A lire, à voir, à écouter
|
Publié le 21 Mai 2014

La carte maîtresse, de Manuel Cordouan (*)

Par Jean-Pierre Allali

Nous vous avons présenté, ici même, en 2011, le très agréable roman de Manuel Cordouan, « Les amants d'Alger » (1) dans lequel on suivait les aventures sentimentales de Myriam, fille d'Isaac et d'Esther, et de son fiancé goy, Paul Quentin. Par delà les problèmes soulevés par la conversion de Paul souhaitée par la famille de la jeune fille, on découvrait par le menu les nombreuses facettes du judaïsme algérien à l'aube de la naissance de l'État d'Israël.

Derrière un pseudonyme littéraire, Manuel Cordouan, se cache en réalité un haut fonctionnaire,éminent représentant de l'État, Nicolas Quillet, ancien préfet du Cher et, depuis peu, préfet d' Eure-et-Loir où, à Chartres, il occupe désormais le bureau de Jean Moulin.

Dans son nouveau roman, Nicolas Quillet alias Manuel Cordouan ne quitte pas tout à fait l'Algérie et le judaïsme. Mais ils sont moins omniprésents que dans le précédent. Le héros, Michel Clamence, fils d'une Juive d'Algérie, Éva Cohen et d'un Breton bien catholique , Adam Clamence, est confronté à des relations tumultueuses avec son épouse, Fabienne, à des difficultés professionnelles comme DRH dans une entreprise en passe d'être rachetée par des Américains et à sa jalousie morbide à l'égard de son meilleur ami, Samuel, dont la mère, Raïssa, est, elle, une convertie au judaïsme et qui s'avère être l' ancien petit ami de Fabienne et , cela a son importance, un grand maître ès tarots.

La mort de sa mère, atteinte de la maladie d'Alzheimer, dans une maison de retraite, va bouleverser le quotidien de Michel. Lui qui a été baptisé et qui ne dédaignait pas de chanter le dimanche avec son père à l'Église Saint-Jean-Chrysostome, lui qui aimait se désigner comme un « Juif d'honneur », va se retrouver en train de négocier avec des maisons funéraires juives et d'affronter le casse-tête de trouver « le » Rabbin qui acceptera de célébrer un office devant le caveau familial de Rothéneuf près de Saint-Malo, monument vénérable hérissé de croix catholiques.

Et c'est grâce à l'homélie du Rabbin Maman de Rennes que le passé d'Éva Cohen resurgit. Alger renaît, le temps de l'éloge de la disparue. Quant aux proches parents de la défunte, ils ne manquent pas d'évoquer le bon temps où on se tapait « la mahria avec des tramous » du côté de Bab El Oued.

Un texte très agréable à lire. Une détente assurée.

(*) Éditions De Borée. Avril 2014. 288 pages. 20 euros.

(1) Voir la Newsletter du 16 novembre 2011.

CRIF