Le CRIF en action
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Publié le 21 Avril 2009

Grand guignol a Durban 2

Genève, 20 avril 2009. L’enceinte de l’ONU est une véritable ruche. Sur le chemin venant de l’aéroport, déjà, le ton était donné lors du passage devant l’Hôtel Intercontinental : un flot de voitures, des motards, la foule. Le chauffeur nous explique : « C’est là qu’est descendu le président iranien ! ». A l’ONU, les policiers sont sur les dents. Nul ne peut passer un sas sans montrer patte blanche : ceintures, chaussures, portables, petite monnaie, tout doit rejoindre les caissons de sécurité. Et malheur à celui qui se trompe de chemin dans le dédale des couloirs et des escalators : les cerbères sont sans pitié, il faut recommencer la fouille.



Dans les couloirs, on croise des délégués venus de toute la planète. Ici des femmes en hijab, là des boubous colorés. Ailleurs, voici le trio, très sollicité par les caméras et les micros, des rabbins antisionistes et pro-Ahmadinejad conduit par le fameux Aaron Cohen. Plus loin, Richard Prasquier, président du CRIF, converse avec Elie Wiesel tandis que passent François Zimeray, ambassadeur en charge des Droits de l’Homme et Patrick Gaubert, président de la LICRA et la journaliste Caroline Fourest.



15 heures. La salle de conférence et les salles connexes où est rassemblé le public qui n’a pas pu accéder à l’amphithéâtre et qui suivra les débats sur grand écran, sont en effervescence. Le président de séance annonce l’arrivée du duce iranien. Officiellement, Mahmoud Ahmadinejad devait parler 7 minutes. Il gardera le micro plus de quarante minutes. Dès les premiers mots, le ton est donné. Le président iranien, en introduction, cite le Coran, en appelle à Mahomet, à Moïse et à Jésus avant de se lancer dans une violente diatribe à mots couverts contre Israël et contre les Etats-Unis et l’Occident en général dont il envisage la fin prochaine.



C’est le moment que choisissent des étudiants de l’UEJF pour faire irruption dans la salle, déguisés en clowns pour bien marquer leur sentiment qu’on a affaire à une grande mascarade. C’est le tollé. Applaudissements d’un côté. Affolement de la sécurité qui parvient à expulser les jeunes. Imperturbable, monocorde, Ahmadinejad poursuit son discours de haine. Trop c’est trop. Les délégués des 23 pays européens, la France en tête, quittent la salle. Le représentant de la Suisse, lui, ne bronche pas, ne bouge pas. Dans une salle connexe, c’est le brouhaha. Il y a ceux qui chahutent par solidarité avec les clowns étudiants et ceux qui veulent, contre vents et marées, suivre le débat : « Sortez et laissez-nous écouter ! », clament-ils. Scène surréaliste : des déléguées du Surinam réclament le silence. « On n’entend plus ! ». Mais entendre quoi ? Le président iranien s’exprime en farsi, langue qu’elles ne parlent probablement pas et la traduction simultanée est en panne. Cela ne les empêche pas d’applaudir à la fin du discours tout comme la claque de militants iraniens, plusieurs rangées, qui accompagnent l’orateur depuis son arrivée.



C’est fini ! Exit enfin Ahmadinejad. Demain, pour sûr, il fera la une des quotidiens suisses et du monde entier. A l’extérieur, la délégation française, l’ambassadeur Jean-Baptiste Matteï, François Zimeray et leurs collaborateurs font les cent pas, téléphone portable collé à leurs oreilles. Quittent-ils définitivement la conférence ? La réponse est claire : « Non, pour le moment, la France reste présente à Durban ». A suivre.


Photo : D.R.