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Isidore Aragones, le président du CRIF de Marseille, a dans son discours transmis un message d’ouverture, de dialogue et de compréhension de l’autre. Il a tenu également à saluer le travail remarquable du CRIF et de son président Roger Cukierman dans l’affaire Al-Manar. Soucieux des problèmes liés à la laïcité, Isidore Aragones a déclaré : « Ensemble préservons ce bien commun, ne laissons aucun intégrisme nous déposséder de nos libertés. Toute spiritualité doit rester dans le domaine privé. » Le président du CRIF de Marseille a regretté que le projet de construction d’un mémorial au camp des Milles stagne à cause d’un manque de financement. Enfin, il s’est dit heureux de l’évolution de la situation au Proche-Orient espérant que « l’Europe sortira renforcée et qu’elle contribuera à la paix dans cette région et dans le reste du monde ».
Jean Noël Guerini, Sénateur Président du Conseil Général des Bouches du Rhône, qui s’est prononcé pour un échange des cultures et un mélange des communautés, a informé l’assemblée de l’organisation d’une conférence à Marseille avec Leïla Shahid, représentante de l’Autorité palestinienne en France, et Nissim Zvili, l’ambassadeur d’Israël à Paris.
Michel Vauzelle, Président du Conseil Régional Provence Alpes Côte d’Azur, qui a réaffirmé ses liens d’amitiés avec la communauté juive, a annoncé sa participation à un voyage avec le CRIF Marseille-Provence en Israël au début du mois d’avril 2005.
Christian Frémont, Préfet de la Région Provence Alpes Côte d’Azur, Préfet des BDR, a pour sa part salué les déclarations de Jacques Chirac lors des commémorations du 60e anniversaire de la libération des camps nazis et Jean-Claude Gaudin, Vice-président du Sénat et Maire de Marseille, a dit son attachement à la communauté juive dont le destin est lié à la ville de Marseille.
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Invité d’honneur du dîner du Crif de Marseille Provence du 10 mars 2005, Simone Veil, empêchée par les grèves de transports, n’a pas pu se rendre dans la cité phocéenne. On lira ci-dessous le discours de la présidente de la fondation pour la mémoire de la Shoah.
Je tiens d’abord à vous dire combien je suis absolument désolée de ne pas être parmi vous, ce soir.
En effet, je me réjouis, chaque fois que j’en ai l’occasion, de venir, ici, à Marseille, et j’étais tout particulièrement heureuse à l’idée de rencontrer ce soir la communauté juive de Marseille.
Sans parler des amis que j’ai toujours le plaisir de retrouver et qui sont ici ce soir, Marseille, en plus de sa vitalité si particulière, de sa communauté juive si vivante, est vraiment un symbole, un creuset où coexiste cette multitude de cultures dont la France s’est construite. L’histoire a fait d’elle, en effet, cette mosaïque qui reflète, à son échelle, toute la diversité, toute la richesse du monde méditerranéen.
En tant que laïque et républicaine, j’hésite parfois à employer le terme de communautés ; mais ici, au contraire, je le ferai, car si Marseille a accueilli tant de communautés d’origines et de cultures si variées, cette ville est aussi le lieu où ces communautés ont appris à vivre ensemble, à se connaître, tout cela dans la conscience qu’elles partageaient un destin commun, fait de difficultés et d’espoirs analogues. Ville d’immigration et ville d’intégration, Marseille doit sans cesse relever le défi d’atteindre cet idéal subtil que l’on appelle, en France, la « laïcité », qui met l’accent, d’abord, sur ce que nous avons tous en commun, tout en défendant un idéal de tolérance et de respect à l’égard des différences culturelles et religieuses : comme tout idéal, il est fragile et précaire, et par là même requiert toute notre vigilance.
C’est notamment aux heures les plus sombres de notre histoire récente que Marseille a été à la hauteur de sa réputation de ville d’accueil. Située en zone libre jusqu’en novembre 1942, date à laquelle les Allemands occupèrent l’ensemble du territoire français, Marseille fut un refuge pour ceux que les persécutions menaçaient. Combien de Juifs marseillais y avait –il en 1939 ? Il est difficile de répondre exactement. On avance, je crois, selon les estimations les plus fiables, que la population marseillaise générale, qui, en 1939, était estimée à environ 650 000 habitants, comptait 10 000 Juifs.
