Lu dans la presse
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Publié le 19 Mars 2021

France - Le projet de musée-mémorial du terrorisme à Paris commence à prendre forme

Cette structure doit ouvrir ses portes en 2027. La partie mémorial rendra hommage à toutes les victimes françaises depuis 1974, date de l’attentat du Drugstore Publicis, à Paris.

Publié le 11 mars dans Le Monde

Alors qu’Emmanuel Macron et plusieurs membres du gouvernement devaient participer, jeudi 11 mars, à la deuxième Journée nationale d’hommage aux victimes du terrorisme, le projet de musée-mémorial du terrorisme, annoncé par le président en 2018, commence à prendre forme. Une étape importante a été franchie, le 1er février, avec la constitution d’un groupement d’intérêt public, dont la première réunion s’est tenue le 26 février.

L’ouvrage, qui doit ouvrir ses portes en 2027, selon l’historien Henry Rousso, chargé, en 2019 par Edouard Phlilippe, d’une mission de préfiguration, se divisera en deux parties distinctes. Une partie mémorial rendra hommage à toutes les victimes françaises du terrorisme depuis 1974, date de l’attentat du Drugstore Publicis, à Paris, jusqu’à nos jours, qu’elles soient mortes sur le territoire national ou à l’étranger. Ce mémorial mettra aussi en avant la capacité de « résilience et de résistance » de la société française, selon son maître d’œuvre.

La deuxième partie du bâtiment abritera un musée : « C’est là que se situe l’originalité du projet français », précise une source à l’Elysée. Trois musées consacrés au terrorisme existent de par le monde : le Mémorial du 11-Septembre (New York), le Mémorial national d’Oklahoma City, théâtre d’un attentat meurtrier de l’ultradroite en 1995, et le Centre du 22-Juillet à Oslo, en hommage aux victimes de la tuerie d’Utoya, en 2011. Très prochainement, le Centre-Mémorial des victimes du terrorisme doit ouvrir à Vitoria-Gasteiz, au Pays basque espagnol.

Le lieu abritant l’institution, qui sera choisi d’ici à 2022, n’est pas encore connu, mais il se situera à Paris ou dans le Grand-Paris. Il ne sera pas lié à un attentat en particulier. Le choix d’un lieu peut se révéler un processus complexe et controversé en raison de l’opposition de riverains.

Ecueil de la représentation

Pour Henry Rousso, qui définit le terrorisme comme « une violence de guerre en temps de paix », le musée visera à « essayer de comprendre, de penser le phénomène du terrorisme pour le mettre à distance et éviter l’effet de sidération que provoque à chaque fois un attentat ». « Il y sera aussi bien question des attentats anarchistes, nationalistes, tiers-mondistes indépendantistes, politiques que des récents attentats djihadistes », précisait récemment l’historien dans un entretien avec l’Agence France-Presse.

La coexistence des exigences d’hommage aux victimes et de pédagogie historique risque de rendre la tâche particulièrement délicate. Les promoteurs du projet français entendent « exclure toute forme d’héroïsation » des auteurs et commanditaires d’attentats. Mais jusqu’où aller dans la compréhension sans tomber dans ce que les associations de victimes comprennent parfois comme une justification, voire une forme d’apologie ? Comment représenter les auteurs alors que certains, responsables politiques ou même médias, refusent tout ce qui peut leur faire de la publicité ?

Pour éviter cet écueil, le musée accordera aussi une place importante aux victimes, aux survivants, aux blessés physiques et psychiques, aux primo-intervenants, ainsi qu’aux aidants de première ligne. Outre un conseil scientifique et culturel, le futur musée-mémorial est doté d’un observatoire d’orientation, présidé par François Molins, l’ancien procureur de la République de Paris au moment de la vague des attentats de 2015-2017. Cette instance, où siègent également Françoise Rudetzki, fondatrice de SOS Attentats, et l’urgentiste Patrick Pelloux, ancien collaborateur de Charlie Hebdo, regroupe la douzaine d’associations de victimes en France.