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Publié le 14 Décembre 2015

Jean d’Ormesson aux Amis du CRIF : « Je ne crois pas vraiment que la France soit en déclin ou pire en décadence»

L’Académicien préconise de ne pas succomber aux passions intestines ni aux débats qui écrasent et font perdre le sens commun.
 
L’écrivain et académicien a clôturé l’année 2015 des Amis du CRIF dans un échange jubilatoire avec Franz-Olivier Giesbert. A 90 ans d’Ormesson cet « Honnête homme du 21ème siècle » a tous les traits de l’esprit propre à la France, il porte en lui un idéal d’humanité. Il pense avec Aragon que « c’est une chose étrange à la fin que le monde » et conclut avec lui « malgré tout, que cette vie fut belle ».
 
Il pourrait emprunter à Aragon toujours « c’est si peu dire que je t’aime » car toute son existence s’est tournée vers l’art d’écrire et de conter. En français, pour le français.
 
C’est en Allemagne pourtant que Jean d’Ormesson, fils de diplomate, a passé les premières années de sa vie, alors qu’un certain Adolf Hitler y purgeait une peine de prison pour tentative de putsch. Son père dit-il a vu monter le nazisme « avec horreur ». Rentré en France, en 1940 Pétain le nomme à la tête de la Croix Rouge le 31 juillet, il en démissionne le 2 août. Et d’Ormesson d’ajouter avec un amusement à peine feint : « Mitterrand a mis trois ans à comprendre…Mon père ; une journée ». Quand Franz-Olivier Giesbert lui adresse cette question qu’on pose toujours à ceux qui ont la mémoire du siècle « est-ce que c’était mieux avant ? », il répond que le monde a toujours été sinistre, qu’il est perclus d’horreurs, « au premier rang, la Shoah ». Il ajoute que la tragédie du monde lui est apparue très tôt, précisément durant l’enfance et l’adolescence.
 
Ce monde tragique est-il une entrave à sa foi ? Lui-même l’ignore. Il sait simplement qu’il ne l’a pas, mais qu’il « a l’espérance » d’un catholique. L’espérance, écrivait Péguy, «  est une petite fille de rien du tout », mais si « la foi ne voit que ce qui est » l’espérance « voit ce qui sera ». Et l’éternité ? Oui elle existe, affirme t-il car « quand on est mort c’est pour longtemps ! ». 
 
L’humour bien sur, jalonne souvent ses interventions. C’est aussi un trait de caractère de l’«Honnête homme», de ne pas succomber aux passions intestines ni aux débats qui écrasent et font perdre le sens commun. Sa France n’est pas née en 1968… ni en 1793 mais au moins en 1539 lorsque l’Ordonnance  de Villers-Cotterêts impose le français comme langue exclusive.
 
Les lanceurs d’alerte le laissent plutôt indifférent ; il ne croit pas vraiment que la France soit en déclin ou pire en décadence. L’influence de la France s’est étiolée avec le temps, à mesure que l’épicentre du monde s’est déplacé de l’Europe vers d’autres espaces, mais « le salut de la France c’est d’être européenne ». 75 ans de paix relative sur le continent européen n’ont pas empêché la montée des nationalismes. Le recul de l’idée de nation en a-t-il été le catalyseur ? La peur de la vitesse de transition d’un monde à l’autre est peut être aussi un élément d’explication. L’académicien sait que « c’est un passage difficile, comme tous les passages en histoire ».
 
Le combat actuel doit se focaliser sur le terrorisme, plus que sur une civilisation car affirme t-il « le terrorisme se sert de l’Islam. L’Islam n’est pas responsable du terrorisme ». Il convient pourtant qu’il est difficile de ne pas voir dans les objectifs de l’EI une revanche des croisades. Y a-t-il eu un relâchement en Occident ? Philosophiquement certainement, pour Jean d’Ormesson les philosophes sont aujourd’hui des êtres essentiellement… télévisuels. Ou quand les structures sont plus fortes que les idées…
 
Alors quelle attitude adopter puisqu’il faut bien vivre en attendant l’éternité ?
 
« Il faut être aussi heureux que possible en ce monde où il est difficile d’être heureux tout seul. Mais sans ce que soit une recherche permanente car c’est le meilleur moyen de ne pas trouver son bonheur.»
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