Combien de Juifs français et étrangers y ont trouvé un asile, parfois transitoire, avant de choisir un exil synonyme de liberté ? Ce que l’on sait, sans certitude toutefois, c’est que sous l'Occupation entre 1941 et 1942, il y aurait eu environ 15. 000 Juifs à Marseille. Ce qu'il faut remarquer en tout cas, c'est que cette augmentation a été très exagérée par les antisémites de l'époque. Ainsi, le 6 février 1941, Du Bief, journaliste au Matin, écrivait : "Marseille, la nouvelle Jérusalem de la Méditerranée ! Les Juifs règnent en maîtres dans les cafés et restaurants de la Canebière".
Mais combien aussi ont été broyés par la politique d’exclusion de Vichy puis par la politique d’extermination nazie, notamment en ce début d’année 1943 où l’occupant faisait du Vieux Port un champ de ruines en même temps qu’il raflait des centaines de Juifs pour les conduire à la mort ? Dans cette période tragique, où nous savons aujourd’hui que sur les 75 000 Juifs déportés de France, 4368 venaient de Marseille, il y eut, comme partout, ceux qui collaborèrent et ceux qui résistèrent, ceux qui dénoncèrent et ceux qui protégèrent, recueillirent, cachèrent des Juifs pour les soustraire aux persécutions. C’est à eux que je pense ce soir ; eux dont le courage et les convictions nous permettent de ne pas désespérer de l’humanité, eux qui nous montrent qu’en des temps où le rejet et la haine de l’autre se banalisent et deviennent la norme, l’esprit de résistance doit souffler.
Nous avons besoin de ces exemples aujourd’hui. Car nous assistons à des événements que nous aurions souhaité ne pas revoir. Héritiers des Lumières, nous pensions que notre civilisation était engagée dans un long processus de sécularisation où la religion ne serait plus instrumentalisée à des fins guerrières ; survivants de la Shoah, nous pensions que le racisme et l’antisémitisme n’auraient plus droit de cité sur cette terre, et encore moins sur ce continent ; citoyens français et européens nous espérions que les massacres atroces qui ont déchiré notre continent au siècle dernier nous prémuniraient contre le retour de ces vieux démons que sont l’exclusion, l’intolérance et la haine de l’autre, sous le prétexte que cet autre est d’une autre couleur, qu’il parle une autre langue ou qu’il pratique une autre religion.
Avons-nous été naïfs ? Ce n’est pas noircir le tableau exagérément que de constater que, partout, de plus en plus de conflits se nourrissent de haines fondées sur des critères raciaux ou religieux, que depuis la Shoah d’autres génocides ont été perpétrés, en Afrique, dans l’Est de l’Europe ; et qu’en France, des discours xénophobes parfois accompagnés de violences racistes et antisémites se multiplient et, pire, se banalisent par leur multiplication même, rejoignant la cohorte des faits divers.
Sans mettre sur le même plan, évidemment, la situation actuelle et celle d’hier, ce qui serait à la fois faux et outrageant pour les victimes, restons vigilants, et protestons avec la même indignation chaque fois que de tels actes sont commis ! Et surtout, protestons ensemble, croyants et incroyants, juifs, chrétiens, musulmans ou adeptes de toute autre confession, protestons chaque fois que l’un d’entre nous est stigmatisé, agressé, lynché pour ce qu’il est et pour ce qu’il croit ! C’est nous tous qui devons nous sentir solidaires, c’est ce que nous avons de plus cher, notre liberté de conscience, notre liberté d’expression, qui sont mises en danger par de tels actes. Et c’est unis que nous devons faire face à toutes ces forces de haine, d’où quelles viennent.
C’est pourquoi j’attache une grande importance à toutes ces rencontres, comme celle de ce soir, où dans le respect mutuel de nos identités et de nos convictions nous pouvons dialoguer, échanger, promouvoir cet idéal de fraternité qui est au cœur de notre identité française, qui est ce que nous aimons tant dans ce pays et qui fait que devons être si préoccupés chaque fois que des paroles ou des actes bafouent cet idéal.
