Le billet de Georges Benayoun - Une réponse à mes amis artistes de la Marche Pour La Paix

20 Novembre 2023 | 330 vue(s)
Catégorie(s) :
Actualité

Dans une interview donné à Patrick Perotto de L'Est Républicain, je suis revenu sur l’un des défis des années à venir : combattre les idées de haine qui se répandent sur internet

I was interviewed in English and French, on EJP , Tuesday, May 31, 2016.

J'ai été interviewé, en anglais et en français, sur EJP, mardi 31 mai 2016.

Suite à mon élection à la Présidence du Crif, j'ai répondu aux questions de Paul Amar, sur tous les sujets de préoccupations des Juifs de France.

Prix Nobel de littérature en 2002, l'écrivain hongrois Imre Kertèsz est mort à Budapest le 31 mars 2016. Son dernier livre, "L'ultime auberge" a reçu, le 22 mai 2016, le Prix Spécial du Jury 2016 du Salon du Livre de la Licra-Paris

Voici le discours que j'ai prononcé après le vote de l'assemblée générale du Crif.

A l'occasion de l'assemblée générale du Crif réunie le 29 mai 2016, j'ai prononcé mon discours de candidature.

Lors du 9ème Salon du Livre de la Licra, deux écrivains ont reçu un prix

Là-bas, la crainte d'une menace russe est la principale raison qui exacerbe les passions identitaires.

 
Lors d’une allocution devant le Conseil de sécurité, Rafael Ramirez, représentant du Venezuela auprès des Nations-Unies, a lancé… « Qu’est-ce qu’Israël a l’intention de faire avec les Palestiniens ? Vont-ils disparaître ? Est-ce qu’Israël cherche à imposer une Solution finale sur les Palestiniens ? » 
 

Décryptage.

 

Des 27 avril au 10 juin 2016, se tiendront les journées nationales des Mémoires de la traite de l’esclavage et de l’abolition.  Souvenons-nous.

Nouvelle erreur de casting - Au lendemain de l'émission Dialogues Citoyens, retour sur Marwen Belkaid, un invité pas comme les autres.

Seuls, nous ne pouvons rien. Tous unis nous pouvons tout.

Seuls, nous ne pouvons rien. Tous unis nous pouvons tout.

Réaction à la célébration du 20ème anniversaire de la mort de François Mitterand

Pages

Opinion

Par Chloé Blum

Jean-Pierre Allali partage avec vous ses appréciations littéraires au fil de ses lectures. Aujourd'hui, il nous parle du livre de Techouva, de Frédéric Lauze.

Pages

Le 13 novembre, le magazine Télérama publiait un appel à une marche pour la paix initié par le collectif « Une Autre Voix » et signés par plus de 500 artistes. Comme d’autres professionnels et créateurs, la lecture de cette tribune m’a rendu triste et a renforcé mon sentiment d’incompréhension et de solitude. Dire d’abord, que je ne doute pas de la sincérité de la plupart des signataires, certains amis ou talents avec lesquels j’ai travaillé ou travaille encore aujourd’hui, d’autres pour lesquels j’ai aussi beaucoup de respect. Mais dire ensuite, que même s’ils sont pressés d’alléger leur conscience, les artistes ne doivent pas s’empêcher de savoir lire ce qu’ils signent.

 

Concernant les auteurs de cet appel auxquels je m’adresse particulièrement ici, on dira, par charité juive, qu’ils ont du être submergés par leurs émotions. Parce que, quand même, il aura fallu cinq semaines lourdes de votre silence pour recevoir de vos nouvelles. Y aller ou pas, en avoir ou pas ? Vous n’avez pas su, devant ce pogrom génocidaire, dépasser vos biais idéologiques. Cinq semaines pour un texte dont les ambiguïtés angéliques creusent, un peu plus profond, ces vieilles blessures - je vous évite leur énumération que l’Histoire m’empêche de cicatriser et que ce 7 octobre a ravivées à jamais.

 

La cruauté de ces massacres semble avoir perturbé vos schémas naturels de défense de la « cause » palestinienne, comme si vous étiez soudain orphelins de vos automatismes. Votre texte alors soulève plus de questions qu’il n’encourage la concorde. Pourquoi avoir attendu qu’Israël commence à riposter pour vous insurger ? Et pourquoi mettre sur le même plan les assassins palestiniens du Hamas et un État démocratique, de droit et en droit de se défendre ? Que je sache, aucune marche d’artistes ou de politiques quand Mossoul et ses deux millions d’habitants - au milieu desquels se cachaient les terroristes de Daech - étaient bombardés par les armées occidentales. Émotions sélectives. La mort d’un être humain est toujours une souffrance. Elle brise ces vies futures qui ne viendront jamais. Mais les survivants doivent-ils tendre la main à leurs assassins pour mieux les laisser préparer la mise à mort qui viendra ? On demande à Israël de devenir le Juif des Nations, celui qu’on aime jamais autant que quand il est mort, brulé, rayé des vivants. Nous nous sommes endormis sur le plus jamais. Nous nous battrons maintenant pour en faire une réalité.

