Lu dans la presse
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Publié le 27 Décembre 2019

Sarah Halimi - Franz-Olivier Giesbert : Meurtre de Sarah Halimi, la honte du 19 décembre

En refusant de juger Kobili Traoré, l'auteur du meurtre antisémite de Sarah Halimi, la justice française a commis une faute. De quoi a-t-elle peur ?

Publié le 20 décembre dans Le Point

Il y a deux façons de rendre la justice : couché ou debout. Après avoir fait preuve d'une grande lâcheté pendant l'occupation nazie, la justice française a de temps en temps de grosses rechutes. Le 19 décembre, elle a commis une grande faute, et le mot est faible, en décidant que le jeune musulman Kobili Traoré, meurtrier de Sarah Halimi, une sexagénaire juive, ne serait pas jugé : parce qu'il aurait été sous l'empire du cannabis au moment du crime, la cour d'appel de Paris a conclu à l'abolition de son discernement pendant les faits et donc à son irresponsabilité pénale.

Circulez, il n'y a rien à voir. Mais de quoi la justice est-elle le nom quand elle absout sans autre forme de procès ? De quoi a-t-elle peur pour mettre un mouchoir sur un crime en évitant au coupable d'aller aux assises ? A-t-elle conscience qu'elle envoie un mauvais signal aux futurs assassins de juifs ? L'antisémitisme est en pleine recrudescence dans notre pays : avec 541 actes antisémites recensés, il a augmenté l'an dernier de 74 %, alors que les actes antimusulmans, beaucoup moins nombreux, tombaient de 121 à 100.

Ces dernières années, plusieurs juifs ont été tués par des musulmans parce qu'ils étaient juifs. C'est une réalité qu'il faut oser regarder en face et elle aurait dû troubler les magistrats. Mais non, ont-ils estimé, Kobili Traoré, grand consommateur de cannabis, était en proie, le pauvre chat, à une « bouffée délirante. »

Si cette décision fait jurisprudence, c'est toute la justice qui est à repenser. Il ne fallait pas juger Charles Manson, gourou satanique d'une « famille » droguée qui a tué l'actrice Sharon Tate, ainsi que trois de ses amis, à Los Angeles en 1968. Si on en avait eu l'occasion, il n'aurait pas non plus fallu juger Hitler qui, comme on le sait aujourd'hui, se faisait administrer toutes sortes de substances, de stéroïdes comme la Testoviron ou le Gyconorm.

Dans la nuit du 3 au 4 avril 2017, Kobili Traoré s'était introduit dans l'appartement de sa voisine, Sarah Halimi, au troisième étage d'un immeuble HLM de Belleville. Il a roué sa victime de coups en criant « Allah akbar » et en récitant des versets du Coran, avant de la jeter dans le vide. Quand un homme est capable de réciter des versets du Coran, son « discernement » est-il « aboli », est-il atteint d'une « bouffée délirante » ? S'agit-il du message qu'ont voulu nous envoyer les magistrats de la cour d'appel de Paris ?

Vous avez bien compris qu'après cette ignominie il est inutile de rechercher la justice. Sur sa porte, elle a laissé un écriteau : « Est partie en RTT. Reviendra peut-être après les fêtes. »

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