En cette année 2005, nous vivons une période particulière. Il y a exactement soixante ans fut vaincu le pire des régimes, un régime qui érigea en norme la violence et la terreur, un régime qui inventa la mort industrielle, un régime qui consacra des moyens considérables à concevoir d’immenses usines uniquement destinées à avilir et à exterminer des millions d’êtres humains pour la seule raison qu’ils étaient nés juifs. Soixante ans ont passé, donc, mais il est des douleurs que le temps ne peut apaiser. Et je suis heureuse que la Fondation pour la Mémoire de la Shoah ait contribué à rééditer, à l’initiative de « l’Amicale des déportés d’Auschwitz, Marseille-Provence », la nouvelle édition enrichie de l’ouvrage « Marseille, Vichy et les nazis », qui, je le souhaite, sera ainsi porté à la connaissance, notamment, des jeunes générations.
Pour les rares rescapés que nous sommes, croyez que ces périodes de commémoration sont extrêmement ambivalentes. Ce sont d’abord des périodes de souvenir et de recueillement, des périodes d’émotion intense, de tristesse et de chagrin, où nous repensons à tous ceux que nous avons perdus. Des douleurs si intimes, des souffrances si personnelles, qu’il m’arrive parfois de songer qu’il y a quelque impudeur à les évoquer. A notre retour des camps, combien d’entre nous qui voulaient raconter, qui avaient un besoin vital de témoigner, se sont heurtés au désintérêt ou à l’incrédulité de ceux qui n’y avaient pas été. A chaque commémoration, je me demande quelle oreille va nous être prêtée, si nous allons être écoutés, si au contraire nous n’allons pas lasser avec nos vieilles histoires.
Et je dois vous dire que, à l’occasion des premières commémorations du soixantième anniversaire de la libération des camps nazis, je suis particulièrement impressionnée par l’intérêt qui a été manifesté dans tous les pays d’Europe pour ce passé, par les responsables politiques, les autorités religieuses, les journalistes, les jeunes générations.
Invitée, le 27 janvier dernier, par le Président de la République de Pologne, aux cérémonies de commémoration de la libération par l’Armée Rouge du camp d’Auschwitz Birkenau, pour m’exprimer au nom des six millions de Juifs assassinés, au côté des représentants des Tziganes et des Polonais, avant les interventions du Président Poutine, du Président Katzav, de Monseigneur Lustiger qui lut le message du Pape, et en présence de très nombreux chefs d’Etat et bien sûr de M. Jacques Chirac, je dois vous dire, autant qu’il m’en souvienne, que jamais, de telles cérémonies n’avaient été organisées. Jamais, elles n’avaient donné lieu à autant de publications, de débats, de colloques, d’expositions, de films et de documentaires, presque toujours, de très grande qualité.
Pour les survivants que nous sommes, il est inutile de vous dire combien tout ce qui contribue à lutter contre l’oubli est important, important pour nous mais important surtout, pour les nouvelles générations.
Bien sûr, je me félicite de tout cela, mais comment ne pas aussi m’interroger ? Comment ne pas percevoir que tout cela n’est pas seulement le signe d’un intérêt mais aussi celui d’une inquiétude ?
Nous voudrions croire qu’il suffit de parler, de raconter, de témoigner, de publier des livres, d’emmener les collégiens et les lycéens sur les lieux de la catastrophe pour les immuniser contre le racisme et l’antisémitisme. Ce que les commémorations récentes ont révélé, c’est qu’hélas l’équation est plus complexe et, disons-le, moins rassurante. Nous avons à relever plusieurs défis majeurs. Je n’en citerai que quelques-uns : comment ne pas s’inquiéter de ce que parfois, l’évocation du passé provoque un sentiment de saturation ? Comment enseigner la Shoah aux élèves des collèges et des lycées, comment leur faire comprendre le caractère unique de cet événement sans que cet enseignement soit perçu comme une tyrannie de je ne sais trop quelle mémoire juive qui nierait par la même occasion les autres génocides de l’histoire ? Ce que certains intellectuels appellent parfois « la concurrence des victimes »… Comment tirer des leçons du passé sans asséner aux plus jeunes un discours moralisateur, parfois culpabilisant, risquant en tous cas d’être contre-productif ?
