Tribune
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Publié le 23 Mai 2012

N’en déplaise aux partisans de la campagne BDS, le boycott des produits israéliens est illégal en France : la Cour de Cassation vient à nouveau de confirmer la constance de cette jurisprudence

Par Maitre Pascal Markowicz

 

Depuis juillet 2005 en France, relayée par des organisations pro-palestiniennes et soutenues par des partis politiques (Front de Gauche, NPA, EELV, PCF), la campagne Boycott Désinvestissement Sanctions initiées par des associations palestiniennes tente de prendre de l’ampleur à travers des actions appelant au boycott économique, culturel, sportif, ou académique d’Israël.

Ces « amoureux de la paix » qui ne condamnent jamais les roquettes lancées sur des civils israéliens par les organisations terroristes palestiniennes, se réclament de la non-violence pour prôner le boycott de tout ce qui est « made in Israël », afin de délégitimer la seule réelle démocratie de cette partie du globe, où les minorités sont représentées au Parlement et dont leurs membres sont parfois au gouvernement, diplomates, ou des personnalités reconnues de la société civile israélienne.

 

Cependant, ces actions sont discriminatoires au regard du droit français et, pour ne parler que du boycott économique, elles constituent des incitations à entraver l’exercice normal d’une activité économique en visant les producteurs et fournisseurs de ces produits, qui sont de nationalité israélienne.

 

Contrairement à ce qu’affirment certaines organisations radicales comme la CAPJPO-EUROPALESTINE, responsable d’une grande partie de ces actions ou de leur diffusion sur internet, une jurisprudence constante existe en la matière qui applique le droit en condamnant les auteurs de ces infractions qui tentent de persuader le public qu’il faut boycotter Israël et le mettre en quarantaine, en comparant la méthode avec celle qui avait mis fin au régime d’apartheid en Afrique du Sud.

 

Ainsi, le 28 septembre 2004, la Cour de Cassation avait déjà condamné un maire d’une commune qui avait appelé à ne plus acheter de produits israéliens dans les crèches de sa commune. Il avait donc appelé au boycott des produits israéliens.

 

S’estimant incompris, il avait saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme au motif qu’on portait atteinte à sa liberté d’expression, mais la Cour, dans son arrêt du 16 juillet 2009, confirma la décision de la juridiction suprême française, en précisant que la liberté d’expression connaissait quelques limites légitimes en droit français dont l’appel à la haine et à la discrimination en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance d’une personne ou d’un groupe de personnes à une nation, une race, une ethnie ou une religion.

 

En l’espèce, les producteurs israéliens appartiennent à la nation israélienne : l’appel à la discrimination de leurs produits constitue donc un délit en France et il faut s’en féliciter. Le cas serait d’ailleurs identique avec des producteurs d’autres pays du globe.

 

Le 18 décembre 2007, l’action elle-même de boycott à l’égard des produits israéliens était également réprimée par la Cour de Cassation.

 

Puis le 20 septembre 2011, le Tribunal Correctionnel de Limoges condamna deux boycotteurs proches de la mouvance radicale islamique qui avaient perturbé le repas des clients d’un fast-food Mac Donald’s, en criant que cette enseigne finançait l’État criminel d’Israël, lequel tuait des enfants de Palestine et qu’il fallait ainsi boycotter cette chaîne de restauration rapide qui était complice d’un État assassin.

 

Cette décision fait également partie de la jurisprudence puisqu’elle est définitive, de même que le jugement rendu le 21 octobre 2012 par ce même Tribunal et confirmé le 10 février 2012 par sa Cour d’Appel qui ont condamné Mohamed Achamlane, le porte-parole de l’organisation islamique radicale « Forsane Alizza » dissoute en mars 2012 par le ministre de l’Intérieur, à une peine de prison avec sursis outre le paiement d’une amende et de dommages-intérêts à des associations parties civiles, pour avoir diffusé sur internet, la vidéo de cette intrusion musclée dans le restaurant Mac Donald’s.

 

Toutefois, en contradiction avec cette jurisprudence constante, le Tribunal Correctionnel de Mulhouse relaxa douze boycotteurs, mais cette affaire est actuellement examinée par la juridiction d’appel, de même que les jugements du Tribunal Correctionnel de Paris et de Bobigny qui ont relaxé des activistes ayant mis en ligne sur internet, des vidéos de ce type.

 

Mais le 22 mai 2012, par un arrêt de Section donc d’une importance non négligeable, la Cour de Cassation a réaffirmé le caractère illégal et délictueux de ces appels au boycott des produits israéliens, en confirmant l’arrêt de la Cour d’Appel de Bordeaux qui, le 22 octobre 2010, avait confirmé le jugement du Tribunal Correctionnel de Bordeaux en date du 10 février 2010, lequel avait condamné Madame Saquina Arnaud (photo), une assistante maternelle membre de la Ligue des Droits de l’Homme et très engagée dans cette campagne BDS. Elle avait appelé la clientèle d’un magasin Carrefour de la région bordelaise à boycotter les produits israéliens dont les bouteilles de jus de fruits.

 

La Chambre de Commerce France-Israël et l’association Avocats Sans Frontières, parties civiles dans cette procédure qui fut la première en France à mettre en cause une personne physique appelant à boycotter des produits israéliens dans une enseigne de la grande distribution, étaient représentées en première instance et en appel respectivement par Maître Pascal Markowicz et Maître Gilles-William Goldnadel ainsi que, devant la Cour de Cassation, par Maître Hervé Hazan. L’important travail réalisé par ces Avocats ainsi que par Maître Michaël Ghnassia et Maître Aude Weill-Raynal, doit être remercié.

 

Dans la lutte contre le boycott et la délégitimation d’Israël le CRIF, dont certaines organisations tentent de minimiser les actions, joue un rôle de premier plan depuis l’origine de la campagne BDS en France, mais également à l’étranger. Son soutien primordial et actif aux parties civiles, sans toutefois ester en justice ce qui n’est pas son usage habituel, est constant et doit être rappelé. Qu’il en soit également remercié.

 

Cet arrêt de notre juridiction suprême est très important puisqu’il permet de rétablir la prééminence de la loi qui prévoit que l’appel à la discrimination, en l’espèce appliqué à des producteurs israéliens, est illégal.

 

Pascal Markowicz