Tribune
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Publié le 19 Février 2014

Juifs d’Espagne L’année prochaine à Tolède ?

Tribune de Nathan Cahn publiée dans l’édition française du Jérusalem Post le 18 février 2014

 

Il n’est jamais trop tard… Le 10 janvier dernier, les autorités de Madrid ont annoncé la promulgation d’une loi qui facilitera la naturalisation des descendants de Juifs séfarades expulsés du pays en 1492 par les rois catholiques Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon, à la suite de la célèbre Reconquista. Le projet de loi adopté le 15 janvier par le gouvernement devrait cependant encore « prendre du temps » avant d’être transmis au Parlement pour être voté. Cependant, le parti au pouvoir ayant la majorité parlementaire absolue, il n’est pas prématuré de s’attendre prochainement à la ratification de ce texte législatif.

Le projet de loi vise à modifier le Code civil pour faciliter l’obtention de la nationalité espagnole, quel que soit le pays d’origine, dès lors que la personne peut prouver être issue de la communauté séfarade, notamment par un certificat de l’état civil ou d’un rabbin. La maîtrise du ladino (dialecte judéo-espagnol) étant elle aussi une preuve probante. Une liste de plus de 5 000 patronymes séfarades sera également employée par les autorités ibériques pour faciliter la reconnaissance des personnes éligibles. Ces preuves de liens avec le séfaradisme espagnol devront être entérinées par une attestation qui sera émise par la Fédération des communautés juives d’Espagne. Le fait d’être séfarade sera donc reconnu comme une « circonstance exceptionnelle de lien avec l’Espagne », donnant droit à une naturalisation. Dernier point important : toute personne concernée pourra conserver sa nationalité d’origine, alors que l’Espagne prohibe pourtant la binationalité...

 

Un antisionisme criant

 

Mais cette nouvelle législation symbolise également une rédemption historique pour l’Espagne, ce pays ayant pendant longtemps refusé de reconnaître sa faute passée à l’égard de sa communauté juive. C’est au XIXe siècle que les Espagnols, qui s’établissent alors au Maroc, réalisent pour la première fois que les Juifs séfarades sont restés profondément marqués par la culture espagnole. Lors de la prise de Tétouan en 1860, les troupes espagnoles sont accueillies en héros par la communauté juive locale, qui parle alors couramment castillan et vient de subir un pogrom. En novembre 1992, quelques mois après la commémoration du 500e anniversaire de l’expulsion des Juifs d’Espagne, le Parlement espagnol promulgue une loi historique, qui considère, pour la première fois dans l’Histoire du pays, le judaïsme comme « une religion à part entière », devant bénéficier des mêmes droits accordés au catholicisme, la religion officielle de l’Espagne. Reconnaissance gravée dans le marbre en 1992, lors de la visite mémorable à la synagogue de Madrid du roi Juan Carlos Ier, celui-ci ayant déclaré à cette occasion que les Juifs séfarades devaient se sentir en Espagne comme chez eux parce que « l’Espagne est leur maison ». Pour la première fois depuis cinq siècles, le passé juif du pays n’était plus essentiellement symbolisé par des ruines et des vestiges d’un autre temps, mais bel et bien comme étant une frange reconnue de son identité.

 

Cependant, malgré ces déclarations, l’Espagne est loin d’être un pays où le philosémitisme et l’amour d’Israël règnent en maître. En janvier 2009, des manifestations très importantes sont organisées dans les principales villes d’Espagne, pour protester et condamner l’intervention israélienne à Gaza. 200 000 personnes à Madrid et 150 000 à Barcelone crient leur solidarité avec les Palestiniens et dénoncent les actions d’Israël. Le Ministre de l’Intérieur du gouvernement autonome de la Catalogne n’hésite pas à manifester en tête de cortège. Le 27 janvier 2009, le même gouvernement autonome de Catalogne va jusqu’à annuler la journée de la shoah en réaction à l’opération Plomb durci. La mairie de Ciempozuelos (ville située non loin de Madrid) remplace, quant à elle, la journée de la shoah par une journée de commémoration du génocide palestinien… La même année, le gouvernement Zapatero exige, en vain, que l’Europe demande la fin du blocus de Gaza aux Nations unies. L’ancien Premier Ministre espagnol avait d’ailleurs laissé la porte entrouverte pour une négociation avec le Hamas, ouvertement antisémite. En 2010, l’Espagne continue sur sa lancée et annule la conférence des pays riverains de la Méditerranée qui devait se tenir à Barcelone au mois de novembre. Motif : la poursuite de la « colonisation » par Israël. Au vu de ces prises de position extrêmement biaisées, l’arrivée de plusieurs milliers d’Israéliens dans le pays semble donc être une éventualité plutôt hasardeuse (Israël compte la plus grande communauté séfarade du monde avec 1,4 million de personnes)… Lire l’intégralité.

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