Tribune
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Publié le 23 Mars 2012

Lettre de Richard Prasquier à Nicolas Sarkozy, président de la République

Je tiens avant tout à vous remercier pour la façon admirable dont vous avez personnifié la solidarité nationale autour des victimes du tueur terroriste de Toulouse et Montauban, et pour l’efficacité des pouvoirs publics dans la traque de ce dernier. Savoir que cet homme est désormais hors d’état de nuire est un soulagement immense pour les parents et les enfants des écoles juives, même si chacun redoute qu’il fasse des émules. Le renforcement de la sécurisation des lieux de culte et d’étude de notre communauté est malheureusement indispensable.

Je voudrais ici  vous présenter quelques réflexions avec pour objectif unique de renforcer à l’occasion de cette tragédie le sentiment d’union nationale qui s’est exprimé de façon émouvante au cours de ces journées terribles et auquel tout le monde, en particulier les divers partis politiques, ont participé.

 

D’abord ce rappel que l’antisémitisme est  capable, comme à l’époque nazie, d’engendrer une haine telle qu’elle conduise à assassiner un enfant de sang-froid  et que la dimension antisémite de ces assassinats ne doit pas être gommée dans une réprobation générale, à laquelle je souscris évidemment par ailleurs, de tous les racismes. C’est cette passion antisémite meurtrière qui a tué à rue Copernic, qui a tué rue des Rosiers, qui a tué Ilan Halimi et qui vient de tuer à Toulouse.

 

L’antisionisme en a été le vecteur. Il est aujourd’hui la forme la plus commune de l’antisémitisme : il stigmatise  de façon très injuste l’Etat d’Israël d’un opprobre auquel échappent tous les autres pays quel que soit leur comportement. Les medias ont malheureusement eux-mêmes diffusé malencontreusement à plusieurs reprises des documents de propagande attribuant faussement à Israël des assassinats d’enfants, qui alimentent cette éducation à la haine qui est l’un des obstacles majeurs, sinon l’obstacle majeur, à la paix. Il en est ainsi depuis l’affaire Al Dura, pour laquelle le CRIF réclame depuis longtemps, et malheureusement dans un silence qui ne peut pas continuer, une commission d’experts, jusqu’aux très récentes images de la riposte israélienne aux tirs de Gaza. Mohamed Merah a donné « les enfants de Gaza » comme prétexte à ses crimes. D’autres que lui reprennent, souvent de bonne foi d’ailleurs, ces allusions mensongères à l’appui de leurs actes ou de leur discours.

 

Nous sommes plus que quiconque attachés à des relations fraternelles entre l’Islam de France et la communauté juive. Nous avons dans les dirigeants communautaires musulmans des partenaires avec lesquels nous partageons les mêmes sentiments sur la France. Les religions doivent y vivre dans une république laïque accueillante mais lucide. Nous rejetons tous les amalgames qui se produiraient à l’occasion des crimes d’un fanatique. Mais nous demandons que le rejet qui s’attache aux actes des extrémistes terroristes s’accompagne de la part de tous d’une fermeté sans complaisance, sans faiblesse et sans aveuglement vis-à-vis de ceux qui véhiculent des discours souvent plus aseptisés  et plus occidentalisés d’apparence mais aux conséquences à long terme aussi dramatiques pour l’esprit de nos lois et de nos institutions. Dans ce combat essentiel pour la sauvegarde de nos valeurs chacun doit assumer ses responsabilités. Soyez assurés que nous assumerons les nôtres.

 

Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en l’expression de ma très haute considération.

 

Richard Prasquier

Président du CRIF

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