Tribune
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Publié le 15 Octobre 2012

« Y A BONJUIF ? »

Par Marc Knobel

 

Comme à l’époque des affiches coloniales sur lesquelles souriait un Africain qui amusait la galerie avec son expression fétiche teintée de clichés et de stéréotypes racistes: “Y A BON BANANIA” ?, on utilise en ce début de vingt et unième siècle un hashtag (1) sur le réseau de Twitter intitulé « UnBonJuif », particulièrement antisémite. En moins de 15 mots, des internautes - qui profitent de l’anonymat de l’Internet - se lâchent littéralement, s’abreuvant, s’excitant les uns et les autres, se surpassant dans la débilité,  la méchanceté et l’antisémitisme crasse.

Exemples (2) ?

« À B D E L ‏@AbdelDouble : #UnBonJuif < === Ce hashtag pue l'antisémitisme ! À moins que ce soit l'odeur du gaz. »

« Mamadou Lepen ^_^ @BlaackMajor #UnBonJuif doit être cuit à point. »

« @Usama_BenLadeen#UnBonJuif est un juif mort. »

 

Bref, ce hashtag est une poubelle et l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) a raison de s’indigner dans un communiqué de presse (14 octobre 2012) du «record de propos antisémites» suscité par lui. L’UEJF demande par ailleurs à rencontrer ses responsables en France pour évoquer la modération des messages. Car, le problème est bien là. Y-a-t-il une modération ? S’il y en avait une, ce hashtag aurait été modéré ou supprimé avant même que l’UEJF ne communique sur ce sujet. À twitter, on n’a peut-être pas le temps de s’occuper de ce genre de choses (sic), rappelons-le : le temps c’est de l’argent, non ?

 

C’est donc là qu’il faut être intraitable pour rappeler quelques principes. Comme le dit l’UEJF : « «Twitter France doit s’assurer que les messages qui véhiculent des propos haineux, racistes ou antisémites ne soient pas mis en avant ou accessibles à tous sur son réseau social». C’est la moindre des choses. Pourquoi ? Parce que nous estimons que les hébergeurs ou les grandes sociétés ne peuvent constamment se retrancher derrière l’argument de la stricte neutralité, ils doivent balayer ces sites.

 

Enfin, ceux qui se déchaînent sur les réseaux sociaux devraient être poursuivis par la justice. L’Internet n’est pas un monde de lois. Le droit s’y applique, comme nombre de règles commerciales et directives (3).

 

Et rappelons une fois encore ce message : quelle défaite de la démocratie se serait en effet de laisser les crétins, les extrémistes ou les prêcheurs de haine envahir et salir peu à peu les écrans de nos ordinateurs.

 

Notes :

1. Le hashtag, ou mot-clic, est un marqueur de métadonnées lié au domaine de l'informatique. Symbolisé par le signe typographique croisillon « # », il est particulièrement utilisé sur réseaux sociaux tels que Twitter, Tumblr ou Google+, selon Wikipédia.

2. Je remercie Jessica Chetboun de m’avoir adressé un point d’actu à ce sujet.

3. Voir à ce sujet : Marc Knobel, L’Internet de la haine. Racistes, antisémites, néonazis, intégristes, islamistes, terroristes et homophobes à l’assaut du Web, Paris, Berg International Éditeurs, 2012, 184 pages.

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