Il faut raconter, témoigner, toujours et encore, expliquer autant qu’il est possible une histoire qui recèle pourtant une part d’inexplicable et d’incompréhensible qu’aucun historien ni aucun philosophe ne pourra jamais résoudre. Mais cette injonction doit s’accompagner nécessairement d’une réflexion sur les finalités et les méthodes de la transmission. La Fondation pour la mémoire de la Shoah y consacre une part importante de son activité.
Permettez moi à ce propos de dire que je suis convaincue que le futur lieu de mémoire et d’éducation qui sera crée aux Milles, et dans lequel la Fondation pour la mémoire de la Shoah est fortement impliquée, avec l’Etat, les collectivités territoriales et le Mémorial de la Shoah, saura jouer ce rôle de connaissance et de transmission d’un passé tragique, mais aussi un rôle d’éducation : élèves, enseignants, citoyens, visiteurs de la région ou d’ailleurs, chacun pourra y prendre la mesure de ses propres responsabilités dans la construction d’une société démocratique, respectueuse des droits de chacun et de paix.
Il se trouve que cette année 2005 est aussi celle du centenaire de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, loi fondatrice de notre pacte républicain. Il y a là une conjonction de commémorations à côté de laquelle nous ne devons pas passer. Tous ces enjeux sont intrinsèquement liés : tandis que le centenaire de la loi de 1905 nous invite à redéfinir le sens de la laïcité – et vous y invite tout particulièrement, comme représentants des cultes et responsables politiques –, à repenser la place des différentes confessions dans notre société, le soixantième anniversaire de la libération des camps vient nous rappeler la nécessité d’ériger une société fondée sur la fraternité.
Tous, avec les responsabilités qui sont les nôtres, il nous faut participer à cette réflexion, il nous faut nous tourner vers le passé pour mieux appréhender le présent et l’avenir ! La vitalité et la diversité de la Communauté juive de Marseille que vous présidez, Maitre Aragones, avec sagesse, est un gage, j’en suis convaincue, que vous saurez tracer et fortifier cette voie.
Je conclurai en remarquant enfin que les hasards du calendrier font aussi de cette année 2005 l’année où nous aurons à nous prononcer par référendum pour ou contre la Constitution européenne. Mes fonctions au Conseil constitutionnel m’imposent, vous le comprendrez, un devoir de réserve sur un tel sujet. Tout ce que je puis vous rappeler, c’est combien le souvenir encore vif de la barbarie nazie a aiguisé notre volonté d’édifier dès notre retour une Europe unie, de paix, de tolérance et de démocratie. N’oublions pas cela, et sachons nous en souvenir à l’heure des choix décisifs !
Simone Veil
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Le discours du président du CRIF Marseille-Provence au dîner régional du CRIF à Marseille, le jeudi 10 mars.
Le CRIF rassemble la quasi totalité du monde associatif, dont il est l’expression politique.
Il représente les forces vives de notre Communauté, historique et culturelle, dans le respect absolu du droit à la différence et du principe de la laïcité qui fonde notre République.
Nos demandes, nos revendications ne doivent pas être considérées comme l’action d’un lobby, mais comme notre participation active à l’approfondissement de nos valeurs Républicaines.
Cette référence à ces valeurs que nous revendiquons, nous conduit souvent à nous montrer exigeants et tenaces, mais c’est la seule attitude possible face à ceux qui veulent mettre à mal ces valeurs, cette quiétude, cette exemplarité.
Notre rôle à tous est de ne laisser passer aucun dérapage.
C’est ce que nous entreprenons au CRIF, dont le but est de favoriser le dialogue entre toutes les composantes de notre Société, plus particulièrement celles qui comme nous veulent vivre en harmonie.
Je voudrais insister sur le travail qu’a mené le CRIF, dans l’affaire Al-Manar.
Vous savez, cette station qui diffusait sur nos antennes, des messages de haine et qui prônait un antisémitisme radical.
Le CRIF a conduit un travail qui a abouti à l’interdiction par le CSA d’émettre sur nos chaînes.
A ce titre je tiens à remercier publiquement tout le milieu associatif et plus particulièrement, l’action menée par les membres du CRIF et à leur tête Monsieur Roger CUKIERMAN – Président National.
