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Published on 21 July 2021

France - Samuel Pintel, l’enfant juif qui a échappé à la rafle des nazis à la maison d’Izieu

À l’occasion de la Journée nationale en mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux Justes de France, le Premier ministre Jean Castex s’est déplacé à Izieu (Ain), ce vendredi 16 juillet. Là où 44 enfants juifs avaient été emmenés par les nazis en 1944. Samuel Pintel a échappé de justesse à la rafle.

Publié le 16 juillet dans Ouest-France

Samuel Pintel avait quitté ce refuge d’Izieu (Ain), juste avant, récupéré par des amis parisiens. Juste avant que ses 44 camarades de 5 à 17 ans, tous juifs, soient victimes d’une rafle le 6 avril 1944, avec leurs sept éducateurs, sur ordre de l’officier nazi Klaus Barbie, surnommé le « boucher de Lyon ». Une chance dans ce malheur.

Comme il avait eu cette chance, dans son malheur, le 16 novembre 1943 lorsque sa mère lui avait lâché la main, alors que les juifs subissaient un nouveau contrôle de la part d’un officier allemand. « Je ne suis plus ta mère », lui avait-elle lancé, après avoir échangé un long regard avec une autre femme, juste à côté de lui, la seule à cet endroit qui n’était pas juive et qui lui avait à son tour pris la main.

« Je dois la vie à cette femme » (qu’il n’a jamais retrouvée). Elle l’avait emmené au bureau de l’Union générale des Israélites de France, à Chambéry (Savoie), dès le 17 novembre au matin. Le 18, il était parti, avec son copain Marcel, confié à Miron Zlatin, le directeur de la maison d’Izieu, venu les chercher à vélo relié à une carriole.

« Un cageot à roulettes » en réalité, sourit Samuel Pintel, âgé à l’époque de six ans. Dans cet engin de fortune, ils avaient été emmenés à la maison d’Izieu, 45 kilomètres plus loin, là où un sous-préfet avait dit en 1943 à Sabine Zlatin, la femme de Miron, désireuse elle aussi de protéger des enfants juifs, « ici, vous serez tranquilles ». Ce ne sera le cas que pendant une année.

L’ambiance était « rude »

Samuel Pintel s’est attaché à la maison d’Izieu avec le temps. Mais son passage de deux mois et demi dans ce lieu où il était arrivé au début de l’hiver « en culotte courte », sans rien de plus comme bagage, reste un « très mauvais souvenir ». Il reconnaît sa chance d’y avoir été accueilli, dans cette maison au bord du Rhône offrant une vue panoramique sur le massif de la Chartreuse.

Mais l’ambiance était « rude ». Il se souvient d’avoir été puni et même « engueulé par la doctoresse » de la maison. « Outre le fait qu’il y avait les copains, les copines, que l’on chahutait et qu’on arrivait presque à oublier notre condition d’enfant juif, j’étais perdu. Je ne savais pas où était ma mère, je ne savais même pas où moi j’étais. »

Ce n’est que bien plus tard, lors du procès de Klaus Barbie en 1987 à Lyon (Rhône), qu’il a pu mettre le nom d’Izieu sur ses souvenirs, alors qu’il suivait l’audience à la télévision. À la maison devenue un mémorial, il a rencontré Jean Castex, ce vendredi, à l’occasion de la Journée nationale en mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux Justes de France.

Dans ce lieu, le regard doux de Samuel Pintel se crispe aujourd’hui à l’évocation de l’étoile jaune utilisée par les anti-vaccins, comme un parallèle avec la situation des juifs lors de la guerre. « Ça me met hors de moi. »