Jean Pierre Allali

Jean-Pierre Allali

Golda, Une enfant au Goulag, par Michel Krengel (*)

16 Juin 2016 | 146 vue(s)
Catégorie(s) :
Israël

Par un enchaînement de hasards, notre bloggueuse Sophie, plus habituée aux sujets de cyber-sécurité et de contre-terrorisme, s'est retrouvée les mains dans la pâte (à pizza). Et ça lui a donné quelques idées plutôt gourmandes... Elle les partage avec vous à travers ces chroniques culinaires !

Bienvenue sur le blog La Chronique (pas tès casher) de Raphaëla ! Sur ce blog, Raphaëla vous propose ses billets d'humeur sur tout ce qui l'entoure, l'émeut, la touche, la fait rire et la révolte. Et elle a des choses à vous dire...

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Un ouvrage sympathique et émouvant à découvrir.

Une recension de Jean-Pierre Allali
 
L'auteur a choisi la forme de l'interview pour nous raconter avec une plume alerte et agréable à lire, les incroyables péripéties de la petite Golda et de sa famille à travers l'Europe aux heures sombres de la Shoah.
 
Tout commence à Warka, au sud de Varsovie, en Pologne, au sein d'une famille juive : Leibel, un tailleur , son épouse, Mindla et leurs deux enfants, Golda, dite Goldele, quatre ans et Schloïme alias Schloïmele alias Simon, deux ans. Une vie simple et heureuse. « Quand je repense à notre famille, l'image qui me vient est celle d'un nid. Un nid douillet, avec la mère attentive qui protège ses petits et le père, qui  tel un chasseur, rapporte de quoi manger ».
 
Dans les années 30, avec la montée du nazisme en Allemagne, les Juifs de Warka commencent à s'inquiéter. Certains, les sionistes, pensent qu'il faut aller en Palestine réaliser le rêve millénaire de reconstruction de Jérusalem. D'autres, les communistes, envisagent de rejoindre la Russie pour un monde meilleur et plus fraternel.
 
Quand les Allemands envahissent la Pologne et s'en prennent violemment aux Juifs, Leibel et Mindla ne tardent pas à prendre la décision : il faut partir. Leibel, en compagnie de deux amis, David et Meier, part en éclaireur. Pour Mindla et ses enfants, une petite valise, des vêtements chauds et un édredon qui s'avérera salvateur au cours des mois de galère. Pour Golda, sa poupée préférée. Sur la route les carrioles croisent les charrettes et les marcheurs à pied. Direction : Varsovie, la capitale. Chez la tante Esther. La famille ne reste pas longtemps à Varsovie. On reprend ses baluchons et ses valises.
 
 Direction Brest-Litovsk en train où il est convenu de rejoindre Leibel. La Russie est à l'horizon. Le père miraculeusement retrouvé, la famille vit à quatre dans une petite pièce avant de se diriger vers Minsk où un travail de tailleur est disponible. Une vie difficile, certes, mais supportable. Trop beau pour durer car c'était sans compter sur le NKVD, la police politique russe. Accusés d'être des clandestins citoyens d'un pays ennemi, des espions, en somme, ils sont condamnés au camp de travail, au sinistre goulag. Deux jours de voyage qui semblent interminables sous un froid intense. La famille est désormais en Sibérie, à Kotlas, dans l'oblat d'Arkhangelst. 
 
Près du village de Siftifkar, les quatre malheureux Juifs polonais sont  désormais des « zeks », des déportés. Baraquements immondes et travaux éreintants. Les journées de travail sont de quinze heures et les quotas impossibles à atteindre. La nourriture est insuffisante et la maladie règne. Et voilà que malgré toute cette misère, Mindla met au monde une petite fille qu'on prénomme Lalka dite Letché. Désormais, la famille n'a qu'une idée en tête : s'évader. Elle y parvient en soudoyant des soldats et se retrouve sur un chaland. Lalka n'a que deux mois. La malaria se déclare à bord. Après un long voyage au cours duquel on traverse la moitié de la Russie, les fuyards se retrouvent au milieu de nulle part. C'est que Lalka achève sa courte existence.
 
Golda et ses parents parviennent à prendre un train. Au bout de longs mois de pérégrinations dans la neige et par un froid intense, ils se retrouvent aux confins de l'Asie...au Kirghiszstan dans le petit village de Mikaïlovka. On trouve à loger chez l'habitant. Nous sommes ici en terre d'islam et une forme d'antisémitisme est larvée. Cela n'empêche pas Leibel, sa famille et ses amis, de célébrer Pessah lors d'un seder mémorable. Plus tard, la famille se déplace vers le Kazakhstan, à Bistrovka. Désormais inscrite à l'école, Golda, qui a huit ans, se prépare à devenir une pionnière soviétique exemplaire digne du petit père des peuples, Staline. En 1945, la nouvelle de la capitulation de l'Allemagne est accueillie avec joie. 
 
Il est temps de partir. Mais vers où ? La Palestine ? Profitant de la mise sur pied d'un convoi en train en direction de l'Europe, Golda et sa famille, montent à bord. Sans oublier d'emporter l'édredon salvateur et un cochon (« Ce n'était pas très cacher, mais l'instinct de survie était plus fort. Dieu pardonnerait ») ainsi que des pommes de terre et des fruits secs. 70 wagons qui vont traverser l'Ouzbékistan, l'Ukraine, la Pologne et, enfin, le port de Stettin, sur la Baltique. 
 
Le voyage dura un mois. Nous sommes le 1er juin 1946. Apprenant que sa sœur, Frimit, est vivante et se trouve en Silésie, à Shwinitza, Leibel décide de la rejoindre. Et c'est parti pour une nouvelle aventure. Puis ce sera tour à tour l'Autriche, l'Allemagne et, en train, Paris où vit une sœur de Mindla. « Depuis notre arrivée en France, une page s'était tournée, une nouvelle vie commençait ». Cela n'empêchera pas un voyage « touristique » en Israël et un « pèlerinage » à Warka. La vie continue. Et si on prenait un « gluss tei », un bon verre de thé !
Des photographies agrémentent cet ouvrage sympathique et émouvant. À découvrir.
 
Note :
(*) Éditions L'Harmattan. Mai 2016. 190 pages. 19 euros.