L’islamisme radical, avec Daech comme fer de lance, mène une guerre implacable au peuple français.
Par Frédéric Encel, maître de conférences en questions internationales à Science Po Paris, et Yves Lacoste, professeur de géographie à l’université Paris VIII, publié dans le Monde des Idées le 26 juillet 2016
Dans ce contexte grave, il convient de se ressouder autour des mots, valeurs et symboles de la Nation et de la République en évitant les accusations faciles et autres inepties argumentaires. Hélas, trois d’entre elles se sont récemment exprimées.
La première est provenue des rangs de la droite dans la foulée du massacre de Nice, via des formules à l’emporte-pièce du style « si tous les moyens avaient été pris, le drame n’aurait pas eu lieu » (Alain Juppé). Quels moyens ? L’expulsion des Maghrébins, l’enfermement à vie des maris violents, l’interdiction de louer des camions pour les repris de justice ? Absurde. Face à la vague terroriste, le gouvernement Valls va aussi loin que l’y autorise l’État de droit, même s’il sera sûrement amené à renforcer en quantité et en qualité le dispositif général ; en attendant, que le premier ministre soit attaqué est d’autant plus injuste qu’il fut parmi les tout premiers à gauche à nommer courageusement et dès le 11 janvier 2015 l’ennemi, à savoir « le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical », impulsant de nouvelles mesures relayées par un Bernard Cazeneuve dont tous les responsables politiques s’accordent à reconnaître le même sérieux.
La seconde ineptie provient justement de cette gauche angélique ou complaisante qui stigmatise la prorogation de l’état d’urgence sous le double prétexte fallacieux qu’il serait à la fois inefficace et liberticide. Or non seulement celui-ci a déjà permis aux forces de l’ordre et à la justice de gêner ou d’entraver la perpétration d’actes délictueux ou criminels liés au terrorisme, mais encore il n’a manifestement dérangé ni le mouvement Nuit debout des mois durant, ni des dizaines de manifestations syndicales, ni la tenue de l’Euro, et moins encore la libre expression de positions contestataires dans les médias et en place publique. Décidément, on aura connu sous d’autres latitudes ou en d’autres temps nationaux des états d’urgence plus contraignants…
La troisième erreur grave consiste à critiquer comme inutile voire contre-productive l’action militaire de la France en Syrie, en Irak, au Mali et ailleurs contre l’État islamique et ses avatars. Les géopolitologues que nous sommes affirmons que si Daech ne subissait pas les coups de la coalition et notamment de nos Rafale, il conquerrait d’autres espaces, d’autres populations et d’autres ressources, jusqu’à devenir une vraie puissance plus menaçante et déstabilisatrice encore qu’aujourd’hui. En outre, infliger des défaites objectives et visibles sur son terrain originel mais aussi au Sahel, c’est ôter à cette organisation terroriste l’aura conférée par ses premières victoires que des esprits manipulables ou déjà fanatisés avaient interprétée ces dernières années comme un soutien divin. À juste titre, le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian écrivait récemment que nous étions « en guerre » ; elle nous a été imposée et nous devons la mener jusqu’à la victoire.
Idéologie fanatique
Cependant, face à une idéologie fanatique, il est vrai que l’emploi du RAID, des régiments de parachutistes et des forces spéciales, absolument nécessaire, ne suffit pas. L’islamisme radical incarne une forme de romanisme révolutionnaire morbide, opposons-lui pour paraphraser Max Weber, le ré-enchantement de la nation républicaine à travers plus de civisme, de solidarité, d’apprentissage de nos symboles, de revalorisation de notre récit national commun, et tout cela dès l’école...
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Frédéric Encel et Yves Lacoste publient à la rentrée aux Presses universitaires de France (PUF) un livre intitulé "Géopolitique de la Nation France".