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Publié le 20 Octobre 2016

#Monde - Les suppôts du régime de Bachar al-Assad en Syrie, le Hezbollah libanais et l’Iran, par Marc Knobel

L’Iran et le Hezbollah soutiennent férocement Bachar al-Assad.

"Cessons de décrire les chefs de l’Iran comme des politiciens rationnels..."

Par Marc Knobel, Directeur des Etudes au Crif
 
Alep est à l’agonie. Les bombardements aériens intensifs menés par Moscou et le régime de Damas sur les quartiers orientaux d’Alep sont d’une férocité absolue. Ce binôme ne doit pourtant pas occulter le soutien apporté par Téhéran, les Pasdarans (les « Gardiens de la Révolution ») ainsi que les milices chiites du Hezbollah libanais, forces sans lesquelles une offensive terrestre de longue haleine ne pourra être menée. En alliance avec la Russie, le régime chiite-islamique conduit une stratégie de longue haleine. Explication.
 
Le soutien féroce du Hezbollah libanais
 
Le régime d'Assad compte sur ses chers amis, les milices féroces du Hezbollah libanais, financées et armées par l'Iran. Les terroristes du Hezbollah sont les vrais supplétifs du régime, ils peuvent poursuivre leur œuvre de mort. Semer la mort, ils connaissent, ils savent (trop bien) faire, au Liban, comme ailleurs.
 
Supplétifs du régime ? Pourquoi ? 
 
Dans un discours prononcé en juillet 2012, Hassan Nasrallah, le féroce secrétaire général du Hezbollah, le mouvement politique chiite libanais, a réaffirmé son soutien à Bachar el-Assad, peu de temps après l'attentat qui a frappé le cœur du régime à Damas. «La vraie Syrie est celle de Bachar al-Assad, celle des martyrs, celle de Assef Shawkat, Daoud Rajha et Hassan Turkmani (les hauts responsables tués dans l'attentat, NDLR)», a-t-il déclaré. Didier Leroy, chercheur à l'École royale militaire de Belgique, assistant à l'Université libre de Bruxelles et auteur de Hezbollah, la résilience islamique au Liban (L'Harmattan), analyse pour Le Figaro du 24 juillet 2012, pourquoi le «Parti de Dieu» libanais «n'a pas intérêt à ce que les choses changent» en Syrie. Selon Didier Leroy, le soutien du Hezbollah vis-à-vis du régime de Bachar el-Assad est de quatre facteurs :
 
-Le premier est géostratégique: quand on regarde une carte du Liban, précise le géopolitologue, on se rend compte qu'il partage une grande partie de sa frontière avec la Syrie. Le Hezbollah, lui, est tourné vers le front sud. Son combat est orienté contre Israël. En étant en conflit avec Israël, il a tout intérêt à ce que les choses soient stables sur l'autre partie de la frontière. 
 
-Le deuxième facteur est politique, selon lui : la tutelle syrienne au Liban a été très forte depuis la fin des années 1970, et est toujours très influente depuis le retrait effectif du pays (en avril 2005, NDLR). La plupart des leaders actuels, aux postes clés, ont été nommés soit sous la tutelle syrienne effective, soit après la tutelle, mais avec l'aval du régime syrien. 
 
- Le troisième facteur est militaire ou logistique, détaille le chercheur: les armes de la branche armée du Hezbollah sont d'origine iranienne mais transitent par Damas. Hassan Nasrallah a même précisé dans son discours que certaines armes étaient de manufacture syrienne. 
 
- Enfin, le quatrième facteur de ce soutien est religieux: Hassan Nasrallah et Bachar al-Assad sont deux acteurs qui ont joué la carte des minorités dans la région. Ils peuvent être vus comme un «rempart» contre l'islamisme sunnite. Au final, le Hezbollah est plus que satisfait de sa relation avec le régime syrien. Il n'a pas intérêt à ce que les choses changent.
 
L’Iran soutient politiquement, logistiquement et militairement Bachar al-Assad 
 
Quant au régime des Mollahs iraniens -dont on prétend si bêtement en Occident qu'il serait de plus en plus ouvert politiquement- il soutient politiquement, logistiquement et militairement son allié, l'alaouite Assad. C'est d'un intérêt stratégique pour l'Iran, qui cherche à renforcer son emprise sur la région. Les Iraniens savent ce qu'ils font. Leur but? Déstabiliser toute cette région. C'est ainsi qu'ils menacent les grandes puissances sunnites du Proche et Moyen-Orient. Car cette guerre -qui est aussi une guerre de religion- permet aux Iraniens de marquer des points et de s'implanter durablement. L'Iran, l'ennemi des sunnites, parachève ainsi son (autre) œuvre de mort.
 
Depuis Ali Larijani, président de l'Assemblée consultative islamique d'Iran depuis 2008, au président Hassan Rouhani en passant par le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale, Ali Shamkhani, ils assurent tous un soutien sans faille de Téhéran au régime de Bachar al-Assad. "La République islamique d'Iran continuera à aider la Syrie dans sa lutte contre le terrorisme et l'instauration de la sécurité dans la région", a déclaré le président iranien, insistant sur la nécessité de respecter "l'intégrité des frontières des pays de la région y compris de la Syrie". Même le conseiller du Guide suprême Ali Khamenei, Ali Akbar Velayati assure que l'Iran apporterait un soutien continu à la Syrie "jusqu'à la victoire finale". "Nous soutenons fortement le gouvernement (syrien) et Bachar al-Assad lui-même", a-t-il tenu à préciser (France Info, 3 octobre 2016).
 
Jean-Sylvestre Mongrenier, Chercheur à l’Institut Français de Géopolitique et à l’Institut Thomas More et coauteur de Géopolitique de la Russie explique cette stratégie (Challenges, 4 octobre 2016) : « Cessons de décrire les chefs de l’Iran comme des politiciens rationnels, en quête d’avantages matériels, et de croire que le conflit en cours serait soluble dans des marchandages d’intérêts. Au plan historique et dans sa substance même, le régime est fondé sur l’opposition à l’Occident. La rationalité dont les dirigeants iraniens font preuve ne relève pas de la Raison des Lumières, mais de la rationalité instrumentale, c’est-à-dire de la capacité à ordonner les moyens aux fins. Ces hommes ont leur propre échelle de référence, sont déterminés à poursuivre leurs objectifs de puissance et ils éprouvent le sentiment que le temps, inexorablement, joue pour eux. Plutôt que de s’extasier devant l’ancienneté de la civilisation perse et de vanter ses beautés touristiques, non sans arrière-pensées sur la profitabilité du marché iranien, il est urgent de comprendre les ressorts profonds du régime et ses responsabilités dans le drame humain et géopolitique de la Syrie… »
Dans ce contexte géopolitique, l’Iran et le Hezbollah sont bien les suppôts criminels du régime de Bachar al-Assad.
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