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Publié le 21 Février 2019

Antisémitisme - Hashomer Hatzair : Lettre à la jeunesse de France

"Ces dernières années, et encore davantage ces dernières semaines, l’antisémitisme renaît de ses cendres en France."

Lettre ouverte de l'Hashomer Hatzaïr France

Monsieur le Président de la République,
Chers compatriotes, vous, qui croyez si intensément aux valeurs de la République,
Chère jeunesse, toi, qui tiens dans tes mains l’avenir de celle-ci,

Ces dernières années, et encore davantage ces dernières semaines, l’antisémitisme renaît de ses cendres en France. Ilan Halimi en 2006, torturé puis tué parce que juif; la tuerie de l’école Ozar Hatorah en 2012, et des enfants assassinés lâchement, parce que juifs; l’attentat de l’hypercasher en 2015, quatre personnes tuées lors de leurs courses pour Shabbat, parce que juives; Mireille Knoll, rescapée de la Shoah et poignardée à son domicile en 2018, parce que juive.

Cette semaine encore, la vitrine d’un magasin Bagelstein a été souillée de l’inscription « juden ». Des croix gammées ont été inscrites sur le visage de Simone Veil, l'ancienne ministre rescapée de la Shoah. Ce samedi, Alain Finkelkraut était victime d’un acharnement choquant lors d’une manifestation, humilié et insulté publiquement, parce que sioniste et juif.

« Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire ». Albert Einstein avait raison. Trop de personnes regardent sans rien faire, trop de personnes attendent que l’on fasse à leur place, trop de personnes se réfugient dans un confort illusoire, ce confort à la fois déculpabilisant et rassurant selon lequel l’antisémitisme appartient au passé. Et voilà que les fondements de notre République s’altèrent progressivement…

Tout d’abord, non, l’antisémitisme n’est pas que le problème de nos grands-parents, il est aussi le nôtre, sera celui de nos enfants, et de nos petits enfants tant que perdurera cet élan de passivité. D’autre part, non, l’antisémitisme n’est pas que le problème des juifs, dès lors que la devise de la République Française est la suivante: Liberté, Egalité, Fraternité. Accepter
l’antisémitisme ou toute forme de racisme, c’est oublier la fraternité, mépriser la devise de la France, refuser la République. Honte à tout citoyen français qui regarde, avec désintérêt, son pays retourner à ses heures les plus sombres… Les Français auraient-ils la mémoire courte ?

Nous, jeunes de l’Hashomer Hatzaïr, ne voulons plus participer à ce mépris collectif des valeurs magnifiques qui ont construit la République Française, précisément car nous aimons la France. Nous ne l’abandonnerons pas à la haine raciale, nous n’abandonnerons pas la France aux préjugés, nous n’abandonnerons même pas la France à « ceux qui regardent sans rien faire. » L’Hashomer Hatzaïr ne veut plus subir l’intolérance, et lance un appel aux citoyens français, plus particulièrement à la jeunesse française, résolument assoupie. Parce que l’histoire nous a prouvé que la jeunesse française était une force sommeillante, se réveillant lors des plus grandes phases de perversion de la société, pour saisir les rennes de sa renaissance.

En mai 1968, fatigués de l’oppression, les jeunes devenaient maîtres de leur propre émancipation. Plus tôt encore, pendant l’occupation nazie, la jeunesse de l’Affiche Rouge, portée par Manouchian, prenait la tête de la lutte armée contre les nazis, nourrie par l’amour de la liberté. Le plus jeune de ces combattants de la haine, fusillés le 21 février 1944, était Wolf Wajsbrot, âgé de dix-sept ans… Nous, jeunes de l’Hashomer Hatzaïr, sommes effarés devant cette inertie de la jeunesse.

Mais qu’en est-il de ces jeunes assoiffés de justice et de liberté, prêts à se soulever quand leurs idéaux sont menacés ? Comment la jeunesse française, qui fut jadis la plus révoltée, la plus soucieuse de l’avenir de la condition humaine, reste-t-elle passive face à la renaissance si flagrante de l’antisémitisme ?

Chers jeunes, revenez rêver d’un monde sans racisme, d’un monde sans violence, d’un monde où l’amour et la liberté écrasent la haine de l’autre, revenez rêver d’un monde meilleur. Wajsbrot n’avait que dix-sept ans, et en aucun cas son jeune âge ne fut un frein à son action. Eliminer des nazis n’était pas une question d’âge, quand l’avenir du monde était en cause.

Se battre contre l’antisémitisme n’est pas une question d’âge, quand les fondements de la République sont menacés.

Alors, chers concitoyens, juifs ou non juifs, jeunes ou plus âgés, ne baissez pas les bras. Ne regardez plus sans rien faire. Ne laissez pas la terre des droits de l’homme nourrir ces affamés de haine. Levez le voile sur l’émergence d’un nouvel antisémitisme rampant, qui effraie les Juifs de France, et honorez les Manouchian, Moulin, les Wasjbrot, martyrs de la lutte contre l’abandon de la France au triomphe du fanatisme.

Chers concitoyens, associations non lucratives, mouvements et partis politiques, mouvements de jeunesse engagée, rejoignez l’Hashomer Hatzaïr dans la lutte. Faisons revivre ensemble l’antiracisme français. Comme toute idée dont les fondements sont fébriles, le racisme et l’antisémitisme sont parfaitement vincibles. Chers concitoyens, combattons-les avec férocité, et les mauvais jours finiront.

Un jeune de 17 ans, éducateur à l’Hashomer Hatzaïr France

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