Actualités
|
Publié le 9 Novembre 2007

Roitman : une histoire qui montre avec clarté les discriminations

Pour vous, c’est quoi le Yémen ?


Pour moi c’est d’abord l’antique royaume de Saba, un pays mythique, superbe, sauvage et encore féodal, un des plus fermés au monde, et à tout étranger jusqu’au vingtième siècle, situé au sud-ouest de la péninsule arabique avec pour capitale Sanaa. Une des plus anciennes diasporas juives, remontant sans doute à la destruction du deuxième Temple, y a vécu, on peut même dire survécu, pendant plus de deux mille ans - jusqu’à l’opération « Sur les ailes des aigles » (Ex. 19,4) ou « Opération tapis volant » où la plus grande partie de ses membres fut ramenée en Israël en 1948.
Pourquoi, selon vous, les Juifs du Yémen ont-ils choisi de partir ?
Les juifs du Yémen ont su maintenir des traditions juives très fortes. Des correspondances rabbiniques témoignent de leurs contacts avec les académies juives de Babylone et avec le centre intellectuel de Fostat en Egypte, ainsi qu’avec la Palestine où certains se sont installés dès le 12ème siècle. Tout au long de leur histoire ils sont donc restés très proches de la Bible et du message messianique du retour vers la Terre Promise.
Par ailleurs, avec la fin de la présence ottomane la condition des Juifs a connu une nouvelle dégradation : en 1905, le « Pacte d’Omar » fut renouvelé, rappelant leur statut de dhimmis avec des droits considérablement restreints et l’obligation d’acquitter un impôt par capitation, la « djizia », pour rester « protégés ». En 1925, l’obligation de se convertir à l’islam fut également imposée aux orphelins. Les conditions matérielles, sociales, politiques des Juifs étaient donc déplorables dans le pays. La première vague d’émigration des Juifs du Yémen vers la Palestine commença en réalité dès 1882 et se prolongea de façon continue sous le régime si rigoureux des Chiites, jusqu’à leur fuite vers Aden en 1948 et leur départ massif vers Israël.
Pourquoi, pour qui, maintenir vivace le souvenir d’une communauté juive millénaire qui a compté jusqu’à cent mille personnes et dont il ne reste plus que quelques centaines d’âmes ?
C’est une communauté dont l’histoire, la richesse culturelle, l’artisanat remarquable, méritent d’être connus de tous - d’autant plus que leur émigration en Israël a précipité leur évolution, en particulier religieuse, qui a été à l’abri des changements pendant des siècles. C’est aussi une histoire qui montre avec clarté les discriminations, les violences et les humiliations vécues par toute une communauté dans un pays arabe musulman, jusqu’à ce jour pour ceux qui y vivent encore.
Propos recueillis par Jean-Pierre Allali
Maintenance

Le site du Crif est actuellement en maintenance