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Publié le 28 Avril 2011

Monique Esther Rotenberg, auteur de «la femme silencieuse»: Zweig, l’homme et le visionnaire

Le mercredi 11 mai, sous l’égide du CRIF la pièce de Monique Esther Rotenberg « la femme silencieuse » consacrée à Stefan Zweig, sera représentée à 21h au théâtre Rapp, 4, square Rapp, 75007 Paris. Elle répond aux questions de la newsletter du CRIF.




On connait l’avocat. On découvre l’auteur. Qu’est-ce qui vous a conduit à écrire une pièce de théâtre ?



Le théâtre m’a toujours attirée d’autant plus que j’ai suivi des cours d’art dramatique lorsque j’étais étudiante. Puis l’envie de jouer a évolué en désir d’écrire.



Vous avez choisi d’écrire une pièce consacrée à Stefan Zweig. Pourquoi lui ? Qu’est-ce qui vous a attiré dans sa personnalité et son œuvre ?



On peut entrer dans l’œuvre de Stefan Zweig par plusieurs portes : s’intéresser à ses biographies plutôt qu’à ses romans ou ses nouvelles. Comme beaucoup sans doute, je l’ai lu en plusieurs temps ; mais c’est « le monde d’hier » qui m’a fait découvrir l’homme et le visionnaire.



Considérez-vous comme Jean – Jacques Lafaye que c’est un « aristocrate juif au cœur de l’Europe » ?



Je crois effectivement que cette formule convient parfaitement à Stefan Zweig. Ce qui est d’ailleurs intéressant dans la magnifique biographie que Jean Jacques Lafaye lui a consacré sous le titre évocateur de « l’avenir de la nostalgie » est précisément que la judaïté de Zweig n’y est pas mise en exergue. Il lui a consacré un écrit à part sur ce thème précisément pour analyser à travers ses écrits ou ses discours la part juive qui coexistait naturellement avec sa culture viennoise.



Pourquoi ce titre « la femme silencieuse »?



Stefan Zweig a écrit le livret de « la femme silencieuse » opéra composé par Richard Strauss. Cet opéra fut représenté pour la première fois en juin 1935 à Dresde devant tout un aéropage de dignitaires nazis. L’œuvre fut interdite après trois représentations. On lui a donc coupé la voix. Or quelque temps avant, Zweig avait fait le choix de vivre à Londres. La secrétaire qu’il engage alors qu’il est en train de rédiger la biographie de Marie Stuart deviendra par la suite sa deuxième épouse et c’est avec elle qu’il se suicidera. Le titre fait donc aussi référence à la personnalité discrète de cette femme mais aussi au silence de son épouse qui pendant ces années va préférer ne pas voir le monde s’écrouler autour d’elle.



Stefan Zweig a connu « le monde d’hier », puis s’est exilé à cause du nazisme pour finir par se suicider au Brésil ; Pensez-vous que cette destinée était inévitable ?



Les paramètres d’un suicide sont toujours plus vastes qu’il n’y paraît et je ne sais pas si l’on peut affirmer qu’un suicide est inévitable. Ce qui paraît certain, c’est que si Zweig a réussi à mettre son corps à l’abri à travers ses exils successifs il n’a pas pu s’extraire psychologiquement. Jean-Jacques Lafaye a une très belle expression en disant que Zweig avait épuisé tous les désespoirs. Je pense aussi que lui qui croyait tant en la force de l’esprit n’a pas pu accepter en tant qu’écrivain, précisément que ses écrits soient devenus vains.



Quelle est l’œuvre de Zweig qui vous a le plus marqué ?



J’ai une préférence pour «Le monde d’hier » que j’ai déjà cité et qui a valeur de testament pour les générations futures. En même temps qu’il décrit tout son arrière-monde, l’homme se cherche une solution d’avenir vers ce Brésil qui lui paraît déjà à l’époque si prometteur, et ce contraste est d’autant plus saisissant que l’on connaît la réponse qu’il y a apportée.



D’autres projets d’écriture ?



Absolument : une comédie cette fois avec en toile de fond une affaire judiciaire.



Photo : D.R.