Tribune
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Publié le 13 Novembre 2012

Justice pour tous

Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international

 

À nouveau, il y a quelques jours, on a entendu dans les milieux de l’ONU évoquer le cas des « réfugiés palestiniens ». Ainsi, le Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA), Filippo Grandi, a demandé jeudi dernier, une « solution juste » pour les cinq millions de réfugiés de Palestine. Ce diplômé de philosophie d’universités italiennes, au service des Nations Unies Unies depuis 1988, dirige l’UNRWA depuis près de trois ans et, généralement, on l’entend réclamer des crédits supplémentaires. 

Le voilà qui, sans vergogne, se place sur le plan politique, alors qu’ainsi que nous l’avons déjà, souvent relevé ici-même (v. par ex. notre point de vue du 15 février 2009 Le droit au statut de « réfugié palestinien » est imprescriptible et transmissible) et également (Charles Meyer et Philippe Juza, Réfugiés palestiniens. Otages de la diplomatie, éd. Hermann, 164 p. 2011), les réfugiés palestiniens bénéficient d’un régime de faveur, par rapport à la masse des vrais réfugiés, qui, eux, relèvent de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

 

Depuis l’adoption de la convention de 1951 sur le statut des réfugiés, l’HCR a fourni protection et assistance à des dizaines de millions de réfugiés, trouvant des solutions durables pour un grand nombre d’entre eux.

 

D’après les derniers chiffres disponibles, le nombre de personnes relevant de la compétence de l’HCR s’élevait à 10,4 millions de réfugiés début 2011, en légère baisse par rapport à l’année précédente, alors que l’UNRWA n’a pas honte de « revendiquer » un nombre croissant de « réfugiés », qui ne méritent pas tous cette appellation.

 

Non pas que nous contestions les conditions de vie déplorables qu’ils connaissent, mais parce que, ainsi que nous l’avons déjà signalé, la qualité de réfugié se transmet héréditairement, de telle sorte que si environ de 500 000 à 700 000 personnes ont effectivement quitté leur habitation du fait de la création de l’État d’Israël, près de 65 ans plus tard près de 90% de ceux qui relèvent de l’UNRWA n’ont jamais vécu dans les Territoires ou à l’intérieur d’Israël.

 

Par ailleurs, qu’il s’agisse des « réfugiés » vivant dans la Bande de Gaza ou de ceux vivant en Cisjordanie, rien n’empêchait l’Égypte et la Jordanie, entre 1948 et 1967, de chercher à aider l’UNRWA à améliorer leurs conditions de vie et surtout à chercher à leur trouver une occupation.

 

Quant à ceux vivant dans les pays limitrophes ou plus lointains, ces pays n’ont rien fait pour chercher à les intégrer, comme l’ont fait de par le monde, en Europe ou ailleurs, les pays concernés par un afflux de réfugiés, qui n’avaient pas tous – loin de là – les mêmes possibilités que l’Allemagne pour intégrer leurs réfugiés.

 

Bien évidemment, il n’appartenait pas au Commissaire général de l’UNRWA d’évoquer une « solution juste » pour les quelques 900 000 – ou du moins pour ceux encore en vie – qui ont dû fuir les Pays arabes (n’en déplaise à certains pseudo-historiens israéliens – v. ici même le 19 mai 2012 : A propos de vrais réfugiés).

 

Mais ils ont droit également à ce que justice leur soit rendue pour le préjudice qu’ils ont, eux aussi, subi.

 

On est quelque peu déconcerté par la logorrhée du haut fonctionnaire de l’ONU reprenant, pour la Xème fois, les mêmes slogans.

 

S’agissant de la Bande de Gaza, le « blocus » israélien a « bon dos », à en juger par la magnificence de certaines constructions de bord de mer et il n’est pas sûr que l’aide promise, récemment, par l’émir du Qatar soit mieux utilisée que l’aide internationale accordée jusqu’à présent par la société internationale.

 

Quant à la Cisjordanie, où les réfugiés représentent, selon M. Grandi près de 30% de la population palestinienne. Il est facile, de mettre en cause « l’expansion des colonies de peuplement israéliennes, ainsi que les restrictions imposées par l’occupant à la liberté de mouvement qui asphyxient l’activité économique », alors que la corruption de l’Autorité (sic) palestinienne est difficilement enrayée.

 

Ce n’est pas en répétant à l’envi que l’ « expansion des colonies » est considérée comme « illégale par les Nations Unies et la communauté internationale », alors qu’aucun texte conventionnel, ni aucune règle coutumière ne sont formellement violés, que le Commissaire général fera avancer la recherche d’une solution, pas plus que ses imprécations selon lesquelles « l’entreprise coloniale continue(ra) de progresser inexorablement, en toute impunité et avec des conséquences potentiellement dangereuses ».

 

L’Assemblée générale des Nations Unies ne crée pas le droit international par une simple résolution, même répétée.

 

Heureusement pourrait-on dire en se souvenant de l’équation « sionisme = racisme », votée en 1979…

 

Le Conseil de sécurité n’a pas plus de compétence normative, même, si, parfois, il dispose d’un pouvoir de décision.

 

Rien n’empêche la partie palestinienne de reconnaître la réalité de la vocation d’Israël à être l’État des Juifs et, par conséquent, de renoncer, effectivement, à invoquer un pseudo-droit de retour des réfugiés, qui entraînerait, à terme, la disparition de cet État.

 

Ce n’est pas le développement des constructions – pour aussi inopportune qu’il soit, de notre point de vue – qui constitue « la source de difficultés insoutenables et un obstacle majeur à la paix », mais bien l’obstination des Palestiniens à réclamer ce qui n’est pas un droit, mais l’expression d’une volonté de délégitimer Israël.

 

Donc, moins d’imprécations et plus de réalisme et de justice pour tous.