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Publié le 4 Mars 2011

Richard Prasquier à Paris Notre-Dame : «Je ne perds jamais de vue le chemin qui a été parcouru entre Juifs et catholiques»

Du 27 février au 2 mars, soixante-dix représentants du judaïsme mondial et du Saint-Siège se sont retrouvés à Paris pour la 21e session du Comité international de liaison catholique-juif (IJCIC). Parmi eux, le Dr Richard Prasquier, président du CRIF, que Paris Notre-Dame a rencontré.




La première rencontre de l’ILC a eu lieu en France, il y a vingt-sept ans. Aujourd’hui, c’est à nouveau chez nous que se retrouvent les membres des hautes instances du judaïsme mondial et les représentants du Vatican. En quoi cela a-t-il du sens ?



La France est un pays important pour le dialogue entre les catholiques et les Juifs car les liens qui se sont tissés dans l’hexagone entre nos deux peuples ont été l’un des moteurs de la transformation de nos relations au niveau mondial. Durant la guerre, des prêtres français ont protégé des Juifs, tout comme un grand nombre de chrétiens. C’est à cette époque que des personnalités catholiques, comme Pierre Chaillet, le fondateur de Témoignage chrétien, ont écrit les premiers textes démontrant le caractère incompatible du national socialisme avec le christianisme. Insistant sur une prise de conscience autour de cet aspect de la foi catholique, un mouvement de fraternité vis-à-vis des Juifs s’est manifesté en France à la fin de la guerre, malgré la frilosité d’une partie de l’Église. Par exemple, les amitiés judéo-chrétiennes, grâce au travail de Jules Isaac, célèbre historien, ont été un terreau fructueux pour le dialogue entre Juifs et catholiques. Cela amené à ce que l’on passe peu à peu d’une théologie de la substitution à une reconnaissance de la pérennité de la promesse de Dieu vis-à-vis du peuple juif et du chemin particulier qu’est la mission du peuple juif au sein de la mission du salut.



Comment cet effort de dialogue s’est-il traduit à Paris ?



Après le concile Vatican II et la publication de la déclaration conciliaire Nostra aetate, de grands hommes ont fait vivre la relation entre les Juifs et les catholiques à Paris. Le grand rabbin de France Jacob Kaplan et le cardinal Albert Decourtray, archevêque de Lyon, en ont été des acteurs forts. Le cardinal Jean-Marie Lustiger y a lui aussi apporté une grande contribution, en créant des rencontres entre le congrès juif mondial et des évêques catholiques, qui abordent les questions de théologie entre nos deux religions. Le choix d’une rencontre au Collège des Bernardins, pour cette 21e session, lieu de dialogue porté par Mgr Lustiger, est d’ailleurs un signe fort.



Quels sont les différents lieux faisant l’objet de visites ?



Outre les tables rondes, des moments ont été prévus pour aller sur les traces de l’histoire des Juifs français car la majorité des participants ne réside pas dans l’hexagone. Ces lieux de mémoire, qu’il est important de ne pas oublier, sont nombreux dans notre pays, comme le camp de Drancy. Celui-ci est aussi un endroit symbolique car les évêques français dont les villes avaient accueilli des camps y ont fait une déclaration de repentance en 1997. Des haltes sur les traces du passé, réalisées main dans la main avec les catholiques, sont des signaux importants envoyés aux jeunes d’aujourd’hui. Souvent, ces derniers pensent que le dialogue que nous menons coule de source, alors qu’il est miraculeux.



Que représente cette rencontre biennale à vos yeux ?



Quand je participe à ces rencontres, j’ai toujours une pensée pour mes arrière-arrières grands-parents. Ils vivaient dans un petit village de Pologne, dans un univers totalement séparé du monde catholique. Les deux communautés évoluaient comme si elles étaient sur des planètes différentes. Et la vie des Juifs n’était pas simple… ils étaient considérés comme des parias et l’antisémitisme était naturel. Je ne perds jamais de vue le chemin qui a été parcouru, parsemé d’événements terribles, mais qui a amené une transformation bénéfique des relations entre Juifs et catholiques.



Propos recueillis par Sophie Lebrun



Photo : © 2011 Alain Azria



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