Tribune
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Publié le 26 Mai 2015

24 mai 2014: l'attentat au musée juif de Bruxelles

Ce 24 mai 2014, un homme, casquette vissée sur la tête, rejoint le Musée juif de Bruxelles.
 

Par Marc Knobel, Chercheur, Directeur des Etudes du CRIF
L'homme est de corpulence moyenne et athlétique, il porte une casquette de couleur sombre avec un logo clair sur la face avant du côté gauche. Il arbore également un vêtement de couleur bleue claire avec un logo clair à hauteur de la poitrine du côté gauche, un pantalon de couleur sombre et des chaussures également de couleur sombre avec des semelles claires. L'homme est en outre équipé d'un sac en bandoulière de couleur sombre avec un logo blanc de petite taille et d'un sac de sport également sombre avec logo clair. Le suspect fait alors usage d'une arme d'épaule avec crosse pliable de type Kalachnikov avant de prendre la fuite à pied dans la direction de la rue des Chandeliers puis de la rue Haute, dans le quartier des Marolles où il est perdu de vue.
La scène dure 90 secondes
Il est extrêmement calme, méthodique, assassinant froidement et quittant le musée le plus tranquillement possible, sans courir, sans même se presser. Un mode opératoire qui renvoie à Mohamed Merah, l'islamiste qui avait assassiné sept morts à Toulouse et Montauban, en mars 2012.
Le lendemain (dimanche 24 mai 2014), la porte-parole du parquet de Bruxelles confirme que l'attaque a été menée par un homme "probablement seul" et "bien préparé". Et, de sources proches de la police criminelle et de la Sureté de l'Etat, l'homme pourrait appartenir à la mouvance islamiste radicale...
Et les victimes de l'attaque ? Ce sont un couple de touristes israéliens, Emmanuel et Miriam Riva ; Dominique Sabrier, une bénévole française de 66 ans et le réceptionniste du musée, Alexandre Strens, 25 ans.
Un certain Mehdi Nemmouche
Six jours plus tard, un Français de 29 ans, Mehdi Nemmouche, qui était allé combattre en Syrie, est arrêté à Marseille, dans le sud de la France. Trouvé en possession d'armes similaires à celles visibles sur les caméras de surveillance du musée, il est extradé vers la Belgique fin juillet. Dans l'attente de son procès, dont la date n'a pas encore été fixée, Mehdi Nemmouche nie être l'auteur de la tuerie.
Que sait-on du parcours de Mehdi Nemmouche, jihadiste français ayant séjourné en Syrie dans les rangs de l'Etat islamique, arrêté en France et extradé le 29 juillet en Belgique pour le quadruple assassinat commis au Musée juif de Bruxelles le 24 mai ?
Le Monde a révélé, samedi 6 septembre 2014, qu'il aurait été l'un des geôliers des otages occidentaux détenus par l'organisation islamiste. Après cette publication, plusieurs médias, qui avaient jusque-là choisi de respecter la volonté des services secrets français de ne pas diffuser cette information, ont à leur tour apporté des éléments nouveaux.
Né de père inconnu le 17 avril 1985 à Roubaix (Nord), abandonné par sa mère, Mehdi Nemmouche a été en partie élevé par sa grand-mère dans le quartier populaire de La Bourgogne, à Tourcoing, avant d'être placé en famille d'accueil. Entre 13 et 22 ans, il se fait connaître des services de police pour vingt-deux délits (vols de véhicule, violences volontaires, dégradations, vols à main armée). Parallèlement, après avoir obtenu son BEP en électronique, il échoue à passer son bac professionnel électrotechnique en raison d'une hospitalisation pour un pneumothorax. A 22 ans, il s'inscrit en première année de capacité en droit mais ne va pas au bout.
Le 10 décembre 2007, le Tribunal correctionnel de Grasse (Alpes-Maritimes) le condamne pour tentative de vol aggravé en récidive. En 2008 et en 2009, Mehdi Nemmouche est condamné, alors qu'il est déjà en détention, pour vol aggravé pour le braquage d'une supérette à Tourcoing commis en août 2006. Repéré par l'administration pénitentiaire pour ses appels intempestifs à la prière collective, il passe un an et demi en quartier disciplinaire et voit refuser toutes ses demandes de remise de peine. En 2011, il est poursuivi pour des violences sur un surveillant. Le 4 décembre 2012, il sort de prison, où il aura passé cinq années, rapporte Le Monde du 8 septembre 2014, « Mehdi Nemmouche : ce que l'on sait de son parcours ».
Le 31 décembre 2012, Mehdi Nemmouche part pour la Syrie, où il rejoint les rangs de l'Etat islamique en Irak et au Levant. Exécutant de base, il aurait été présent dans l'ancien hôpital ophtalmologique d'Alep, le lieu de détention des quatre journalistes français Didier François, Edouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torres, enlevés en Syrie en juin 2013, comme le révèle Le Monde, le 6 septembre 2014. Chargé de leur surveillance, celui qui est surnommé « Abou Omar le cogneur » aurait fait preuve d'une grande brutalité à l'égard des otages.
Un an après
« Nous avons vécu une année difficile sur le plan personnel », reconnaît Philippe Blondin, le directeur du petit musée situé dans le quartier central du Sablon, alors qu'approche la fin de la shannah, l'année suivant le deuil dans la tradition juive (Le Point, 24 mai 2015). Les temps « privilégiés » où le musée était ouvert à tous, sans mesures de sécurité particulières, « sont malheureusement terminés », constate M. Blondin, alors que de nouveaux portiques détecteurs de métaux ont été installés et que deux militaires lourdement armés montent constamment la garde devant l'entrée.
Les jihadistes ne transformeraient-ils pas le monde en un champ de ruine s'ils le pouvaient ?
 

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