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Publié le 23 Février 2016

La Commission pour les relations avec les Musulmans du Crif a reçu Monsieur El Alaoui Talibi, aumônier national des prisons

Il est également trésorier du bureau du CFCM.

Par Jean Corcos, président délégué de la commission pour les relations avec les Musulmans du Crif
 
Nous avons eu le plaisir de recevoir le 28 janvier Monsieur Moulay El Hassan El Alaoui Talibi, aumônier national musulman des prisons. Notre invité est également trésorier du bureau du CFCM.
 
Natif de Marrakech au Maroc, il est venu faire ses études supérieurs en France, et il a exercé le métier d'enseignant en mathématiques pendant 25 ans. Il est devenu aumônier pénitentiaire à la fin des années 90.
Il nous a d'abord fait un tableau d'ensemble des 194 établissements pénitentiaires. Il convient de distinguer les maisons d'arrêt, où sont incarcérés les détenus avant jugement ou condamnés à des peines légères ; les centres de détention, pour les condamnés à des peines plus lourdes ; et les maisons centrales qui sont le plus sécurisés, car elles abritent les détenus les plus difficiles. La surpopulation affecte surtout les maisons d'arrêt.
 
Sur le pourcentage de détenus "d'origine musulmane" (car parmi eux, beaucoup ne sont pas pratiquants au départ), il serait de l'ordre de 70% en région parisienne, ceci étant lié à la condition sociale de la majorité des délinquants emprisonnés. Le "spectre" des délits est très large, d'après les statistiques disponibles : vol simple 7,5%, escroquerie 7,8%, violence volontaire 25,7%, etc. Le trafic de stupéfiants concerne environ 14% des détenus, et les homicides volontaires 5%.
 
Le profil scolaire de la population incarcérée reste inférieur à la moyenne nationale, avec moins de 5% du niveau baccalauréat. 
 
Le rôle des aumôniers est important, car ils assurent l'évaluation des détenus, avec des médecins et psychologues. En ce qui concerne les détenus musulmans, il y a une action particulière en ce qui concerne : le respect de la nourriture hallal ; l'envoi de colis pour les fêtes comme l'Aïd ; l'accompagnement spirituel pour la prière du vendredi, dans le cadre de cercles d'études ou des rencontres individuelles.
 
Les aumôniers musulmans reste en nombre trop réduit par rapport à la population carcérale, car ils ne sont qu'environ 200. L'Etat avait programmé l'embauche pour 60 postes supplémentaires, mais cela est resté sans effet en raison du nombre de défections : en effet, il s'agit d'une profession "hors statut" : pas de vrais salaires, mais des indemnités qui ne dépassent pas 780 euros par mois ; pas de cotisation pour la retraite, etc. Il y a donc à la fois une dispersion géographique avec la visite de prisons trop nombreuses, ce qui nuit au suivi personnalisé, et un manque de continuité par démissions. Il faut aussi retenir que cette situation non gratifiante des aumôniers concerne à la fois ceux des hôpitaux et des prisons, mais pas le cas des aumôniers militaires, qui ont le statut d'officiers.
 
En ce qui concerne la radicalisation, notre invité a insisté sur la complexité du processus, qui implique aussi des influences extérieures aux prisons. Souvent, le "basculement" est lié à l'influence de milieux de la pègre, qui essaient de récupérer les prisonniers, la religion n'étant qu'un prétexte. D'une manière générale, les détenus sont souvent soumis à une situation "d'échec répétitif" si les prisonniers sont inactifs en prison et s'ils ne reçoivent pas de formation - point souligné également dans le livre "L'islam en prison" de Mohamed Loueslati.
 
En conclusion, la seule solution est d'offrir aux détenus un "projet de vie", sinon on aura pour eux un "projet de mort".
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