 

Mais parlons du texte. Le cadre d’abord. L’entre soi, celui qui tient chaud, celui qui fait vous sentir appartenir, celui du minimum syndical, de l’émulation de la bonne conscience, de la duplicité et de la duperie, de l’engagement convenable, du frisson à bon compte. Une marche en blanc, humaniste et pacifique écrivez vous. Pour paraphraser Churchill, les mouvements pacifiques ont toujours annoncé la défaite de la paix et accompagné les démocraties au déshonneur. Munich bien-sûr, mais aussi ces organisations trotskistes (dont La France Insoumise si populaire dans le métier est un bâtard), qui ont renvoyé dos à dos les alliés et les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. La démocratie est un combat. Il devrait être le notre, à tous.

 

Puis le parcours. De l’Institut du Monde Arabe, au Musée d’Art Juif. Étrange raccourci. D’un lieu de pouvoir, d’intrigues et de dissimulation, financé en grande partie par la Ligue arabe à un lieu de culture et de mémoire. Pourquoi cette insistance, que je sens tant vous ronger, à imposer une équivalence qui n’est pas ?

 

Les mots enfin, ceux qui tuent.

Ce n’est pas le monde qui s’est « réveillé éventré », ce sont des femmes, des hommes, et des enfants et eux pour de vrai, pas pour une formule choc et lapidaire. Pourquoi ne vous attardez vous pas sur ces massacres comme vous le faites sur les victimes palestiniennes de la guerre ? Leurs morts dans des conditions indescriptibles, et brulés pour détruire jusqu’à leurs traces sont pourtant documentées. Annihilés parce qu’ils étaient juifs ou parce qu’ils travaillaient avec des juifs, musulmans chrétiens, thaïlandais et autres. J’ai vu ces images. Cette femme enceinte filmée par ses bourreaux, bâillonnée pour ne pas entendre ses cris, dont on ouvre le ventre pour en sortir son foetus qu’ils égorgent devant ses yeux avant de la laisser se vider de son sang. Où est votre rage, féministes signataires toujours promptes à dénoncer les violences faites aux femmes, face aux corps de femmes gisantes le sexe atrophié, mutilé ? Je n’entends pas votre colère. Les femmes juives seraient elles trop encombrantes ? Votre silence vous a rendu inaudibles. Les viscères de l’humanité vous pesaient-elles trop pour glisser si vite de vos mains tant elles dérangeaient vos certitudes ? Les « milices terroristes du Hamas ». Comme il est confortable ce mot Hamas, il permet de ne pas salir le mot « palestinien » auréolé et sacralisé par son statut de victime. Mais est-ce à dessein ou par ignorance que vous oubliez de rappeler que, derrière ces sinistres « terroristes », des centaines de civils palestiniens gazaouis se sont engouffrés, pour piller, violer, supplicier, kidnapper femmes et enfants, dans une jouissance inhumaine ?

 

« Le 7 octobre 2023, 240 civils israéliens ont été kidnappés et demeurent introuvables. Depuis le 7 octobre 2023, il y a eu le 8, le 9, le 10… jusqu’à ce jour et jusqu’à quand ? » Ce que Evelyne Chauvet, éminente psychiatre appelle l’enjambement de l’horreur. Le 7 octobre enveloppé comme on emballe les morts puis étouffé quantitativement par le « 8, le 9, le 10… jusqu’à ce jour et jusqu’à quand » avant d’être dégagé - avec les 238 otages, dont il ne sera plus fait mention - pour faire place à un développement apocalyptique des souffrances - réelles - des populations civiles palestiniennes (tiens plus de Hamas pour le coup) à grand renfort de chiffres diffusés par l’organisation terroriste. Du sang et des morts « toutes les heures, tous les jours sous les bombardements de l’armée israélienne ». En résumé, exit le Hamas, l’autorité en charge de Gaza, soutenue par une grande partie de sa population par adhésion ou par contrainte. L’équation soudainement se résume à Israël, son armée contre les pauvres gazaouis. Je tiens à votre disposition les conversations entre les assassins du 7 octobre et leurs pères et mères les encourageant à « s’emplir les mains du sang des Juifs ». Votre exercice de funambule ne risque-t-il pas d’apparaître pour ce qu’il est, déséquilibré ? Attention à la chute. Et puis sérieusement, ne pensez-vous pas que si l’armée du peuple d’Israël ne se souciait pas du sort des civils gazaouis, cela ferait bien longtemps que Gaza, comme Dresde (25 000 morts) ou Le Havre (à 80 % détruite) bombardées par les alliées pour libérer l’Europe de la barbarie nazie, ne serait que ruines.

