Tribune
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Publié le 17 Avril 2014

Les femmes, combattantes depuis toujours, citoyennes depuis 70 ans

Tribune d’Annette Lévy-Willard publiée dans Libération le 16 avril 2014

Une cérémonie commémorant l'ouverture du droit de vote aux femmes a eu lieu à la mairie de Paris, mercredi 16 avril 2014, en présence notamment de trois prix Nobel de la paix et du Président de la République. Elles sont là, quelque deux cents maires portant fièrement une écharpe tricolore, pour la première fois élues au suffrage universel. Ce mercredi d’avril 2014, sous le plafond kitch orné de statues de femmes nues de l’Hôtel de Ville où l’une d’entre elles, Anne Hidalgo, vient aussi de faire l’histoire en s’installant dans le prestigieux fauteuil de maire de Paris. Émues. Pour cet anniversaire de l’ordonnance signée le 21 avril 1944 par le général de Gaulle, quand la guerre n’est même pas finie, et qui déclare enfin : «Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes.» 70 ans seulement.

Les arrière-grands-mères de ces nouvelles élues n’avaient pas le droit de voter, ni d’être élues, alors que les Américaines étaient des citoyennes à part entière depuis 1920 comme la plupart des Européennes. Les Françaises, elles, avaient perdu la bataille du droit de vote à la Révolution, quand la Déclaration universelle des Droits de l’Homme n’avait, justement, parlé que des hommes.

Elles avaient participé aux révolutions, à la Commune de Paris, fait tourner les usines pendant la Première Guerre mondiale quand les hommes étaient au front, et n’étaient toujours pas des citoyens comme les autres. Si Léon Blum avait imposé trois femmes Ministres dans son gouvernement en 1936, la gauche avait toujours peur d’un vote des femmes en faveur de la droite sous l’influence de l’Église catholique, pensaient-ils. Et la droite n’en voyait pas l’utilité, le mari suffisait.

Ce sont donc les grands-mères de ces maires élues le 30 mars qui ont mis le premier bulletin de vote dans une urne française en 1945, pour élire l’Assemblée de l’après-guerre. Et, paradoxe de l’histoire, les enquêtes montrent que depuis les années 80 les femmes votent un peu plus à gauche que les hommes, et apportent moins leurs voix au Front national… Lire la suite.