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Publié le 30 Octobre 2009

Ces mots qui empoisonnent…

Une formule de Maurice Blanchot, placée en épigraphe, donne le ton du livre : « L'antisémitisme reste la faute capitale ». Aussi est-il l'interdit qui suscite la pire des accusations, celle qu'on lance pour tuer son adversaire. Si Elisabeth Roudinesco revient aujourd'hui à la « question juive » (en hommage à Jean-Paul Sartre), c'est pour s'insurger contre les abus de langage qui sèment la confusion, affirme le Monde du vendredi 30 octobre 2009.




L'historienne souligne les différences entre l'antijudaïsme du Moyen Age et de l'époque moderne et l'antisémitisme enfanté par le XIXe siècle, sans nier que telle notion « antijuive »- comme celle de « pureté du sang », brandie contre les marranes en Espagne - ait pu être un jalon sur la voie conduisant à l'antisémitisme. Elisabeth Roudinesco analyse la nouvelle confusion des mots qui empoisonne les débats depuis un bon demi-siècle, surtout depuis la création de l'Etat d'Israël : comment la critique du sionisme se voit taxer d'antisionisme, comment l'antisionisme, dans certains contextes, finit par se confondre avec l'antisémitisme. Le temps présent est placé sous le signe de la mémoire de la Shoah. Mais il est dominé aussi par le négationnisme, dont cet ouvrage retrace l'histoire avec précision et objectivité. A la galerie des grands pervers négationnistes, s'ajoute la série consternante de ces cas où l'antisémitisme refoulé revient au galop dans des dérapages discursifs distinguant, par exemple, les juifs des « Français de souche ». Décidément, on n'en finit jamais avec la question juive…



« Retour sur la question juive » d'Elisabeth Roudinesco. Albin Michel, « Bibliothèque Idées ».



Photo : D.R.