Des sabotages ont lieu dans le Nord et dans le Pas de Calais. Mais ce sont des actes isolés, spontanés, individuels.
En 1941, des actions structurées et collectives apparaissent, des groupes se forment : les réseaux et les mouvements.
Le réseau est une organisation axée sur le renseignement, la collecte de renseignements militaires, la filière d’évasion, le sabotage.
Le rôle du mouvement est de sensibiliser l’opinion publique et de préparer la population.
Comme le dit le capitaine Henri Frenay, l’un des fondateurs de la Résistance : « Les Résistants sont des soldats sans uniformes et des citoyens en révolte contre le pouvoir établi »
En zone occupée, la présence des Allemands complique l’existence des Résistants et rend leur activité particulièrement dangereuse.
Pourtant, au Musée de l’homme des intellectuels s’organisent et publient un journal intitulé « Résistance »
Trois mouvements se mettent en place peu à peu dans la plupart des départements occupés :
LIBERATION-NORD créé par Christian Pineau, Robert Lacoste, des militants socialistes, des syndicalistes.
L’ORGANISATION CIVILE ET MILITAIRE née de la fusion d’un groupe recrutant dans les amicales régimentaires et d’un groupe émanant de la Confédération des Travailleurs Intellectuels animé par Blocq-Mascart.
Enfin le FRONT NATIONAL soutenu par le parti communiste.
.En zone non occupée, malgré la police de Vichy, les Résistants parviennent à s’organiser plus facilement.
Le MOUVEMENT DE LIBERATION NATIONALE animé par le capitaine Henri Frenay prend son essor dans le Sud Est puis dans la région Lyonnaise. Il s’étend rapidement en zone occupée. En novembre il fusionne avec le mouvement LIBERTE donnant naissance à COMBAT.
A Clermont-Ferrand, Emmanuel d’Astier de la Vigerie, ancien officier de marine, crée le mouvement LIBERATION.
Léon JOUHAUX secrétaire général de la CGT, incite les militants syndicalistes à rejoindre les rangs de ce mouvement et à diffuser son journal.
A Lyon, Jean-Pierre Lévy crée FRANC-TIREUR qui diffuse son journal.
Afin d’obtenir de l’aide et de l’argent, il devient indispensable d’établir des contacts avec le général de Gaulle et la France Libre, qui ignorent a peu près tout des mouvements de Résistance.
Jean Moulin réussit à gagner Londres. Il rencontre le Général de Gaulle. Il lui fait un rapport sur la situation de la Résistance française qui mobilise tous les jours un peu plus de Français.
En zone interdite, Nord et Pas de Calais, les syndicats clandestins, soutenus par le parti communiste, animent et encadrent diverses manifestations chez les mineurs qui subissent, plus que dans d’autres régions, les rigueurs de l’occupation. Ils décident de faire du 1er mai une journée symbolique dans la tradition des luttes ouvrières et syndicales.
Au matin du 1er mai, les Allemands découvrent avec stupeur, une multitude de drapeaux tricolores et de drapeaux rouges décorés de la faucille et du marteau flottant sur les cités ouvrières.
Les syndicats parviennent à déclencher un mouvement de grève qui ne cesse de s’étendre. Le 3 juin, la grève est totale dans le Pas de Calais et elle se développe dans le Nord.
Malgré la présence de l’occupant plus de 100.000 mineurs cessent le travail.
La répression est brutale. 450 hommes sont arrêtés, 250 sont déportés à Sachsenhausen. Les mineurs sont contraints de reprendre le travail le 10 juin. Cette « grande grève » comme on l’appela alors fut par son ampleur et sa durée un évènement unique en France durant l’occupation.
Pendant ce temps, à Paris, des militants communistes créent et animent une structure appelée Organisation Spéciale qui se lance dans des actes de sabotage. Des jeunes du 11ème arrondissement s’y engagent. Leur point de rencontre : un appartement de la Cité Henri Ranvier.
En quelques mois, ces jeunes commettent 17 attentats. Ils sont arrêtés au mois d’octobre et sont traduits devant un tribunal militaire allemand siégeant dans les locaux du Palais Bourbon. Ils sont sept : l’aîné a 25 ans, le plus jeune 17 Ils seront tous fusillés au Mont-Valérien le 9 mars 1942.
Au début du mois de juin Joseph Epstein, le futur Colonel Gilles, écrit dans un rapport « Si un jour l’Union soviétique entrait en guerre contre l’Allemagne, elle aurait avec elle l’immense majorité du peuple de France ».
Rapport prémonitoire.....le 22 juin Hitler attaque l’Union soviétique.
Cette attaque lève les contradictions au sein de l’appareil du Parti communiste qui se rallie sans réserve à la Résistance laquelle voit ainsi grossir considérablement ses effectifs.
De leur côté, des étrangers, principalement des réfugiés anti-fascistes, voudraient, eux aussi, combattre l’occupant. Or, les divers mouvements de Résistance ne leur offrent pas de véritables structures d’accueil. Seul, le parti communiste dispose avec la Main d’œuvre Immigrée – la MOI, d’une organisation spécifique qui leur permet de s’engager dans la Résistance.