 

« Ni clan, ni camps » - que je n’aime pas ce mot - écrivez-vous à raison. Juste le choix de la démocratie contre la barbarie, de la liberté contre la soumission, le choix de nos modes de vie même imparfaits contre cet islamisme qui les hait. Rappelez-vous toutes ces vies arrachées au Bataclan, et les terrasses ensanglantées de Paris ce 13 novembre 2015. Les mêmes, mais pourquoi ne pas vouloir le voir ?

 

« Aujourd’hui nos rues sont divisées. Une vague immense de haine s’y installe peu à peu et tous les jours actes antisémites et violences en tous genres surgissent dans nos vies ». Est-il si difficile de nommer les choses pour ce qu’elles sont ? 1 800 actes antisémites déclarés depuis le début de l’année dont 1 600 depuis le 7 octobre pour une communauté qui représente 0,7 % de la population française. L’angoisse dans tous les foyers juifs de France, des mezouzot qu’on enlève aux portes des maisons, des étoiles de David qu’on cache, la crainte de commander un Uber de peur de se faire agresser à cause de son patronyme, les murs qu’on rase dans les rues le soir ou mon fils qui me demande de ne plus porter un bonnet breton de peur qu’on ne l’assimile à une kippa… Quelles sont ces « violences en tous genres » que vous invoquer pour escamoter cette situation ? Quelqu’elles soient - vous avez du mal à les citer -, elles ne seront jamais à l’échelle de celles que la communauté juive affronte au quotidien. Et puis juste une question sur le sujet, pourquoi votre collectif ne s’est-il pas aussi associé à la marche contre l’antisémitisme ? Y aurait-il les bons juifs qui signent votre appel et les mauvais juifs comme moi, ici, qui se lèvent pour dire leur colère ?

 

« Deux peuples pris en otage de politiques que nous ne pouvons maîtriser, qui nous dépassent et dont nous sommes les témoins impuissants ». Non, ce ne sont pas deux peuples pris en otages - le mot ici me semble maladroit - par les politiques. C’est un peuple qui se lève par centaine de milliers depuis un an pour la démocratie face à une population acquise ou soumise à un régime fasciste et théocratique qui n’a rien à faire de la souffrance de ses administrés. D’ailleurs je m’attendais à ce que dans un élan de lucidité vous demandiez la libération du peuple gazaoui du joug de son tyran, le Hamas. Une occasion ratée.

 

« Cette guerre fratricide nous touche toutes et tous ». Je regrette que votre émotionnel prenne le pas sur la culture. Il ne s’agit pas d’une guerre fratricide. Mais d’une guerre existentielle pour les Israéliens, une guerre de religion pour le Hamas, aussi. Les assassins qui ont organisé ce pogrom génocidaire aux cris de Yahoud - Juifs - et Alahu Akbar, ne peuvent être des frères quand ils déclarent vouloir la mort de mon peuple, la mienne. Si depuis mon enfance, j’ai bien retenu une leçon de mon errance, c’est qu’il faut toujours croire son ennemi. « Free Palestine de la mer au Jourdain » ! Mais où nos « frères » vont-ils mettre les Juifs ?

 

« Peu importent nos raisons ou affinités de part et d’autre du mur, nous souhaitons qu’elle cesse immédiatement et que les deux peuples puissent enfin vivre en paix ». Je sais que cette phrase a été l’objet de discussions parmi les signataires. Elle a donc été maintenue en toute intention. C’est une faute. Outre que cette prise de position relativise totalement l’esprit de neutralité annoncé de votre appel, je pense comme l’a dit récemment l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, en rendant son honneur à la gauche française, que « Si le Hamas libère les otages et dépose les armes, il n’y a plus de guerre. Si Israël arrête de se défendre, il n’y a plus d’État israélien. » Autrement dit, sans même faire mention de la libération des otages, votre appel demande à Israël de planifier son suicide. Désolé d’insister mais, depuis Abraham, mon peuple a choisi la vie.

 

Mesdames et messieurs du collectif « D’une autre Voix », votre texte, s’est égaré pour devenir un appel au déni, une dépose d’armes devant un islamisme mortifère. Nous valons mieux que ça. Mais, puisque marche blanche il y aura quand même, j’espère, au moins, que beaucoup d’entre vous porterons ce ruban jaune signe de solidarité et de mémoire avec les 238 otages dont huit compatriotes français. Pour rompre vraiment votre silence.

 

 

Georges Benayoun, producteur, scénariste et réalisateur, entre autres, de « Chronique d’un antisémitisme d’aujourd’hui » 

 

- Les opinions exprimées dans les billets de blog n'engagent que leurs auteurs -