Tribune
|
Publié le 8 Janvier 2014

Contre Dieudonné, Valls a raison

Par Gérard Courtois

                                 

Il y a mille raisons de ne pas commencer l’année avec Dieudonné. Mille excellentes raisons de ne pas se laisser entraîner dans les polémiques glauques que déclenche invariablement ce provocateur patenté et soi-disant humoriste. Depuis que le Ministre de l’Intérieur a dénoncé « les propos racistes et antisémites » de Dieudonné, depuis qu’il a annoncé son intention de « casser cette mécanique de haine » et d’étudier toutes les voies juridiques pour interdire ses spectacles, pas un argument n’a manqué, en effet, pour inciter à se tenir à distance.

Attention ! mettent en garde les uns : attaquer Dieudonné bille en tête, comme l’a fait Manuel Valls, c’est lui assurer une notoriété et une publicité inespérées, à la veille d’une tournée qui commence le 9 janvier à Nantes et doit le conduire dans 22 villes de France et de Navarre dans les prochaines semaines.

 

Menacer d’interdire ses spectacles, déplorent les autres, c’est risquer de transformer l’histrion en paria et lui apporter sur un plateau la démonstration que sa rhétorique touche juste : vous voyez bien que je suis le héros des antisystèmes, puisque le « système », en la personne du ministre de l’intérieur lui-même, me désigne comme ennemi public, pourra-t-il ricaner à la première occasion. Rien de tel pour alimenter les fantasmes complotistes dont il a fait l’un de ses fonds de commerce.

 

Pis encore, interdire les prestations de Dieudonné, n’est-ce pas s’engager sur un terrain périlleux pour les libertés publiques, menacer ces fondements de la démocratie que sont les libertés d’expression et de réunion ? N’est-ce pas censurer un artiste, museler un libre penseur, récuser le rire au nom de la morale publique, comme le plaident déjà ses avocats ? N’est-ce pas risquer d’être, ensuite, désavoué par la justice si le « trouble à l’ordre public », invoqué par le Ministre de l’Intérieur pour intervenir, n’est pas avéré ?

 

D’autres encore, tout en dénonçant les provocations antisionistes – pour ne pas dire antisémites – de Dieudonné, refusent de prêter la main à ce qu’ils estiment être un coup politique de M. Valls, une manière de redorer son blason républicain. Pas vous, et pas sur ce terrain !, rétorquent-ils au ministre, en lui rappelant ses sorties inacceptables sur les Roms, il y a quelques semaines.

 

Aucun de ces arguments n’est négligeable. Mais alors, que fait-on ? On laisse Dieudonné, soir après soir, déverser sa haine des « juifs », de « la juiverie », de « kippa city » et du « complot sioniste » ? On se bouche les oreilles quand il répète en boucle, en dépit de la procédure engagée par Radio France : « Quand je l’entends parler, Patrick Cohen [animateur de la matinale de France Inter], je me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage ! » ?

 

On ignore, de même, son apologie de Pétain, coupable de la rafle du Vél d’Hiv, mais, selon lui, « moins raciste » que Hollande ? On ferme les yeux quand il exhibe sur scène le négationniste des chambres à gaz, Robert Faurisson ; ou quand il entonne, sur l’air d’une chanson d’Annie Cordy, un « Shoah nanas » qui tourne en dérision l’extermination des juifs d’Europe par le régime nazi ?... Lire la suite.

Maintenance

Le site du Crif est actuellement en maintenance