Je serais injuste, si je ne soulignais pas le travail de nos élus, leur implication et leur action décisive, dans cette affaire.
Nous venons de l’apprendre, en date du 4 mars le Conseil d’Etat a confirmé le jugement du 10 février, mettant fin à la diffusion par satellite de la chaîne Iranienne SAHAR 1, elle aussi antisémite.
Nous reconnaissons là la force et l’exemplarité de notre République, qui peut à la fois défendre les droits d’une minorité agressée et revendiquer l’une de ses valeurs essentielles « la laïcité ».
A ce titre, le CRIF a pris part aux débats, il a fait entendre sa voix. « La laïcité doit être une chance pour tous et non un moyen d’imposer sa religion aux autres ».
Ne laissons pas envahir nos écoles par des exigences, qui n’ont plus rien à voir avec l’enseignement qu’a voulu donner la République à ses enfants !!
Ensemble préservons ce bien commun, ne laissons aucun intégrisme nous déposséder de nos libertés.
« Toute spiritualité doit rester dans le domaine privé. »
Nous disons, nous crions haut et fort : « la recherche du dialogue et des rencontres des religions et des cultures, doit être et rester une source d’enrichissement et non d’affrontement. »
Parce que Chers Amis, chaque fois qu’il y a eu affrontement, nul n’en est sorti vainqueur.
« Ensemble construisons notre destin commun »
J’en arrive à l’événement majeur que nous avons vécu ces dernières semaines et dont nous resterons encore longtemps imprégnés.
Chers Amis,
Cette soirée coïncide avec ce moment exceptionnel de notre histoire. Nous la voulions consacrée à la mémoire de toutes celles et de tous ceux victimes de « la période la plus marquante, la plus douloureuse de l’histoire de l’homme ».
Nous venons de commémorer la 60e année de la libération des Camps, je n’aime pas le mot anniversaire, aussi j’ai tenu à ce que cette soirée, soit celle du souvenir et de l’hommage que nous, Français, devons rendre à celles et ceux qui ont dû affronter le fléau du nazisme, sans armes, avec la surprise des innocents, qui, dans un premier temps ne savaient pas pourquoi on les arrêtaient ; pourquoi on venait les chercher.
Qui, par respect de leur devoir de citoyens Français, confiants en leurs droits, se rendaient à des convocations de police. Ils portaient une étoile, sans réaliser que cette sélection les mènerait dans les camps de la mort.
Mme Veil a dit à juste titre, qu’elle n’aime pas l’expression « devoir de mémoire ». Je la rejoins.
« Parce que dans devoir il y a la notion d’obligation. Or, il n’y a aucune obligation au souvenir, la mémoire est ou n’est pas en nous, spontanée, naturelle. La mémoire doit s’imposer d’elle-même ». C’est l’histoire !
Il ne sera jamais de trop, de se souvenir de ce qu’a été la SHOAH pour des millions d’hommes et de femmes.
Comment des hommes qui prétendaient appartenir à un pays développé et civilisé, à la pointe de la science et de la philosophie, pouvaient-ils commettre de tels actes sans que leur conscience les interpelle. Ils ont continué leur œuvre barbare, voulant aller jusqu’au bout.
Au bout de quoi ?
Nous avons vu des images, d’hommes devenus nazis, qui avec un sang froid effrayant et même avec un réel plaisir, ont accompli leur honteuse et sale besogne.
En s’enfermant dans leur cruauté, en voulant avilir leurs prisonniers, les transformer en bêtes affamées, ils ont dénaturé le sens de l’humanité toute entière.
En vérité, ils se sont autodétruits.
Le monde qu’ils ont voulu dominer, s’est retourné contre eux.
Heureusement des hommes, des femmes parce qu’ils avaient la foi, ont cependant refusé cette barbarie.
Au péril de leurs vies, ils ont placé leur idéal humaniste au dessus de leurs propres intérêts.
Par devoir ils ont sauvé leurs semblables.
Je veux parler, des Justes des nations, qu’ils soient ici remerciés et que leur exemple reste à tout jamais dans nos mémoires. Ils ont à travers leur courage mis en application ce texte du livre « qui sauve un homme, sauve l’humanité toute entière » et Israël ne s’est pas trompée en décidant d’honorer chacun d’entre eux en leur attribuant le titre de « Justes des Nations ».
