prononcés.

 

 

Dans cette éditorial, je m'exprime sur les nombreux actes de haines survenus en France et dans le monde en 2019. Je formule également mes voeux de sécurité et de paix pour cette nouvelle année.

 

Meyer Habib, il y a ceux qui l'aiment et ceux qui l'ont en exècre. Mais on ne peut en aucun cas tolérer un tel déferlement de haine antisémite.

Discours prononcé lors de la Plénière de clôture.

"Les juges d’instruction viennent enfin de rendre leur décision dans le meurtre barbare de Sarah Halimi, dans une ordonnance rendue le 12 juillet dernier. Elles estiment qu’il existe des "raisons plausibles" de penser que le discernement du suspect était "aboli" au moment des faits. Si elle est sans surprise, cette décision reste difficilement justifiable."

Ma réaction après l'annonce du report du vote de l'Assemblée nationale pour l'adoption de la définition de l'antisémitisme de l'IHRA. L'Assemblée nationale a également annoncé qu'avant d'être examinée, la proposition de résolution serait réécrite.

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Lorsque l’on parle de l’antisémitisme, l’on pense plus facilement aux persécutions, aux innombrables discriminations, aux humiliations diverses, aux pogroms meurtriers qui ont accompagné/parsemé l’histoire juive, pendant deux millénaires, au moins. A cet égard, la Shoah est le marqueur le plus puissant, celui qui caractérise la barbarie appelée, voulue et programmée par le régime nazi, avec l’extermination systématique, l’extermination scientifique d’hommes, de femmes et d’enfants.

C’est ainsi qu’il faut connaître l'intensité de la haine et être capable de l'analyser pour ne pas en être écrasé. Mais, il ne faut pas oublier/relativiser/ le fait que depuis des décennies, des prédicateurs fanatisés -que nous ne voulions pas forcément et collectivement entendre- édictent méticuleusement, systématiquement, sous des langues différentes et tous les tons, les mots et les adjectifs de la barbarie. Selon eux, la haine du Juif était/est/serait/sera un commandement divin. Les exemples sont nombreux, constants, terrifiants. Mohammed Amin al-Husseini, grand mufti de Jérusalem de 1921 à 1937, n’était-il un grand fan d’Hitler ?

Il est peu de dire qu’hélas dans plusieurs pays de la sphère arabo-musulman, de très nombreux prêches qualifiaient/qualifient encore le Juif, le diabolisant, appelant quelquefois à un châtiment divin et à son extermination. Ces prêches déments sont adressés/ formulés avec le seul objectif de susciter la haine. Ils se travestissent de tous les oripeaux du chaos.

- Par exemple,  comment interpréter autrement les propos antisémites du cheikh Youssef Al-Qaradawi, président de l'Union internationale des savants musulmans, membre du Conseil européen de la Fatwa ?

Voici ce qu'affirme Al-Qaradawi le 28 janvier 2009, sur Al-Jazeera TV, à propos des punitions appelées (soi-disant) par le prophète sur les Juifs :

« Le dernier châtiment a été administré par Hitler. Avec tout ce qu'il leur a fait — et bien qu'ils [les Juifs] aient exagéré les faits —, il a réussi à les remettre à leur place. C'était un châtiment divin. Si Allah veut, la prochaine fois, ce sera par la main des musulmans ». Autre exemple ? Le cheikh Al-Ansari toujours en 2009, après avoir regardé un film sur les atrocités nazies commises sur les Juifs, dit : « [les Juifs] ont transformé [l'Holocauste] en une fête, qui sera célébrée dans quelques jours. Ils l'appellent la « Fête de l'Holocauste » ; ils y ravivent les événements passés pour que le monde entier les voit et ressente de la compassion à leur égard »... C'est ainsi qu'il revisite l'histoire et commente les séquences d'archives de détenus torturés à Dachau, Mauthausen et Belsen : « C'est ce que nous souhaitons pour l'avenir, mais si Allah veut, par la main des musulmans (1). »

 

- Par exemple comment interpréter autrement les propos d’un prédicateur égyptien, Salem Abu al-Futouh, dans une intervention intitulée « Les Juifs boivent le sang humain, de préférence arabe et musulman », diffusée sur Al-Nas (via YouTube) le 5 juin 2010 :

« Ces gens sont des vampires assoiffés de sang. Quand un Juif veut se marier, il doit trouver du sang humain et le donner au rabbin. Le rabbin prend le sang et y plonge un œuf. Il cuit l’œuf dans du sang, plutôt que dans de l’eau. Une fois que l’œuf a absorbé le sang humain – laissez-moi juste préciser que quand il y a un mariage, ils se retrouvent chez le rabbin –, le rabbin place l’œuf dans la bouche de l’homme qui en mord un morceau. Puis il le place dans la bouche de la femme qui en mord un autre morceau. L’œuf contient du sang humain. Ce sont des vampires assoiffés de sang, mes frères… »

 

- Par exemple, comment interpréter autrement le sermon d'Ahmad Bahr, vice-président du parlement du Hamas, diffusé sur la télévision Al-Aqsa du Hamas, le 10 août 2012 ?

