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Publié le 30 Août 2016

#Opinion - L'islam de France passera par les femmes! Par Fadila Mehal

Beaucoup s'interrogent sur l'organisation de l'islam de France.

Il est certain que la réussite de ce nouvel aggiornamento doit nécessairement intégrer la dimension féminine, voire féministe

Par Fadila Mehal, Conseillère de Paris (UDI-Modem), membre de l'observatoire parisien de la laïcité et presidente de "La république ensemble", publié dans Marianne le 26 août 2016
 
Dans la torpeur estivale, la polémique sur le burkini, hyper-médiatisée par les réseaux sociaux et les surenchères politiques, en dit long sur la société française et sur les religions en général, notamment dès qu'il s'agit des femmes. Concernant l'islam, qui compte plus de 5 millions de croyants en France, c'est encore plus vrai car si les femmes restent invisibles dans la sphère de la représentation religieuse, elles sont devenues malgré elles les marqueurs les plus visibles et les plus symboliques de la religiosité musulmane dans l'espace public. Pour beaucoup de musulmans, c'est par elles que passent désormais les enjeux fondateurs tels que : la transmission, la morale, les valeurs, l'honneur ou la pudeur.
 
Dans ce contexte codifié et étoilement surveillé, le dévoilement de leur corps s'apparente à un blasphème, pire, à une ligne jaune infranchissable. Chaque millimètre de leur nudité est évalué à l'aune d'une pureté supposée qui doit échapper au regard (toujours concupiscent) de l'homme. Et pourtant des musulmans en terre d'islam ont bravé cet interdit. Le père de l'indépendance tunisienne Habib Bourguiba va, dès 1956, promulguer le code du statut personnel et s'appuyer sur l'émancipation des femmes pour revitaliser la société tunisienne toute entière. Son premier fait d'arme, interdire le foulard dans l'espace public. Quarante ans plus tôt, le Turc Mustafa Kemal Atatürk, inspiré par la révolution française, va instaurer en 1922 la laïcité et donnera avant la France, pays des droits de l'homme, le droit de vote aux femmes. Deux exemples qui montrent à l'évidence que d'illustres leaders politiques musulmans, contre toute attente, dans un passé oublié, ont été capables malgré le poids du religieux de faire le choix de la raison, du progrès et des droits de l'homme et... des femmes. Ces deux révolutions sociétales, en Tunisie et en Turquie, se sont faites d'abord au bénéfice des femmes, même si elle furent pensées par des hommes. Quelles leçons en tirer aujourd'hui ?
 
En France, alors que beaucoup s'interrogent sur l'organisation de l'islam de France, il est certain que la réussite de ce nouvel aggiornamento doit nécessairement intégrer la dimension féminine (qui représente somme toute la moitié de la communauté des croyants), voire féministe. Organiser l'islam de France, c'est être attentif à la place qui sera donnée aux musulmanes de France, dans toute leur diversité et quels que soient leur niveau de croyance et de pratiques. Ainsi, la présence ou l'absence des femmes dans la future organisation de la fondation des œuvres de l'islam sera déterminante et sera un indicateur très révélateur de la capacité de l'islam de France de se "laïciser" et à trouver un compromis fécond entre la modernité et la foi. Le droit des femmes à disposer de leur corps, leur statut personnel, leurs droits sociaux en seront des marqueurs essentiels. Ainsi il ne sera plus accepté que des femmes d'engagement telles Mesdames Betoule Fekkar Lalbiotte ou Dounia Bouzar aient été obligées de démissionner des instances représentatives de l'islam pour que leurs voix de musulmanes soient enfin entendues... Lire l'intégralité.