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Publié le 4 Septembre 2017

#Crif - Crif Auvergne Rhône-Alpes, discours de Nicole Bornstein à la Cérémonie de libération de Bron

Discours de Nicole Bornstein, Présidente du Crif Auvergne Rhône-Alpes, lors de la cérémonie de la libération de Bron, le 3 septembre 2017.

Année après année, c’est à l’initiative de Jean-Jacques Queyrane puis de son successeur au sein de la Mairie de Bron, Madame la sénatrice Annie Guillemot, que le CRIF Auvergne Rhône Alpes est convié à participer à la cérémonie d’anniversaire de la libération de Bron, le 3 septembre 1944, et nous les en remercions encore aujourd’hui ainsi que Monsieur Michel Longueval et son conseil municipal pour en maintenir la tradition.

Bien sûr, c’est un grand honneur pour nous d’être associés à cet anniversaire qui marque ce qu’était pour tous à l’époque, de Bron et d’ailleurs à Lyon et en région, la victoire sur l’ennemi et pardessus tout un espoir de retour à la liberté, à la paix, à la vie tout simplement.

Mais c’est aussi, plus spécifiquement, l’occasion de rappeler chaque année la mémoire de 109 victimes de la barbarie nazie, 109 victimes dont les noms sont gravés ici.

Qui étaient-elles ?

Des hommes, des femmes de tous âges dont des adolescents et des vieillards, de simples civils, certains résistants, des juifs pour la plupart, extraits à la veille de la libération des geôles de la sinistre prison du Fort Montluc pour, au prétexte d’opération de terrassement et de déminage, être lâchement assassinés sur l’aéroport militaire de Bron.

L’occupant nazi conscient que la fin était proche s’acharnait alors à exécuter toujours plus d’otages, toujours plus de juifs !

En 2014, 70 ans après la fin de la deuxième guerre mondiale, et alors qu’on entrait dans le temps de l’inéluctable disparition des témoins, ici même étaient inaugurés les «  Chemins de la Mémoire » en souvenir du chemin parcouru par ces détenus de la prison Montluc.

Remercions en ici les initiateurs et en particulier Madame la sénatrice Annie Guillemot, Monsieur Gérard Collomb aujourd’hui Ministre d’état, Ministre de l’intérieur, et tous ceux qui continuent de marcher sur tous ces chemins de la mémoire en y associant les plus jeunes, cette génération qui aura bientôt l’entière responsabilité de faire vivre la mémoire, notre mémoire collective.

A ce titre, cette année est pour Lyon une année particulière puisque c’est celle des Trente ans du  Procès Barbie, premier procès en France pour crime contre l’humanité, qui s’est tenu à Lyon, Barbie celui que l’on appelait communément le boucher de Lyon pour toutes les atrocités commises par lui dans notre région.

Durant cette année et jusqu’en novembre prochain, de nombreux évènements et conférences ont été organisés pour sensibiliser le plus grand nombre, en particulier les jeunes et tous ceux qui n’avaient pas assisté à ce procès, à cette sombre période de notre histoire.

Mais il est bien long le chemin de la mémoire !

Il est bien long pour que cette mémoire s’inscrive dans tous les esprits en y ancrant des racines qui pourront bourgeonner positivement pour l’avenir …

Il est bien long le chemin de la mémoire et plein d’embûches pour faire taire les voix dissonantes, les voix discordantes, les voix déformantes, les voix grinçantes, les voix de ces nouveaux fous ou de ces nihilistes alcooliques qui vainement visent à détruire les traces en salissant ou en vandalisant des stèles…comme récemment celle en mémoire d’Anne Franck dans le 3iè arrt de Lyon ou celle des 44 enfants d’Izieu et de leurs 7 accompagnateurs dans le 7iè arrt.

Chaque commémoration est toujours l’opportunité lors des discours prononcés d’évoquer une tranche de l’Histoire en lien direct avec l’évènement commémoré et l’occasion d’en tirer quelques leçons.

Ainsi, selon les époques et l’opinion des orateurs, la commémoration du 11 Novembre donna lieu, selon qu’il s’appuyait sur la boucherie des tranchées à des discours pacifistes ou selon qu’il s’appuyait sur l’héroïsme et le sacrifice des soldats pour la patrie à des discours nationalistes, voir bellicistes.

Remarquons que ni les uns ni les autres n’empêchèrent la guerre et la défaite de juin 1940, et qu’on en retrouvera aussi bien dans les rangs des résistants que dans le camp des collaborationnistes !

La résurgence de l’extrême droite, inexorable depuis les années 60, n’a pas manqué d’être évoquée lors des commémorations en lien avec cette triste période de 39-45…

Des appels à la vigilance, des déclarations d’amour aux valeurs de l’humanisme, de la démocratie, de la République n’ont-ils pas été ramenés au niveau d’incantations alors que le boulet de l’extrême droite nous a frôlés de bien près lors des dernières élections présidentielles ?

Le terrorisme de l’islamisme radical ne manque pas, depuis 2015, d’interpeler toute la société française et il est peu de discours aujourd’hui, lors des commémorations, qui n’y fassent allusion tant cette violence et les arguments qui la sou tendent rappellent la violence et les discours de haine des années 30, discours qui précédèrent et préparèrent l’acmé de 39-45.

Mais pourquoi fallut-il attendre ce sinistre janvier 2015 pour que les consciences de la majorité des faiseurs d’opinion s’éveillent ?

Pourtant des messages d’alerte furent clairement exprimés, notamment par le CRIF, mais pas seulement, dès les années 2000 et même avant, lorsque se lâchèrent les paroles antisémites, que se multiplièrent les agressions antisémites jusqu’aux assassinats de juifs parce qu’ils étaient juifs !

-Une majorité des victimes juives assassinées à Bron ces terribles jours de fin août 1944 étaient issue de l’émigration en provenance d’Allemagne et des pays de l’est fuyant pour les plus récemment émigrés le nazisme et pour les autres l’antisémitisme polonais et les pogroms de la Russie Tzariste.

Le sort actuel des émigrés fuyant les guerres intestines provoquées par l’Islamisme radical du Proche et du Moyen-Orient ou la dictature d’Assad ou encore en provenance d’Afrique ne doit-il pas aussi nous interpeller ?

Pourtant, prenons garde à ne pas s’en référer aux années trente souvent invoquées par certains au risque de comparaison hazardeuse et d’amalgame dont les effets pervers seraient mal maitrisés.

Le peu d’efficacité des leçons de l’histoire doit nous conduire à beaucoup de modestie, mais certainement pas à abandonner les chemins de la mémoire.

Si les commémorations, et celle d’aujourd’hui  en particulier, illustration de la barbarie nazie et évocation de ces victimes, petite part par leur nombre des millions de morts de la shoah, de la guerre avec sa cohorte de civils, de soldats, de résistants, nous aident à nous poser les bonnes questions et par bonheur à trouver quelques bonnes réponses, alors cette commémoration ne sera pas vaine et notre mission mémorielle sera bien accomplie !

Je vous remercie.

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