Tribune
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Publié le 5 Février 2014

Au nom du Père Paolo, otage en Syrie

Tribune d’Ondine Debré publiée sur Causeur le 4 février 2014

 

Le jésuite italien aurait été enlevé par les rebelles qu’il soutenait.

 

Voici six mois que le père Paolo Dall’Oglio, jésuite italien installé en Syrie depuis plus de trente ans,  a été kidnappé à Raqqa, sur les bords de l’Euphrate, à 160 km à l’est d’Alep. Six mois qu’aucun indice, aucun élément, ne permet d’en savoir plus sur cet enlèvement. Six mois que le religieux est otage de ceux qu’il soutenait avec rage, aux mains d’une rébellion syrienne à plusieurs têtes. « Nous n’avons aucune information sur son enlèvement, personne ne l’a revendiqué et nous ne savons pas s’il est en vie ou non. », explique Francesca Dall’Oglio, l’une des deux sœurs du prêtre. Certains disent pourtant tout bas qu’il « serait toujours détenu aux environs de Raqqa ». Le conditionnel interdit toute certitude.

Le père Dall’Oglio a ressuscité le monastère byzantin de Mar Moussa au nord de Damas. « Il s’était totalement fondu dans la réalité syrienne, dans la langue syrienne, et dans la vie de son peuple le plus pauvre. Il n’était plus un étranger en Syrie », explique Jean-François Colosimo. Le jésuite a fait sienne cette grande tradition chrétienne  de l’inculturation et choisi de se donner entièrement au peuple syrien. Le monastère était un lieu de rencontre, où chrétiens et musulmans, hommes et femmes,  venaient converser en toute liberté, en toute confiance, autour du père Paolo pour qui le dialogue avec les musulmans était fondamental.  Pour ce fin connaisseur de l’Islam, les deux religions sœurs sont faites pour cohabiter dans le respect. «La société syrienne a toujours été pluraliste, ce n’est pas un cul-de-sac continental, mais un lieu de passage. La Syrie a dans son ADN une harmonie plurielle entre ses communautés qui est unique au monde » avait-il l’habitude de dire.

 

Dès le début de la guerre en Syrie, le père Dall’Oglio s’engage aux côtés de la rébellion contre le régime de Bachar Al Assad.  « Ce que le régime fait subir à la population est devenu indécent », dit- il aux journalistes qui l’interrogent. Les conséquences de sa prise de position sont immédiates. Au printemps 2012, son permis de résidence est révoqué par les autorités syriennes et il est expulsé du pays. Il quitte Mar Moussa et s’installe en Irak. Il publie alors un livre sur le conflit syrien en France au printemps 2013, "La rage et la lumière", aux éditions de l’Atelier. Il retournera plusieurs fois en secret sur le sol syrien.  En juillet 2013, il se rend à Raqqa. Cette ville du centre de la Syrie, à l’origine aux mains de l’armée syrienne libre, a subi de profonds changements en avril 2013 lorsqu’un  groupe dissident,  l’État islamique en Irak et au levant (EIIL), combattants ultra-radicaux liés à Al-Qaïda , jette l’ASL dehors. Le père décide d’y tenter une médiation entre les deux groupes. « Je suis venu pour rencontrer les chefs de groupes armés. Je voudrais qu’à Raqqa se fassent les premiers pas d’une réconciliation entre opposants », déclare-t-il alors.

 

Il disparaîtra quelques heures plus tard… Lire la suite.

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