Actualités
|
Publié le 30 Mars 2011

«L’Archéologie du Judaïsme en France et en Europe»

Chaque année, rien qu’en France, des centaines de km² sont touchés par des travaux d'aménagement du territoire entraînant la destruction des vestiges que recèle le sous-sol. Cependant, depuis une vingtaine d’années, l’essor de l’archéologie préventive en milieu urbain et rural, a permis la sauvegarde par l’étude de certains sites et la découverte d’un grand nombre de vestiges témoignant de la présence juive en Europe depuis l’Antiquité. Ces mises à jour complètent les sources textuelles et renforcent la preuve historique « d’une vie riche et complexe de la Diaspora juive » sur le continent, très active dans la société médiévale.




En janvier 2010, s’est tenu à Paris le colloque international « Archéologie du Judaïsme en France et en Europe » organisé à l’initiative du Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme et de l’Institut national de recherches archéologiques préventives et dont les actes ont été publiés dans cet ouvrage, dirigé par Paul Salmona, directeur du développement culturel et de la communication à l’INRAP, et Laurence Sigal, directrice du MAHJ.



Dans une approche scientifique, les différents intervenants, spécialistes de la recherche historique et archéologique, retracent le passé historique des communautés juives à travers les « Juiveries » et autres vestiges découverts (bains rituels, écoles talmudiques, latrines, cimetières) en Albanie, Italie, en passant par la France, l’Espagne et la République Tchèque.



« Chaque fouille permet de rappeler l’existence des communautés juives dans notre pays, avec ses heures sombres et ses heures brillantes », souligne Jean-Paul Jacob, président de l’INRAP, dans sa préface. « Ces vestiges modifient nos représentations et réinscrivent une réalité ancienne : celle de l’insertion des Juifs dans la France médiévale, de leur culture et de leur apport à l’histoire de notre pays, dont ils furent une composante ancienne, et ce malgré les bannissements et expulsions dont ils ont été victimes », explique t-il.



A Syracuse, comme l’explique Angela Scandaliato, un bain rituel a été mis à jour sous le Palazzo Bianca. Ce mikve se trouve à proximité d’une ancienne synagogue, devenue l’église San Giovanni Battista après l’expulsion des Juifs de Sicile, sous domination espagnole.
En Hongrie, Andras Végh a retrouvé, dans l’ancien quartier juif de Buda, à proximité du Palais royal, la synagogue médiévale, dont l’emplacement était oublié. Les vestiges mis à jour permettent de reconstituer le plan du bâtiment, similaire à l’Altneue Shul de la rue Josefov à Prague.
La découverte des nécropoles et des cimetières nous renseigne sur les rites funéraires (la variété des types d’inhumation, la disposition des tombes, l’orientation des corps, etc.) comme l’explique Michaela Selmi Wallisova dans son exposé sur le cimetière juif médiéval du quartier de Nove Mesto à Prague ou bien José Antonio Riquelme Cantal et Daniel Botella Ortega à propos de la nécropole de Lucena (province de Cordoue).



Pour le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, qui préface également l’ouvrage, ces découvertes fondamentales des vestiges du judaïsme en Europe agissent « contre l’oubli et contre les négateurs de l’histoire, indissociables du projet d’anéantissement de masse mis en œuvre par le nazisme ».



Ces études et ces mises à jour des sites juifs anciens apparaissent telle une renaissance et apportent des données nouvelles pour une meilleure connaissance du judaïsme. La vie juive, oubliée et disparue, refait surface et reprend ainsi sa place dans l’histoire générale des pays européens.



Stéphanie Lebaz-Benaroc



« L’Archéologie du Judaïsme en France et en Europe » sous la direction de Paul Salmona et Laurence Sigal, Edition La Découverte, Paris, 2011, 357 p.



Photo : D.R.