Les F.T.P. – M.O.I. sont organisés en détachements de combattants constitués par affinités de langue et de culture Ils sont instruits et dirigés par d’anciens volontaires des Brigades Internationales.
Au mois d’août Marcel Rajman et son frère Simon s’engagent dans la MOI rejoignant d’autres jeunes du 11ème arrondissement : Roger Trugnan responsable des jeunes du 11ème et son inséparable copain Henri Krazuki, déportés tous deux, Maurice Radzinski abattu lors d’une attaque contre un détachement de la Kriegsmarine, et son frère Sam, une femme : Stéfa Skurnik, son mari et ses frères Norbert, Serge et Jean Lemberger, Henri Tuchklaper 17 ans fusillé au Mont Valérien, Robert Endevelt, Moïse Fingerczweig dont la photo figure sur l’Affiche Rouge, fusillé avec ceux du groupe Manouchian, Darno Maffini le chef des Garibaldiens. Je m’arrête là car la liste est fort longue.
L’été 1941, c’est aussi l’ époque à laquelle le père CHAILLET crée, avec l’aide du capitaine Henri FRESNAY, l'un des premiers journaux de la Résistance spirituelle : " Les Cahiers du TEMOIGNAGE CHRETIEN ".
Pétain se rend compte que l’opinion publique commence à se détourner de sa politique de collaboration. Le discours qu’il prononce à St Etienne le 12 août 1941 est significatif à cet égard : « De plusieurs régions de France, je sens se lever depuis quelques semaines un vent mauvais. L’inquiétude gagne les esprits, le doute s’empare des âmes. L’autorité de mon gouvernement est discutée…… ».
Le 22 août, Pierre Georges, futur colonel Fabien, abat un officier allemand à la station de métro Barbès, inaugurant ainsi une nouvelle forme de résistance : l’attentat contre l’occupant.
Deux jours plus tard, quatre Allemands sont abattus dans le Nord.
Les 20 et 21 octobre des équipes des Bataillons de la Jeunesse (organisation communiste) abattent le lieutenant-colonel Karl Hotz, Feldkommandant de Nantes et Hans Reimers, conseiller de l’administration militaire à Bordeaux. D’autres officiers allemands sont également abattus à Lille et à Rouen.
En représailles, les Allemands fusillent le 22 octobre, 48 otages au camp de Chateaubriand. Parmi eux Maurice Gardette conseiller municipal du 11ème arrondissement et le jeune Guy Moquet âgé de 17 ans.
Deux jours plus tard, 50 autres otages sont fusillés dans le camp de Souges près de Bordeaux.
98 otages en 48 heures, l’opinion s’émeut. Même Vichy réagit.
Avec la mise en place des détachements F.T.P.-M.O.I. apparaissent de nouvelles formes d’action qui s’apparentent à la guérilla urbaine avec Paris pour théâtre d’opérations : lancement de grenades contre des détachements de la Wehrmacht ou dans des garages, des cantines ou des hôtels réquisitionnés.
83 attaques ont lieu en novembre et 80 en décembre, créant un sentiment d’insécurité parmi les troupes d’occupation. Des mesures de protection sont mises en place devant les casernes. Les hôtels, les cinémas, les bordels réservés à l’armée allemande sont entourés de murs de sacs de sable. Les véhicules roulent à toute vitesse. Les compagnies ne se déplacent plus que précédées par une avant-garde et suivies d’une arrière garde. Les officiers sortent en civil. Paris n’est plus le repos du guerrier.
Les Parisiens le remarque, les Allemands s’en inquiètent.
Le commandement allemand redoute par-dessus tout les effets psychologiques sur ses troupes et politiques sur l’état d’esprit des Français.
Les Allemands multiplient le système des représailles : 95 otages sont fusillés au Mont Valérien au mois de décembre. Parmi eux Gabriel Péri
La fin de l’année 1941, marque une étape décisive : toutes les organisations de résistance sont d’accord sur le principe d’une opposition commune à l’occupant et à Vichy. Dès lors, l’unification de la Résistance devient possible.
C’est à cette tâche que va s’employer Jean Moulin. Le 30 décembre il quitte Londres pour être parachuté en France.
Ce matin, comme chaque année à pareille époque, nous sommes réunis pour rendre hommage aux Résistants de notre 11ème arrondissement, tombés au cours des actions de résistance, ou lors des Combats de Libération. C’est l’occasion de rappeler un épisode qui a bouleversé la vie de tous ces hommes venus d’horizons si différents.
En honorant leur souvenir, en rappelant les événements de cette époque difficile et glorieuse, nous, les survivants, accomplissons notre Devoir de Mémoire envers les jeunes générations.
Ma conclusion je l’emprunte à Jean CASSOU, compagnon de la Libération, grièvement blessé lors de la Libération de Toulouse, lorsqu’il écrit :
«Pour nous rien n’est fini et les luttes de l’antifascisme auxquelles nous avons pris part continuent ».
« C’est donc au nom de ceux des nôtres qui ont risqué la mort pour la liberté et qui, pour elle, ont affronté les pires souffrances, que nous vous demandons, à vous, ceux des jeunes générations d’être vigilants.
Nous vous passons le flambeau, à votre tour de vous battre, quand il le faudra, comme il le faudra, pour la justice, la dignité humaine, la liberté ».
Photo : D.R.