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Publié le 5 Octobre 2011

Bassma Kodmani: «Il faut asphyxier le régime syrien»

La politologue Bassma Kodmani est membre du secrétariat général du Conseil national syrien, qui vient d'annoncer à Istanbul qu'il regroupait les principales organisations de l'opposition au régime de Bachar el-Assad.




Pourquoi l'opposition a-t-elle mis si longtemps à s'unir ?



Bassma Kodmani : Cette union est le fruit d'un travail de plusieurs semaines, mené par un groupe de personnalités neutres et indépendantes des partis. Des tentatives précédentes avaient échoué à cause de la dispersion d'une opposition investie autant dans des personnes que dans des formations politiques.



La présence des Frères musulmans pose-t-elle un problème ?



Les Frères musulmans syriens n'ont aucun problème à accepter la diversité de la société. Ils acceptent aussi un État civil et démocratique. Ce sont des gens très politiques, ils savent bien qu'ils doivent travailler avec des non-islamistes. Par ailleurs, il ne faut pas exagérer leur influence. Ils ne sont pas très présents sur le terrain. Il y a d'autres partis islamistes modérés, qui ont aussi rejoint le Conseil.



Comment le Conseil national syrien réagit-il face à la tentation de la lutte armée en Syrie ?



Il est vrai que les défections de militaires se multiplient, et que les soldats partent avec leurs armes. C'est de cela que nous avons peur. Le Conseil a pour mission de prendre contact avec ces militaires et de voir avec eux comment on peut éviter le passage à la lutte armée. Le conseil prône toujours la lutte par des moyens pacifiques.



Le mouvement de protestation est-il en train de s'essouffler ?



Il s'essouffle un peu. La stratégie de répression du pouvoir est beaucoup plus efficace aujourd'hui qu'au début de la contestation. Les manifestants ont parfois du mal à tenir. C'est pourquoi le Conseil national syrien demande pour le peuple la protection de la communauté internationale.



La «Déclaration d'Istanbul» demande aux gouvernements et aux organisations internationales de «protéger le peuple syrien» en «arrêtant les crimes… commis par l'actuel régime illégitime.» En s'appuyant sur les mêmes mots, les Occidentaux sont partis en guerre contre Kadhafi. Souhaitez-vous désormais une intervention militaire ?



Non. Le Conseil national syrien refuse toute intervention militaire. Je souhaite que le régime soit asphyxié par d'autres moyens, financiers, diplomatiques… Le conseil se réunira prochainement pour faire des propositions précises dans ce sens. Il souhaite aussi impliquer les voisins arabes de la Syrie, qui ont un rôle important à jouer. Nous espérons d'ailleurs tenir notre prochaine réunion au Caire, où la révolte syrienne jouit d'un grand soutien.



Le Conseil national syrien va-t-il demander à être reconnu comme la seule autorité politique du pays, comme l'avait fait le Conseil national de transition libyen ?



Pas tout de suite. Ce sera pour une prochaine étape. Nous espérons qu'à ce moment-là la reconnaissance de la communauté internationale arrivera rapidement.



Le régime de Bachar el-Assad peut-il encore durer longtemps ?



On ne peut rien prévoir avec certitude. Il faut espérer que la création du Conseil national syrien accélérera la décrédibilisation totale du pouvoir.



Photo (Bassma Kodmani) : D.R.



Source : le Figaro du 5 octobre 2011
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