Lu dans la presse
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Publié le 2 Novembre 2020

France - Qui sont les "Loups gris", ces nationalistes turcs qui s’affichent en France

Des membres de cette mouvance radicale ont récemment organisé des contre-manifestations pro-Turcs en réponse aux rassemblements arméniens. Des scènes aux allures d’expédition punitive. Le gouvernement va dissoudre mercredi les Loups Gris, mouvement ultranationaliste turc lors d'un Conseil des ministres.

Publié le 30 octobre dans Le Parisien

Ils ne disposent d'aucune existence officielle en France. Des nationalistes turcs revendiqués comme des « Loups gris » se sont signalés à Décines (Rhône) et à Vienne (Isère) mercredi soir, puis à Dijon (Côte-d'Or) jeudi, lors de défilés aux allures d'expédition punitive marqués, notamment, par des cris menaçants.

Née à la fin des années 1960 en Turquie, cette mouvance d'extrême-droite radicale, nationaliste et xénophobe resurgit en réaction au mouvement de soutien à l'Arménie, en conflit avec l'Azerbaïdjan. Mais ses actions spectaculaires dissimulent une influence pour le moment limitée.

« Les Loups gris représentent des réseaux, qui existent et qu'il ne faut pas sous-estimer, mais infiniment minoritaires, analyse Didier Billion, spécialiste de la Turquie et directeur adjoint de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). C'est vrai en France comme en Turquie. »

Dans les manifestations turques, il arrive de croiser ces militants radicaux qui arborent le signe du loup - pouce, majeur et auriculaire joints - en guise de ralliement. Sur les réseaux sociaux aussi, une émoticône de loup est généralement associée à leur présentation.

Il s'agit principalement de sympathisants sans véritable lien, loin de l'organisation paramilitaire qui a fait les heures de gloire du mouvement. Dans les années 1970, les « Loups gris », favorisés par le Parti d'action nationaliste (MHP) et liés à la mafia, ont notamment mené une série d'assassinats politiques.

Leur farouche opposition au communisme a, avec le temps, évolué vers une idéologie néofasciste et panturquiste, qui prône l'union des peuples turcophones. Ces dernières années, ils étaient considérés comme plutôt proches du pouvoir en place et de l'AKP, le parti néoconservateur du président Recep Tayyip Erdogan. Au point que certains les soupçonnent d'être liés aux services de renseignement turcs.

« Les Loups gris incarnent un courant idéologique et une sensibilité que partagent des Turcs et des Franco-Turcs, relève Didier Billion. La période actuelle, au cours de laquelle la communauté conservatrice est chauffée à blanc par déclarations d'Erdogan, leur permet sans doute d'avoir une certaine aura. Même s'ils sont très loin d'avoir la même capacité de mobilisation qu'autrefois. »

Pour l'heure, leurs actions en France ont mené dans leur sillage quelques dizaines, voire centaines de personnes. Et très peu de figures identifiées parviennent à émerger du mouvement. C'est peut-être le cas d'Ahmet Cetin, tout juste suivi par quelques milliers de personnes sur les réseaux sociaux.

« Que le gouvernement me donne une arme »

Installé à Bourg-en-Bresse (Ain), ce Franco-Turc de 23 ans, marié et père d'un enfant, se positionne volontiers en leader. « Que le gouvernement [turc] me donne une arme et 2 000 euros et je ferai ce qu'il y a à faire où que ce soit en France », s'était-il vanté dans une vidéo postée cet été.

Ces propos lui ont valu, depuis, de comparaître devant le tribunal correctionnel pour « incitation à la haine ». Le procureur de la République a requis une condamnation à six mois de prison avec sursis, pour un délibéré planifié début novembre.

Reste que l'audience du jeune homme n'est pas démesurée : la vidéo en question avait été visionnée près de 13 000 fois avant d'être supprimée. Loin, donc, des chiffres vertigineux que provoquent parfois les contenus viraux. Un signe, parmi d'autres, du cercle pour l'instant restreint de sympathisants des « Loups gris » en France.

 

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