Lu dans la presse
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Publié le 11 Mars 2021

Terrorisme - "Un acte de résistance" : Emmanuel Macron veut bâtir un musée-mémorial des victimes du terrorisme

A l’occasion de la Journée nationale des victimes du terrorisme, le chef de l’Etat, qui se rend ce jeudi à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), lève le voile pour notre journal sur son projet phare. Selon nos informations, les travaux commenceront en mars l’an prochain.

Publié le 10 mars 2021 dans Le Parisien

« Les terroristes ont tué et tuent », mais « ils n'auront jamais le souvenir des vies fauchées ». Face aux attentats, Emmanuel Macron est bien décidé à vanter l'unité du pays autour de ses victimes. « Voilà pourquoi nous créerons un musée-mémorial dédié aux victimes du terrorisme. Pour que les noms, les visages, ne s'effacent jamais », explique le chef de l'Etat dans des propos rapportés au Parisien par son entourage. Le lieu sera ouvert au public à Paris en 2027. Mais la première pierre sera posée, selon nos informations, dès le 11 mars 2022, pendant la présidence française de l'Union européenne. À quelques semaines de la présidentielle…

« Face à ceux qui veulent nous diviser et combattent nos valeurs, ce musée-mémorial est acte de résistance », estime Emmanuel Macron, qui préside ce mercredi la Journée d'hommage aux victimes du terrorisme. Un événement célébré dans plusieurs pays européens et dont la date fait référence aux attentats sanglants de Madrid du 11 mars 2004. Pour cette journée, le chef de l'Etat exhorte à ne « rien céder au fond de cette part d'humanité qu'ils veulent nous enlever. Ils ne l'auront jamais ».

Cinquante ans d'histoire du terrorisme

Le futur monument retracera l'évolution du terrorisme depuis cinquante ans, notamment son internationalisation. Ses réserves ne ressembleront pas à celles d'un musée classique : on y trouvera des objets personnels (baskets, téléphones, voitures criblées d'impacts) et des scellés d'affaires jugées. « Il n'existe que quatre musées de ce genre dans le monde, dont un à New York créé après le 11-Septembre », souligne l'historien Henry Rousso, chargé du projet.

Le conseil d'orientation de l'établissement sera présidé par le procureur François Molins, célèbre visage des événements de 2015, et comptera parmi ses membres le recteur de la mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, un représentant de « Charlie Hebdo » et François Baroin en qualité de président de l'Association des maires de France (AMF).

Il y a quelques jours, Emmanuel Macron a écrit aux ambassades, aux préfectures et au patron de l'AMF pour les encourager à prendre des initiatives ce 11 mars. En ce qui le concerne, le président a misé sur l'empathie - il ne prononcera pas de discours, contrairement à l'an dernier.

Il déposera d'abord une gerbe aux Invalides en présence de François Hollande et de Nicolas Sarkozy. Puis, il échangera avec les représentants d'associations. Après, direction Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne). Accompagné de son épouse, Brigitte, Emmanuel Macron se rendra dans l'imprimerie de Michel Catalano. C'est là que s'est terminée la traque des frères Kouachi, les auteurs de la tuerie de Charlie Hebdo. « Michel Catalano a risqué sa vie, rappelle le chef de l'Etat. Il a craint pour un de ses proches. Il a vu le fruit d'une vie de travail, son imprimerie, partir en fumée sous le feu des balles. »

Ce héros qui avait caché son collaborateur Lilian sous un évier pendant que les deux islamistes faisaient face au GIGN reste, six ans après, traumatisé. « Au resto, je me mets en face de la porte, raconte-t-il à notre journal. Quand on me parle, je regarde autour s'il n'y a rien de suspect. Alors, cette visite est une reconnaissance de la part de l'Etat. Elle aide à continuer à vivre une vie qui ne sera plus jamais la même. » L'entrepreneur a témoigné au procès de « Charlie Hebdo ». Une épreuve pour lui. Son ancien salarié ne sera pas présent pour la venue du couple présidentiel. « C'est trop dur, il n'arrive pas à revenir sur les lieux », confie son ex-patron.

A l'Elysée, on se veut réaliste : la menace terroriste reste « très élevée » en France, même si elle a évolué. L'ère des attaques orchestrées depuis la Syrie ou l'Irak semble s'éloigner. Le danger émane davantage de radicalisés vivant sur notre territoire. L'exécutif affirme en tout cas avoir déjoué 33 attentats depuis 2017 et met en avant la création du parquet antiterroriste et du juge de l'indemnisation des victimes du terrorisme.

Plus de 6000 victimes ont été prises en charge par l'Etat depuis 2015, notamment après le Bataclan et la tuerie de la promenade des Anglais à Nice (Alpes-Maritimes). Un proche du président soupire : « La crise sanitaire fait que les Français peuvent oublier parfois la menace, mais la décapitation de Samuel Paty, c'était il y a un peu plus de quatre mois seulement. »