« Si l'ennemi pose le pied sur un seul pouce de la terre d'islam, le djihad devient un devoir individuel, qui incombe à chaque musulman, homme ou femme. Une femme peut partir [en djihad] sans la permission de son mari et un serviteur sans la permission de son maître. Pourquoi ? Afin d'anéantir ces Juifs.

[...]

Ô Allah, détruis les Juifs et leurs partisans. Ô Allah, détruis les Américains et leurs partisans. Ô Allah, compte les un par un, et tue-les tous, sans en laisser un seul (2). »

 

- Par exemple, comment interpréter autrement le sermon diffusé le vendredi 14 août 2020 sur la chaîne télévisée Al-Eman (houthis – Yémen) par le cheikh houthi Ibrahim Al-Ubeidi ?

« Les Juifs sionistes sont responsables de l’explosion du port de Beyrouth, du COVID-19, de Daesh, du 11 Septembre, des attentats en France, en Algérie et en Irak » … «  Les sionistes, qui ont créé Daesh, Al-Qaïda et les takfiris qui font tout exploser, au nom du sionisme qui nous bombarde aujourd’hui… Toutes ces explosions, c’est la même chose. L’explosion du 11 septembre, l’explosion de 2001, l’explosion du USS Cole au Yémen, les explosions dans les mosquées yéménites… Toutes ces explosions, même celles en Irak, en Algérie, un peu partout dans le monde, en France et ailleurs, [ont été perpétrées] par le sionisme mondial et par les Juifs, ceux-là même dont Allah a dit : « Ils répandent la corruption sur la terre ». Ils répandent la corruption sur toute la terre. (3) »

 

Le philosophe et historien des idées Pierre-André Taguieff a analysé tous ces phénomènes. Il les explique de la manière suivante :

« Dans l’histoire des formes de judéophobie au XXe siècle et au début du XXIe, le phénomène majeur, après l’épisode nazi, aura été l’islamisation du discours antijuif. Cette islamisation ne se réduit pas à l’invocation de versets du Coran ou de certains hadiths. Elle consiste à ériger, explicitement ou non, le jihad contre les Juifs en sixième obligation religieuse que doit respecter tout musulman. »

Il ajoute aussitôt l’élément d’analyse suivant :

« L’islamisation croissante de la « cause palestinienne », cause victimaire universalisée par le jeu de propagandes croisées, a conféré à cette dernière le statut symbolique d’un front privilégié du jihad mondial. C’est pourquoi la dernière grande vague judéophobe se caractérise par une forte mobilisation du monde musulman contre Israël et le « sionisme mondial », s’accompagnant, chez les prédicateurs islamistes, d’une vision apocalyptique du combat final contre les Juifs. Comme le répète l’article 28 de la Charte du Hamas, qui résume en une phrase l’idéologie antijuive du mouvement islamiste palestinien : « Israël, parce qu’il est juif et a une population juive, défie l’Islam et les musulmans. » Le programme « antisioniste », considéré dans ses formulations radicales, a un objectif explicite qui revient à vouloir « purifier » ou « nettoyer » la Palestine de la « présence sioniste » ou « juive », considérée comme une « invasion » qui souille une terre palestinienne ou arabe (pour les nationalistes) ou une terre d’Islam (pour les islamistes) (5) »

 

Face à tant de haine répétitive, martelée constamment (télévisions, radios, journaux...) et pourvoyeuse de mort, comment s'étonner qu’un terroriste ait massacré froidement/sciemment les clients d'une supérette casher ? Comment s’étonner dans ces conditions que des esprits faibles et endoctrinés à cette idéologie qui promeut/sublime et promet la mort, ne se saisissent pas d’armes pour tuer les Juifs ?

Le procès qui se déroule à Paris -qui n’est pas seulement le procès de Charlie Hebdo, rappelons-le ici-  gagnerait à dérouler ces processus mortifères et à dénouer ces instruments de mort. Par leurs mots assassins, par les délires qu’ils colportent et instrumentalisent, des prêcheurs de haine arment les tueurs et les bêtes sauvages. 

 

Notes :

1.     Vidéo retransmise par le Memri, 27 janvier 2009.

2.    https://www.memri.org/tv/hamas-official-ahmad-bahr-preaches-annihilation-jews-and-americans

3.   http://memri.fr/2020/08/19/le-cheikh-houthi-ibrahim-al-ubeidi-les-juifs-sionistes-sont-les-cousins-des-singes-et-des-porcs-et-sont-responsables-de-lexplosion-du-port-de-beyrouth-du-covid-19-de-daesh-et-du-11-septembre/

4.     Version longue (non coupée) de l’interview de Pierre-André Taguieff (photo) par Violaine de Montclos : « Taguieff : ces islamistes malades de la haine des Juifs », parue dans Le Point, du jeudi 11 octobre 2012, pp. 36-37.

5.  Voir à ce sujet Pierre-André Taguieff, Criminaliser les Juifs. Le mythe du « meurtre rituel » et ses avatars (antijudaïsme, antisémitisme, antisionisme), Editions Hermann, 2020, 368 pages.