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Publié le 1 Mars 2019

France - Qu'est-ce que la définition de l'antisémtisime de l'IHRA désormais endossée par la France ?

A l'occasion du 34ème Dîner du Crif, le 20 février dernier, le Président Emmanuel Macron a annoncé l'adoption par la France de la définition de l'antisémitisme de l'IHRA. Mais qu'elle est-elle vraiment ? La DILCRAH s'est penchée sur le sujet.

Article proposé et publié par la DILCRAH le 1er mars 2019

1/ D’où vient cette « définition » ?

La définition de travail a été produite et adoptée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’holocauste (IHRA). L’IHRA est une organisation intergouvernementale, fondée en 1998 et qui regroupe gouvernements et experts dans le but de renforcer et promouvoir l’enseignement de la Shoah, la recherche et la mémoire. Elle compte 31 membres, majoritairement des Etats membres de l’UE dont la France mais aussi les Etats-Unis, Israël et le Canada.

L’IHRA a adopté le 26 mai 2016 par consensus une définition « non contraignante », dite de travail, de l’antisémitisme. L’ensemble des membres, dont la France, a donc, de fait, donné un avis favorable à cette définition.

2/ De quoi s’agit-il ?

Au sens strict, la « définition » est extrêmement courte :

« L’antisémitisme est une certaine perception des juifs, pouvant s’exprimer par de la haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme sont dirigées contre des individus juifs ou non-juifs et/ou leurs biens, contre les institutions de la communauté juive et contre les institutions religieuses juives. »

Le document de l’IHRA se veut cependant un guide destiné à mieux identifier les incidents antisémites, dont il rappelle qu’il peut « être exprimé par le biais de discours, d’écrits, de formes visuelles et d’actions, et fait appel à des stéréotypes sinistres et des traits de caractère négatifs. », et prendre la forme de théories conspirationnistes.

Il précise également que « l’Etat d’Israël, perçu comme une collectivité juive, peut aussi être la cible de ces attaques. ».

La courte définition est donc complétée par une série d’exemples, destinés à l’« illustrer »  – et donc à permettre de mieux identifier les actes antisémites. Parmi ces exemples, sont notamment cités : « les mythes sur une conspiration mondiale juive », le négationnisme, sous toutes ses formes (y compris l’accusation faite contre les Juifs et/ou Israël d’exagérer l’holocauste ».

Parmi ces exemples, plusieurs sont en rapport avec l’Etat d’Israël. Attention cependant : les termes de sionisme et d’antisionisme ne figurent pas dans cette déclaration. Les exemples sont également formulés avec attention, afin de ne pas empiéter sur la liberté d’expression.

On peut citer notamment : la négation du droit à Israël d’exister (ex : « l’existence d’Israël est une entreprise raciste »), la comparaison avec le nazisme, l’usage de stéréotypes antisémites pour caractériser Israël, le fait de tenir les juifs de manière collective pour responsables des actions de l’Etat d’Israël…etc.

Le document précise bien, cependant que « les critiques à l’égard d’Israël comparables à celles exprimées à l’encontre d’autres pays ne peuvent être qualifiée d’antisémites ».

3/ A qui s’adresse la définition ? Quelles conséquences concrètes ?

Cette définition n’est pas « juridiquement contraignante », et n’a pas vocation à l’être. La loi réprime en effet d’ores et déjà les crimes et délits commis « à raison » de l’origine ou de la religion mais ne mentionne aucune d’entre elles. Elle ne créé évidemment pas de nouveau délit, et ne vise pas à « réprimer l’antisionisme ».

La définition de travail est donc destinée d’une part, à faire connaître et comprendre ce qu’est l’antisémitisme, d’autre part, à éclairer la caractérisation des faits et incidents antisémites. Elle vise donc notamment les milieux scolaires et universitaires : elle pourra donc, sans exclusive, être utilisée dans des contextes de formation, dans des lexiques, manuels, guides pour l’enseignant etc… Elle sera également utile pour les formations et les vademecum destinés aux forces de l’ordre et les magistrats. Cette définition pourra donc aider à mieux prouver les circonstances aggravantes des crimes et délits antisémites.

4/ « L’adoption de la définition »

 Le Parlement européen a pour sa part adopté une résolution (sans effet contraignant) le 1er  juin 2017 appelant les Etats membres de l’UE à adopter et appliquer la définition de l’antisémitisme de l’IHRA.

A ce stade, six Etats ont formellement adopté ou endossé la définition de l’IHRA au niveau national : Roumanie (mai 2017), Israël, Autriche (avril 2017), Bulgarie, Allemagne (septembre 2017), Royaume-Uni (décembre 2016).

Sur le plan national, le discours du Président de la République lors du dîner du Crif du 20 février 2019, s’inscrivant dans la continuité de son discours prononcé le 16 juillet 2017 lors de la commémoration de la rafle du Vel d’Hiv, a de fait constitué un « endossement de la définition » par la France.

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