Le CRIF en action
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Publié le 10 Juin 2005

Hortefeux : « Contre l’antisémitisme, il est de notre devoir de faire encore davantage »

« Votre communauté est inquiète. Déconcertée. Sachez que Nicolas Sarkozy, le gouvernement et tous les services de l’Etat comprennent pleinement ces inquiétudes et se mobilisent pour effacer vos angoisses et celles de vos enfants ».



Invité, jeudi 9 juin, du dîner organisé à Colmar par le Consistoire israélite du Haut-Rhin, présidé par Pierre Dreyfus, et le CRIF-Alsace, dont Pierre Lévy est le délégué régional, Brice Hortefeux a voulu faire passer un message de solidarité et de fermeté aux 250 personnes présentes pour cette première, parmi lesquelles de nombreux élus, représentants de la société civile, Roger Cukierman et Haïm Musicant, le président et le directeur général du CRIF.

Le nouveau ministre délégué aux collectivités territoriales, rattaché au ministre de l’Intérieur, a, pour sa première sortie depuis sa nomination le 2 juin, déploré la hausse des actes antisémites en France en 2004. Face à cette augmentation, Brice-Hortefeux a constaté : «Vous voulez une action de l’Etat exemplaire, vous exigez de nous des résultats. Vos souhaits et vos exigences sont légitimes. Soixante ans après la libération des camps, l’antisémitisme sévit toujours de manière déroutante ». Pour ce proche de Nicolas Sarkozy, « lorsque l’on crache sur vos enfants, lorsque l’on salit les sépultures de vos ancêtres, c’est tout l’honneur de la République que l’on bafoue ! »

Promettant que les auteurs des actes antisémites seraient «arrêtés et punis de manière exemplaire », le ministre a précisé que la lutte sera « totale ». Elle s’attaquera également à « l’antisémitisme mondain » qui est « celui des salons où l’on cause, celui qui se dessine trop souvent dans les médias et à travers les forums de discussion sur Internet ». Brice Hortefeux a souligné que cette détermination n’épargnera pas « ceux qui mettent leur haine en spectacle ». La répression ne suffit pas. Il faut faire œuvre de pédagogie, et « restaurer la tolérance là où elle n’existe plus ou pas assez, c’est-à-dire, dans les cours de récréation es écoles, dans les halls d’immeubles des quartiers sensibles, mais aussi dans les beaux quartiers, sur les planches et sur les plateaux de télévision », a estimé le ministre.

Roger Cukierman s’est réjoui d’être en Terre d’Alsace, où les Juifs sont présents depuis 1000 ans. Il a évoqué de récentes visites à Bordeaux, Avignon, et Troyes, qui témoignent de l’enracinement bimillénaire des Juifs en France. Le président du CRIF a rappelé la contribution des Juifs à leur pays dans tous les domaines : des écrivains, des prix Nobel, des hommes politiques. Evoquant les pages noires de leur histoire, les expulsions, l’Affaire Dreyfus, Vichy, Roger Cukierman a souligné que depuis bientôt cinq ans « les Juifs se sont sentis en danger. C’est douloureux et incompréhensible ».

Remerciant Nicolas Sarkozy, qui dès son arrivée au ministère de l’Intérieur en 2002 avait « pris les choses en main de façon vigoureuse », Roger Cukierman s’est félicité de « la mobilisation du gouvernement et de tous les partis politiques de droite comme de gauche ». Roger Cukierman a rappelé le sens du combat du CRIF : « Convaincre l’opinion publique que le racisme et l’antisémitisme ne sont pas une opinion mais un délit. » Il a souhaité que les maires des villes convoquent les parents des mineurs auteurs d’actes antisémites ou racistes dans cet espace pédagogique. Roger Cukierman s’est dit convaincu qu’un déséquilibre de la politique étrangère de la France peut conduire à donner des justificatifs à l’antisémitisme. Il a plaidé pour que Paris inscrive le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes et favorise l’entrée d’Israël dans la francophonie. Roger Cukierman a, en conclusion, souligné « l’important ». Pour lui, « c’est que nous puissions continuer pendant des siècles et des siècles à être heureux et fiers d’être Français ».

La soirée avait été ouverte par Pierre Dreyfus. Le président du Consistoire du Haut-Rhin a révélé : « Sans s’être concertés, Pierre Lévy et moi avons eu l’idée de ce grand dîner, pour montrer qu’au-delà des profanations de cimetières, des dégradations, des manifestations racistes, antisémites, xénophobes, les Juifs constituent une composante tangible des communautés nationale et régionale. Il fallait illustrer cette notion : quoi de mieux qu’un repas convivial avec les forces vives de cette Alsace que nous aimons tant ? » Pierre Dreyfus a considéré que ce dîner constitue une réponse à « ceux qui, encore, récemment à Colmar, sous couvert d’un certain altermondialisme, confondent dans une même opprobre feutrée ou non Israéliens et Juifs ». Pierre Dreyfus leur répond : « Nous sommes de bons citoyens de ce beau pays de France, nous sommes sentimentalement et religieusement attachés à Israël. Il n’y a rien de choquant ni d’antinomique.

Pierre Lévy a souligné : « Nous nous retrouvons pour célébrer la République et ses valeurs, la République et ses enfants. » Le délégué régional du CRIF-Alsace s’est félicité de la présence de représentant du catholicisme, du protestantisme et de l’islam. Il s’est dit convaincu que le nouveau gouvernement combattrait l’antisémitisme, comme le précédent. Evoquant les profanations de cimetières juifs, chrétiens et musulmans, Pierre Lévy a dévoué cette « intolérable atteinte » aux fondements de la société et s’est félicité de la dissolution du groupe néo-nazi Elsass Korps.

Pierre Lévy a estimé : « Les violences sont souvent commises par de jeunes individus, déstructurés et déracinés. Malgré sa violence, l’antisémitisme d’en bas » n’aurait peut-être pas suscité tant d’inquiétude s’il ne s’était pas développé parallèlement à un antisémitisme d’en haut », selon l’expression du sociologue Didier Lapeyronnie. Il a demandé que l’on « poursuive « les prêcheurs de haine » parce qu’ils distillent leur venin nauséeux et pourchassent de leur phobie les Juifs ».

Le représentant du CRIF a mis en avant les « perspectives » nouvelles au Proche-Orient et appelé de ses « vœux à une coexistence pacifique entre deux Etats, israélien et palestinien ». Enfin, Pierre Lévy s’est félicité du succès du voyage de Jean-Pierre Raffarin à Jérusalem en mars, estimant qu’il confirme « l’embellie » des relations entre la France et Israël.