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Publié le 21 Février 2020

Crif - Observatoire de l’antisémitisme en ligne : Analyses des résultats

Pour la France et pour mesurer l’antisémitisme sur Internet, le Crif a développé un nouvel indicateur, celui de l’Observatoire de l’antisémitisme en ligne. Découvrez la synthèse de l’enquête de l’observatoire de l’antisémitisme en ligne.

Synthèse réalisée par Marc Knobel

Cet observatoire fait en partenariat avec Ipsos et voulu par Francis Kalifat, le président du Crif, a demandé plus de 600 heures de travail.

L’Observatoire porte sur l’ensemble de l’année 2019. Ainsi, en 2019, 51.816 contenus antisémites ont été identifiés. Il rapporte que les stéréotypes antisémites représentent la catégorie la plus présente sur Internet en 2019. 

Il est précisé que les quatre catégories d’antisémitisme étudiées correspondent à la classification adoptée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA*).

 

1)    Les expressions directes et explicites de haine des Juifs : 38% des contenus

- À savoir, les appels à la violence, au viol, à brûler ou tuer les Juifs en général, ou des personnes qualifiées comme juives.

- les appels à aider ou justifiant le meurtre ou la violence envers les Juifs au nom d’une idéologie radicale ou d’un extrémisme religieux.

- les appels à voler, vandaliser ou bruler des biens ou propriétés d’institutions juives ou de personnes qualifiées comme juives.

- les menaces envers les Juifs ou envers des personnes qualifiées comme juives.

- les insultes envers les Juifs ou envers des personnes qualifiées comme juives, ou faites simplement parce qu’elles sont juives.

- les discriminations : les appels à traiter différemment les Juifs en général ou des personnes simplement parce qu’elles sont juives.

- l’apologie d’attaques terroristes envers des Juifs, des institutions juives ou des biens appartenant à des Juifs.

 

2)    La haine des Juifs via la négation de la Shoah et l’apologie du nazisme : 13% des contenus

- la contestation des faits, de l’échelle, des mécanismes (ex : chambres à gaz) ou du caractère intentionnel du génocide juif par les nazis, des personnes qui les ont soutenus ou de leurs complices pendant la seconde guerre mondiale.

- des accusations envers les Juifs ou Israël d’avoir inventé ou d’exagérer la shoah.

- l’apologies du nazisme ou d'Adolf Hitler ; le soutien au projet nazi d’élimination des Juifs.

«Le déni de la Shoah et l’apologie du nazisme», forme de haine la mieux modérée sur les réseaux sociaux, compte tout de même pour 13 % des contenus. Une catégorie essentiellement composée d’accusations agressives d’instrumentalisation de la Shoah, avec l’expression «Shoah business» qui revient souvent

 

3)    La haine des Juifs via la haine d’Israël : 39% des contenus

- la diffamation de l’Etat d'Israël ou les critiques envers l’Etat d'Israël parce que c’est un état Juif (cependant, les critiques d'Israël qui pourraient être faites envers n’importe quel autre Etat ne sont pas considérées comme antisémites).

- les propos à deux poids deux mesure envers l’Etat d'Israël simplement parce que c’est un Etat Juif.

- l’utilisation de symboles et d’images associés à l’antisémitisme classique (dire que les Juifs ont assassiné Jésus ou l’accusation de meurtres rituels contre les juifs) pour caractériser Israël ou le sionisme.

- les allégations disant que l’Etat d'Israël est comparable au régime nazi ; les comparaisons entre la politique actuelle d'Israël avec celle les nazis.

 

4)    La haine des Juifs via l’utilisation de stéréotype ou de certaines allégations : 52% des contenus

- les allégations mensongères, déshumanisantes, diabolisantes ou les stéréotypes sur les Juifs

- les discours complotistes ciblant les Juifs, les allégations affirmant que les Juifs contrôlent les médias, l’économie, le gouvernement, ou le fait de les tenir pour responsables de divers maux

- la stigmatisation ou la qualification de personnes en tant que juifs, sous entendant que le fait qu’ils soient Juifs explique leurs propos ou comportements

- les accusations envers la diaspora juive d’être plus loyale à l’Etat d'Israël ou envers les juifs à travers le monde qu’envers leurs propres nations

 

Pour l’ensemble de l’année 2019, cet antisémitisme est surtout présent sur Twitter (63%), puis sur Facebook (17%).

 

La méthodologie utilisée par Ipsos et Game Changers portent sur le contenu librement accessible sur Internet, à un instant T. Il s’agit en l’occurrence de la « partie émergée de l’Iceberg », mais c’est aussi une partie qui a l’influence la plus forte sur le grand public. Ipsos et Game Changers rappellent que sur Internet, de nombreux contenus ne sont pas publics, tous les internautes pouvant y être confrontés. Il s’agit d’une partie importante des réseaux sociaux, de par le grand nombre de comptes et/ou de groupes privés, notamment sur Facebook. Et l’on peut aisément supposer que les contenus antisémites y sont surreprésentés.

Par ailleurs, la collecte des contenus antisémites en ligne ne peut prendre en compte que les éléments visibles, au moment du recueil. C’est ainsi que les contenus modérés pour antisémitisme ne sont pas pris en compte dans l’analyse. Cette enquête ne pourra donc jamais approcher d’une exhaustivité plus complète, pour les raisons invoquées ci-dessus par l’institut.

 

Comment évoluera l’Observatoire ?

Dans Le Figaro, Francis Kalifat, président du Crif annonce qu’à partir de la fin 2020, « on créera un indice de la haine antisémite sur le net. Dans un premier temps, nous nous concentrerons sur l’antisémitisme. Mais nous comptons étendre progressivement cet observatoire aux autres haines qui sévissent sur les réseaux sociaux et qui gangrènent la société: l’homophobie, le racisme, les propos antimusulmans ou antichrétiens. »

 

Marc Knobel