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Publié le 4 Septembre 2015

Cérémonie de commémoration des prisonniers du Fort Montluc fusillés à Bron

Discours de Nicole Bornstein, Présidente du CRIF Rhône-Alpes

Nous voilà à nouveau rassemblés, ce 3 septembre, pour ranimer le souvenir de 109 victimes, 109 prisonniers du Fort Montluc particulièrement emblématiques de la barbarie du régime nazi.
Extraits de la prison de Montluc, résistants pour certains, simples civils pour d’autres, adolescents, femmes, vieillards, juifs pour la plupart, ils furent lâchement exécutés à la veille de la libération de Bron.
 Ici,  leurs noms sont à jamais gravés.
L’an dernier, un siècle après la première guerre mondiale, et 70 ans après la seconde, une très belle cérémonie initiée et organisée par Madame Annie Guillemot Sénateur Maire de Bron, inaugurait les «  Chemins de la Mémoire ».
Car , en 2014 était venu le temps de la disparition des témoins…
Avec eux, peu à peu s’estompent, s’éteignent nos références, nos points d’ancrage…pour ne pas perdre la mémoire !
Seuls ces lieux de mémoire demeureront, au fil du temps, les « petits cailloux blancs » des jeunes générations sur les chemins de la connaissance.
Profitons-en d’ailleurs pour souligner les efforts considérables faits aujourd’hui pour impliquer dans ces commémorations la jeunesse.
Profitons-en ici  pour en remercier chaleureusement les instigateurs et les enseignants qui les entourent dans cette tâche oh combien difficile aujourd’hui !!
Mais la mémoire ne doit pas être
- qu’une mémoire historique
-qu’une mémoire glacée, 
-qu’une mémoire figée dans la pierre,
 -qu’une mémoire parfois source d’immobilisme…
La mémoire, c’est aussi rappeler que la Libération de la France s’est faite grâce à l’héroïsme d’hommes, de femmes, de combattants de l’ombre, de soldats d’outre Atlantique et bien sûr, comme certains aiment à le dire avec insistance, de français qui avaient de la terre de France dans leurs souliers depuis des générations. 
Mais la mémoire, c’est encore rappeler que la libération de la France c’est aussi l’œuvre de français d’adoption, de français de cœur, de soldats venant de nos colonies, de combattants réfugiés dans notre pays car chassées par des régimes racistes et fascistes de l’Est de l’Europe, d’Italie, d’Espagne, d’Arménie ….
Aujourd’hui, la barbarie n’a jamais autant été au centre de l’actualité avec ses massacres de masse, ses massacres de populations civiles.
La fin du 20ié siècle a connu les khmers rouges, le génocide ruandais.
Le 21iè siècle s’est inauguré par le 11 septembre 2001, suivi de sa cohorte de conséquences, notamment en Afghanistan et en Irak.
Les media, jour après jour, nous relatent, jusqu’à saturation, les actes de barbarie au Nigéria, en Lybie, en Irak, en Syrie et ailleurs dans le monde.
Des communautés entières, parce que minoritaires, ou minoritaires et réfractaires, subissent au quotidien massacres, viols, expulsions…
Et nous restons impuissants. Voir passifs devant nos écrans !
Certes c’est ailleurs… loin
mais non pas si loin….et les assassins essaiment !!
Notre pays a été frappé, puis sidéré le 7 janvier 2015 par les tueries de Charly hebdo et de l’hyper casher..
IL y a peu, à quelques encablures d’ici, à St Quentin Fallavier, une décapitation était arborée et une catastrophe Seveso miraculeusement évitée
Nous avons bien sûr tous en tête l’attentat manqué du Thalys Amsterdam-Paris…Je tiens ici à saluer le formidable et exemplaire courage de ces voyageurs, résistants d’un nouveau temps, sans lesquels il y aurait eu des centaines de victimes !
Les barbares nazis ont fait des émules !
Ne nous y trompons pas, si les circonstances s’y prêtaient, ils seraient capables de crimes de la même ampleur !
Que faisons-nous aujourd’hui face à cette barbarie ?
La barbarie d’hier interpelle-t-elle nos consciences ?
Si nos dirigeants ont, semble-t-il, pris la mesure des dangers qui nous menacent par leur engagement sur le terrain militaire et les décisions prises pour la lutte contre le terrorisme, nous ne pouvons manquer de nous interroger quand, dans le même temps, une certaine impuissance voir un certain fatalisme s’affichent face à cette nouvelle forme de guerre….
Inquiétude aussi face à une certaine frange de l’opinion encline sous différents prétextes... à un esprit munichois.
On ne peut s’empêcher de penser aux pacifistes d’avant-guerre, dont certains d’entre eux devinrent collabos.
Mais la barbarie, c’est aussi celle qui, comme dans les années 30, engendre la fuite des populations menacées et la nature de l’accueil qui leur est fait.
Comment ne pas se souvenir de l’enfermement dans des camps des réfugiés républicains espagnols fuyant le franquisme dans sa période la plus sombre ?
Comment ne pas se souvenir du St Louis, ce paquebot remplis de juifs fuyant l’Allemagne nazie en 1939 et qui s’est vu refusé d’accoster à Cuba puis dans les ports américains et qui, finalement, dut faire demi-tour vers l’Europe ?
La plupart de ses passagers sont partis en fumée dans les camps d’extermination… !!
Comment ne pas se souvenir des camps français de Recebeou, des Milles, de Rivesalte, de Gurs, camps créés par la 3iè république finissante et où furent enfermés, avant la guerre, les réfugiés allemands, qu’ils soient politiques ou juifs ?
 Quand vint l’occupation, les nazis n’eurent plus qu’à se servir pour accomplir leur funeste besogne… !
A quoi sert le souvenir de la barbarie nazie, à quoi sert le souvenir du sort infligé aux réfugiés des années 30 si, aujourd’hui, nous n’ouvrons pas nos yeux, nous n’ouvrons pas nos portes, nous n’ouvrons pas des bras secourables à ceux qui fuient la barbarie des dictatures et de l’état islamique ?
A chaque commémoration, nous nous promettons de retenir les leçons du passé.
Il n’est que temps que cela se traduise par des actes.
Sinon, nous serons tous engloutis dans la nuit et le brouillard, là où République, Démocratie, Pays des droits de l’homme ne seront plus que vieux souvenirs…
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