Lu dans la presse
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Publié le 18 Février 2020

France/Communautarisme - "Expliquez-nous": communautarisme, où en est-on en France?

Emmanuel Macron est à Mulhouse ce mardi pour parler de lutte contre le communautarisme. Mais le communautarisme, en fait, qu’est-ce que c’est ?

Publié le 18 février dans BFM TV

C’est un terme très polémique en France, le communautarisme. Sa signification est très différente chez nous par rapport à l’étranger. Aux Etats-Unis, le communautarisme est un terme très positif. Là-bas, plus les cultures différentes co-existent, mieux c’est. Les communautés étant considérées de l’autre côté de l’Atlantique comme le meilleur rempart contre l’individualisme et contre le pouvoir de l’Etat.

En France, le communautarisme a une connotation très péjorative. C’est un terme qui est apparu, il y a une quinzaine d’années dans le discours politique. Un terme négatif parce qu’en France, pour des raisons historiques, c’est l’Etat qui fédère, qui crée l’unité. Le communautarisme est donc perçu comme une menace pour la République. Et c’est un terme qui vise en France aujourd’hui particulièrement la communauté musulmane. Laurent Nuñez, le secrétaire d’Etat à la sécurité, explique que le communautariste, c’est faire passer la loi de Dieu avant la loi de la République et le vivre ensemble. Finalement c’est un terme tellement polémique qu’Emmanuel Macron préfère parler de séparatisme islamiste, c’est-à-dire une volonté de se séparer des lois de la République.

Ce qui inquiète le monde politique, ce sont d’abord les listes qualifiées de "communautaires". Avec un parti politique en ligne de mire : l’union des démocrates musulmans français qui entend présenter une liste dans une cinquantaine de villes aux prochaines municipales. Ce parti a réuni 0.13% de votants aux dernières européennes, c’est à dire 28000 électeurs, mais il a fait des scores, localement plus importants, comme 6% à Maubeuge ou 5% à la Courneuve ou Villetaneuse. 

Est-ce qu’on peut parler, dans certaines communes ou certains quartier d’un engouement pour un vote communautaire ? Pas pour le moment. Car ces scores locaux sont surtout dus à un taux d’abstention très fort dans certains bureaux. Par exemple au bureau 21 de Chalon-sur-Saône, l’Union des démocrates musulmans français obtient 20 % des suffrages… avec seulement cinq voix. Sur 443 électeurs inscrits, seuls vingt-cinq se sont déplacés et cinq d’entre eux ont voté pour les démocrates musulmans. Par ailleurs, c’est un parti qui se déclare laïque, non-confessionnel et républicain. Et qui s’insurge : il y a bien un parti chrétien-démocrate en France, pourquoi pas une union des démocrates musulmans ?

Pourtant le premier maire considéré comme communautariste en France pourrait être élu à Garges-lès-Gonesse en mars prochain. Il s’appelle Samy Debah, candidat sans étiquette aux municipales. C’est lui qui a fondé le CCIF, le comité contre l’islamophobie en France. C’est un professeur d’histoire géo dans un lycée public, qui est présenté comme "symbole de l’islam politique" par ses opposants. 

C’est l’échec de la République se désole même son opposant socialiste aux municipales. On ne connaît pour le moment ni son programme, ni la composition de sa liste. Aux dernières législatives, il a obtenu 55% des voix dans la ville. Il faut dire qu’à Garges-lès-Gonesse, on dénombre sept mosquées, pour deux églises et une synagogue. 

Des enclaves dans les quartiers

L’autre inquiétude relayée par certains politiques, la multiplication des écoles hors contrats confessionnelles dans certains quartiers. Il existe actuellement 75 établissements hors contrats de confession musulmane en France. Hors contrat veut dire qu’ils ne reçoivent pas un sou de l’Etat et qu’ils disposent d’une certaine liberté dans les programmes scolaires. Ces établissements ont accueilli 8000 enfants à la rentrée 2019, d’après les chiffres que m’a transmis lundi l’Education nationale. 8000 enfants scolarisés, c’est 66% de plus qu’à la rentrée 2016 où seuls 4800 enfants étaient scolarisés en hors contrat musulman.

Mais il faut noter deux choses, les écoles hors contrats se multiplient en France, qu’elles soient Montessori, pour enfant précoce, ou encore catholique et musulmanes. Deuxième chose, pour devenir une école sous contrat, vous devez d’abord passer par du hors contrat pendant plusieurs années, ces écoles peuvent donc être vouée à passer des contrats avec l’Etat comme les écoles privées catholiques. Par ailleurs, quatre écoles musulmanes hors contrat ont été fermées depuis le début du quinquennat dans le cadre du plan de lutte contre la radicalisation.

De plus en plus de familles font aussi l’école à la maison. Les derniers chiffres remontent à 2017 : 30.000 enfants étaient instruits chez eux contre 21.000 en 2015. Mais il est impossible de savoir qui sont ces enfants et si des raisons religieuses sont à l’origine de ce choix d’instruire ses enfants à la maison. Reste que 46.000 enfants dans le hors contrat plus 30.000 qui sont instruit à la maison, ça reste une goutte d’eau, qui grossit certes, mais une goutte d’eau quand même, comparé aux 12 millions d’élèves de France.

Enfin le communautarisme, c’est aussi des enclaves qui se multiplient dans les quartiers. C’est d’ailleurs ce que dénonce François Pupponi, ancien maire socialiste de Sarcelles, dans son dernier livre, il raconte son expérience : "Ils ont ouvert des mosquées différentes, des écoles coraniques, des associations de soutiens scolaires. Ils ont tenté de renverser la direction de la maison de la jeunesse. Ce sont des loups déguisés en agneaux. Leur objectif est simple : prendre le pouvoir", écrit-il.

Difficile de dire combien de quartiers sont concernés par ce séparatisme islamique. En novembre dernier, Laurent Nunez annonçait que 130 débits de boissons, 12 lieux de culte et 9 associations et établissements culturels avaient été fermés dans une quinzaine de quartiers de France. Bruno Retailleau, explique de son côté que "la DGSI aurait dénombré 150 de ces enclaves" islamique, en France.