Fanny était la fille d’Avraham Eskénazi et de Sarah Messeri, tous deux natifs de Smyrne, en Turquie et marchands forains de leur état. Après avoir émigré en France, ils se marient à Paris en 1931. Fanny naîtra en 1934 à Berck-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais, où la famille s’est installée en 1933.
David, fils de Jacob Souléma, fabricant de chaussures et de Léa Benforado, tous deux natifs de Salonique où ils se sont mariés en 1930 avant de rejoindre la France, est né en 1931.
David et Fanny se sont mariés en 1954 à la synagogue de la rue Saint-Lazare à Paris.
David sera cadre supérieur dans l’industrie alimentaire et Fanny, pour sa part, optera pour une carrière de styliste. Ils auront une fille, Pascale, née en 1960.
Fanny et David appartiennent à la dynamique communauté des judéo-espagnols de Paris, qui se retrouvent pour une bonne part, dans les années trente, dans le XIème arrondissement de la capitale.
Quand les bruits de bottes inquiétants qui marquent l’accession d’Hitler au pouvoir, se font menaçants, les Juifs de Paris réalisent rapidement qu’il courent un grand danger. Certains parviennent à se réfugier dans des régions centrales du pays. L’Occupation surprendra tous les autres. Les lois raciales antisémites du gouvernement de Vichy aux ordres de la soldatesque nazie deviennent insoutenables. Mais le pire est à venir, on le sait, avec la déportation. Le père de Fanny comme le père de David, sont raflés le 20 août 1941, lors de la tristement célèbre « Rafle du XIème arrondissement ». Internés à Drancy, ils seront déportés et assassinés dans les camps de la mort tout comme bien d’autres membres de leurs familles respectives.
Fanny parvient à survivre avec sa mère et sa sœur aînée, Raymonde, en Bretagne. David, lui, aura moins de « chance ». Il doit sa survie à sa mère qui, lors de leur arrestation, le 4 novembre 1942, trouve la force morale de lui confier son petit-frère, Maurice, et de les pousser sous une porte-cochère où ils se cacheront pendant que leur maman sera, elle, déportée et assassinée. Pour les deux garçonnets qui deviendront désormais des enfants cachés », c’est le parcours traumatisant d’institutions en familles privées, l’UGIF, l’OSE…
Ce sont les soixante dix-sept lettres échangées par leurs parents lors de leur détention à Drancy qui sont à la base de l’entreprise de témoignage de Fanny et David Sauleman.
Fanny a disparu prématurément en 2001. C’est pourquoi ce livre à deux voix où chacun avait décidé d’écrire son récit séparément est quelque peu disproportionné, le récit de Fanny étant beaucoup plus court. David, qui vit aujourd’hui entre la France, Israël et les États-Unis a, de ce fait, écrit la plus grande part de l’ouvrage.
Des photographies de famille, des reproductions de documents, pièces d’identité, attestations de tous ordre…toute une vie, parsèment ce livre très attachant
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions Le Manuscrit. 2009. 544 pages. 35 euros.