L’esprit d’Orsay reste encore synonyme de savoir, d’ouverture et de joie d’être-juif-en-France, un laboratoire de dialogue enrichissant entre les valeurs de la civilisation contemporaine et la culture juive où femmes et hommes avaient place égale selon leurs compétences. Mais comment est née la légende d’Orsay ?
L’Ecole d’Orsay fut l’école des cadres des Eclaireuses et éclaireurs israélites de France, véritable laboratoire d’érudition qui s’inscrivait dans le renouveau de la pensée juive après la Libération, développé sous le nom d’Ecole de pensée juive de Paris.
Les conditions de création de cette école ne peuvent se comprendre que dans le cadre plus large de l’accompagnement intellectuel des EEIF pendant l’Occupation. Sa création en 1946 fut l’œuvre de Robert Gamzon (Lyon, 30 juin 1905 - Israël, 1961) dit Castor Soucieux, fondateur du mouvement scout juif en 1923.
L’idée de créer cette école de formation des cadres des EI plongeait ses racines dans l’Occupation et notamment dans la ferme école de Lautrec, un chantier rural qui hébergeait des enfants juifs et assurait leur éducation. Denise Gamzon, l’épouse de Robert, dès mars 1941, prit la direction de Lautrec. En raison d’une grossesse difficile, elle fut remplacée par un jeune polytechnicien, Gilbert Bloch, qui avait passé 18 mois comme lieutenant aux “Chantiers de Jeunesse” de Vichy, chantiers qui avaient été dissous par les autorités allemandes. Venu d’une famille juive assimilée, il découvrit les bases du judaïsme avec Léo Cohn, avant d’aborder les subtilités des Textes de la Tradition qui le fascinèrent.
Dans un rapport publié le 18 juin 1943, Gilbert Bloch fixait déjà la ligne qui deviendra celle de la future école qui portera son nom, l’école de cadres EEIF d’Orsay : « Si l’on veut faire un mouvement à base spirituelle qui recrée un peuple, il faut s’occuper avec sérieux de la formation des cadres, en rassemblant des éléments d’élite d’une vingtaine d’années, consentants, et déjà dans le Mouvement. On leur donnerait des bases solides aux divers points de vue juif, agricole et artistique, pour leur permettre de devenir des foyers d’éducation et de rayonnement. » L’année suivante, Gilbert Bloch trouva la mort dans un maquis de Résistants à Vabres.
À la Libération, prenant conscience de l’ampleur de la Shoah et des terribles vides creusés dans les rangs de la communauté et du mouvement, Robert Gamzon, le commissaire national des EIF, reprit l’idée de créer une École des cadres. Il lui donna naturellement le nom de Gibert Bloch. Son dessein était de créer un lieu de renouvellement de l’identité juive, de recherche intellectuelle à partir de la tradition juive, et d’activité militante pour la reconstruction d’une communauté vivante...
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