Tribune
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Publié le 16 Juillet 2014

Études du CRIF n°30 : « Antisémitisme / antisionisme. Mots, masques, sens, stratégie, acteurs, histoire », par Jacques Tarnéro

Introduction de Marc Knobel, Directeur des Études :

Dans le texte fort et très engagé que nous proposons pour ce trentième numéro des Études du CRIF, l’essayiste et documentariste Jacques Tarnero tente de décrypter les mots, les masques, les sens, la généalogie et les acteurs de l’antisémitisme contemporain, tels qu’ils sévissent en leurs multiples variantes. 

Mais l’auteur s’attarde sur l’antisionisme dont il dit qu’il semble paré, aux yeux de certains, de qualités acceptables, voire de vertus progressistes. Et de rappeler, par exemple, qu’à l’abri d’un discours antisioniste, Dieudonné M’bala M’bala a libéré une parole, l’a rendue acceptable sous couvert d’impertinence. De fait et malgré les innombrables tragédies qui ensanglantent notre monde et les terribles violences qui sont commises un peu partout, le sionisme, en tant qu’idéologie ou mouvement politique d’émancipation nationale du peuple juif prônant l’existence d’un centre spirituel, territorial ou étatique peuplé par les Juifs en terre d’Israël, est dénoncé, décrié, si ce n’est vomi. Il est même devenu un signifiant infamant, suscitant les foudres, la rage et la haine. Israël serait la quintessence du mal absolu et l’antisionisme fonctionnerait comme un aimant puissant, permettant à différents courants politiques de le détester collectivement. Rappelons ici qu’Israël est le seul État au monde dont le droit à l’existence n’est toujours pas accepté par certains membres des Nations unies.

Mais au fond, qu’est-ce que l’antisionisme ? Peut-on désapprouver, rejeter ou condamner la politique du ou des gouvernements d’Israël ? Bien évidemment, et l’on ne se prive pas de le faire, en Israël même. Mais l’antisionisme, ce n’est pas cela, ce n’est pas la critique d’une politique et des implantations. C’est la mise en cause de la légitimité de l’État d’Israël, de son droit à exister en tant qu’État du et pour le peuple juif, rappelle avec justesse Jacques Tarnero, qui propose une clarification de la définition des mots et des concepts avant de se livrer à une approche historique de l’antisionisme. La troisième partie du texte s’intéresse plus ouvertement à l’antisémitisme en France. L’auteur note que depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la relation aux Juifs et à Israël est passée par plusieurs phases : la compassion pour les victimes, la suspicion dès 1967, la réprobation à l’égard d’Israël lors de la première guerre du Liban (2001-2002), la condamnation et, pour certains, la nazification progressive d’Israël et sa délégitimation depuis l’an 2000. Il remarque cependant que l’actualité immédiate paraît marquer une pause dans cette mise à l’index d’Israël. En cause, selon lui, les violences commises par les islamistes qui donnent du monde arabe et musulman une image chaotique et agressive à côté de laquelle la démocratie israélienne paraît bien plus sympathique. Il s’inquiète cependant de la réémergence publique, en France, de l’ultra-droite. Jacques Tarnero s’attache ensuite à décrire ce qu’il nomme « l’arc d’hostilité » au « signe juif » antisémite ou antisioniste, se déclinant de l’extrême droite à l’extrême gauche, en passant par d’anciennes composantes religieuses. Minutieusement, il décrit chacune d’elles, à grand renfort d’exemples, de faits et de noms.

À la lecture de ce texte, certains de nos lecteurs pourraient ne pas être d’accord avec toute l’analyse de Jacques Tarnero. Il n’empêche que cette étude pose de grandes questions, parce qu’elle démonte les mécanismes, parce qu’elle donne à réfléchir sur cette prégnance de l’antisionisme/antisémitisme, parce qu’elle avertit aussi de ce que cette folie a de dévastateur. 

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