Lu dans la presse
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Publié le 27 Janvier 2020

75 ans - 75 ans après la libération d'Auschwitz, l'avertissement des survivants

De nombreux chefs d'État et de gouvernement, dont Édouard Philippe, seront présents ce lundi sur le site de l'ancien camp nazi.

Publié le 27 janvier dans Le Figaro

«Nous voulons que la prochaine génération sache ce que nous avons vécu, et que cela ne se reproduise plus jamais», a déclaré dimanche 26 janvier aux journalistes David Marks, 93 ans, survivant d'Auschwitz, la voix brisée d'émotion. Trente-cinq membres de sa famille proche et lointaine de juifs roumains ont été tués à Auschwitz, le plus grand des camps de la mort mis en place par l'Allemagne nazie, devenu le symbole des six millions de Juifs européens tués dans l'Holocauste.

Soixante-quinze ans après la libération d'Auschwitz, des survivants de l'Holocauste, toujours moins nombreux, se réunissent ce lundi 27 janvier dans l'ancien camp pour honorer ces plus de 1,1 million de victimes, principalement des juifs, au milieu de nouvelles inquiétudes face à l'antisémitisme resurgissant. Au moins 47 dirigeants mondiaux ou diplomates de haut rang, dont 26 présidents, quatre rois (d’Espagne, des Pays-Bas, de Belgique et du Luxembourg) et quatre premiers ministres, seront présents pour l’événement.

Venus du monde entier, plus de 200 survivants sont attendus sur le site de l'ancien camp nazi d'Auschwitz, situé dans le sud de la Pologne, pour partager leurs témoignages entendus comme un avertissement grave après une récente vague d'attaques antisémites des deux côtés de l'Atlantique.

Le témoignage des survivants

Des têtes couronnées, des chefs d'Etat et de gouvernement de près de 60 pays assisteront à la cérémonie, en l'absence des leaders des grandes puissances qui se sont rendus à Israël, qui a marqué ce même événement jeudi 23 janvier à Jérusalem avec un forum sur l'Holocauste. Étaient notamment présents le vice-président américain Mike Pence, le président français Emmanuel Macron et le président russe Vladimir Poutine. Aucun d'eux ne viendra à Auschwitz.

Les organisateurs de l'événement à Auschwitz ont insisté sur le fait que la cérémonie commémorative de ce lundi doit se concentrer sur ce que les survivants ont à dire plutôt que sur les querelles politiques qui ont entaché les préparatifs de l'anniversaire. «Nous observons la poussée de l'antisémitisme alors que nous ne voulons pas que leur passé (de survivants) soit l'avenir de leurs enfants, ou l'avenir de leurs petits-enfants», a déclaré dimanche à l'AFP Ronald Lauder, chef du Congrès juif mondial, arrivé sur le site de l'ancien camp d'Auschwitz, aujourd'hui transformé en un mémorial et musée géré par la Pologne. «Il s'agit de survivants, il ne s'agit pas de politique», a-t-il insisté.

Pas question de politique donc durant cette commémoration à Auschwitz, ce que craignaient les organisateurs. Le président polonais Andrzej Duda doit prononcer un discours ce lundi 27 janvier à Auschwitz.

Si le monde a appris toute l'étendue des horreurs seulement après l'entrée de l'Armée rouge dans le camp le 27 janvier 1945, il semblerait que les Alliés disposaient bien avant d'informations détaillées sur le génocide des Juifs. En décembre 1942, le gouvernement polonais en exil à Londres a transmis aux Alliés un document intitulé «L'extermination massive des Juifs dans la Pologne occupée par l'Allemagne». Ce document, accueilli avec méfiance, comprenait des comptes-rendus détaillés sur l'Holocauste dont les membres de la résistance polonaise avaient été témoins.

Considérés comme exagérés ou faisant partie de la propagande de guerre polonaise, «nombre de ces rapports n'ont simplement pas été crus» par les Alliés, a expliqué à l'AFP le professeur Norman Davies, historien britannique d'Oxford. Malgré les «fortes demandes» de la résistance polonaise et juive pour que les Alliés bombardent les voies ferrées menant à Auschwitz et d'autres camps de la mort, «l'attitude des militaires consistait à se concentrer sur des cibles militaires et non sur des questions civiles», a indiqué M. Davies. Bien que les avions de guerre britanniques aient survolé le camp de la mort, aucun ordre de bombardement n'a été donné. «Ce fut l'un des plus grands crimes commis par ceux qui sont restés indifférents parce qu'ils (les Alliés) auraient pu faire quelque chose mais délibérément ils ne l'ont pas fait», a déclaré à l'AFP David Lenga, 93 ans, survivant d'Auschwitz.