En ouverture, Daniel Shek a souligné l’importance qu’il accordait à la diplomatie culturelle et à la dimension littéraire comme élément majeur d’un dialogue. Il a rappelé qu’il y a deux ans Israël était l’invité d’honneur du Salon du Livre.
Nicole Guedj a évoqué la genèse de la Fondation France-Israël, mise en place conjointement par Ariel Sharon et Jacques Chirac, qui œuvre pour un meilleur rapprochement entre les deux peuples – israélien et français - à travers un nombre de projets communs visant à établir des échanges culturels, scientifiques et diplomatiques afin de donner la juste image de l’Etat d’Israël et en favorisant un dialogue de paix dans la région. Des fondations similaires existent dans d’autres pays d’Europe dont l’Espagne.
Le journaliste et écrivain, Ivan Levaï, a interrogé Jorge Semprun sur les thématiques de son ouvrage qui porte un regard sans complaisance sur le XXe siècle qui, pour son auteur, ne fut pas uniquement le siècle de la destruction. Il a évoqué Paul Celan, juif roumain, qui a choisi pour langue de sa poésie « la langue de la mort » : l’allemand. Il a lu le vers de Celan : « Vous aurez une tombe au creux des nuages », dont il s’est inspiré pour son livre qui vent de paraître « Ecriture de la Résistance et engagement dans l’histoire européenne ».
Jorge Semprun a évoqué sa déportation en tant que résistant anti-nazi au camp d’extermination de Buchenwald libéré par les Américains le 11 avril 1945 .Les deux premiers soldats a pénétrer dans le camp furent ceux du 3e Bataillon de l’armée de Patton : Fleck et Tenenbaum, deux juifs américains. Le 24 avril 1945, ils firent un rapport décrivant les horreurs du camp nazi. Ce camp est ensuite devenu le camp spécial n° 2 des Soviétiques en Allemagne de l’Est.
Ivan Levaï a questionné Jorge Semprun sur la phrase, empruntée à Paul Celan et qu’il prononça en Allemagne : « La Mort est un Maître venu d’Allemagne ». Pour les Juifs déportés de France ne peut-on dire que « la Mort est un Maître venu de France » ? Existe-t-il une hiérarchie du mal? Quels sont les dangers aujourd’hui ? demande le journaliste. Pour Semprun - né dans une famille de grande bourgeoisie espagnole et républicaine, réfugiée en France -, on ne peut comparer Hitler ou Staline à Franco : « La dictature de Franco n’était pas un totalitarisme ». Quand aux dangers qui nous guettent, il a rappelé le philosophe allemand d’origine juive, Husserl : « Le plus grand danger de l’Europe est la lassitude ».
« Léon Blum : 60 ans après la mort de l’homme d’Etat français, sioniste et solidaire des républicains espagnols »
Dans cette seconde partie du débat ont pris part, autour de Jorge Semprun et d’Ivan Levaï : Ilan Greilsammer, professeur de Sciences politiques et Louis Bodin, ancien professeur, fondateur des Presses de Science po. Si l’attachement de Léon Blum aux idéaux sionistes est indiscutable, sa position face à la Guerre d’Espagne est plus ambiguë. Pouvait-il aider davantage la jeune République ? Les historiens restent partagés. L’arrivée du Front Populaire a suscité à l’égard de Léon Blum, alors Premier ministre, un antisémitisme virulent. Durant l’occupation, arrêté et jugé par Vichy il est déporté de 1943 à 1945 à Buchenwald. Ses qualités intellectuelles et son engagement politique font de lui une grande figure de la République française.
(C.H.)
1. Il faut souligner les liens étroits entre la Casa Sefarad Israel et le CRIF dans leur réflexion commune sur l’antisémitisme. Henar Corbi a fait part de l’implication forte du gouvernement espagnol dans la lutte contre toute forme d’antisémitisme et du soutien qu’il apporte à la communauté juive d’Espagne.
Photo : © 2010 Alain Azria