Si nous pouvions retenir cette maudite période comme leçon, pour comprendre que nul homme ne peut impunément humilier, dominer, anéantir, sans en payer le prix. Alors l’espoir en l’homme ne sera pas vain.
« C’est là notre devoir, c’est là notre détermination, c’est là notre vigilance et c’est là le rôle éducatif pour les générations à venir. »
C’est la raison pour laquelle le CRIF est partie prenante dans un projet important pour notre région, je veux parler du projet « Mémoire du Camp des Milles », je suis certain que les pouvoirs publics mettront tout en œuvre pour sa réalisation, car il répond à une nécessité nationale.
Hélas, aujourd’hui encore, un vent de haine souffle à nouveau, comme si les hommes n’avaient rien compris à l’histoire.
En Russie, des députés ont osé proposer une loi, pour interdire aux juifs d’accéder à des postes importants. En Allemagne des parlementaires d’extrême droite ont quitté la salle au moment où le chancelier devait rendre hommage aux victimes du nazisme.
Des négationnistes en France annoncent que la période nazie, n’était pas aussi douloureuse.
Nous voulons bien demeurer confiants, nous ne doutons pas du désir des nos Gouvernants, de vouloir lutter contre les antisémites, les racistes ; mais, les lois demeurent impuissantes ou insuffisantes face à des provocations par un prétendu humour ou par la jonglerie du verbe.
A cela s’ajoute une forme nouvelle d’antisémitisme, l’anti-sionisme, importé par des extrémistes qui embrigadent une jeunesse désoeuvrée, dans des quartiers fragiles, ne craignant ni la force publique, ni la loi.
Si vous y incorporez, la montée des groupes néonazis, vous avez les ingrédients d’un danger majeur, qu’il faut vite juguler.
Si nous ne voulons pas être jugés par l’histoire, si nous ne voulons pas être taxés d’indifférence et de passivité. Alors agissons vite et fort.
L’indifférence et la passivité, sont des qualificatifs de faiblesse et de lâcheté, voir même de complicité, ils mènent les Etats à l’impuissance à gouverner.
Or, gouverner c’est prévoir.
Pour notre part, nous restons vigilants et à l’affût.
Si, nous sommes à l’écoute des discours, nous attendons leurs concrétisations en actes.
Nous sommes et restons citoyens respectueux des lois Républicaines, mais comme l’a dit un ancien Président de la République « tout homme à l’obligation de protéger les siens »
Protéger les siens, a été le soucis de tous les Dirigeants de ce minuscule pays qu’est Israël.
Ceux qui y vivent ont fait le choix de ne plus être humiliés ailleurs, cette terre située dans un environnement hostile, fut celle de leurs pères, ils y sont allés en pionniers et non en colons.
Il serait temps qu’ils puissent enfin vivre en paix avec tous leurs voisins.
Il serait temps qu’un espoir naissant se concrétise et que les ennemis de la paix se taisent à jamais.
Ces ennemis qui agissent dans l’ombre chaque fois qu’une entente semble s’amorcer.
Ils arment des faibles « proies faciles », les transformant en bombes humaines pour massacrer des innocents avec pour seul objectif, faire avorter tout espoir d’accord.
Ces manipulateurs savent que tout accord de paix entre Israéliens et Palestiniens, les priverait d’un alibi existentiel.
Le fanatisme est leur seule motivation et le terrorisme leur seule arme.
Israël subit ce terrorisme tout comme l’occident.
Israël, nous n’en avons jamais douté, est un pays responsable et déterminé.
Déterminé dans sa recherche de la paix, tout comme son Premier Ministre Ariel SHARON, combien décrié.
Certains n’ont retenu de lui que son rôle militaire, ils n’ont pas cru, en son discours politique. Pourtant, il n’a cessé de dire qu’Israël était prêt à des sacrifices majeurs, si ses voisins étaient disposés à accepter une paix réelle et durable.
C’est probablement ce qui va se passer, avec la politique que semble mener le nouveau Président de l’autorité Palestinienne, nous l’espérons fortement.
Mais ce que nous craignons c’est que les sacrifices ne s’expriment pas seulement en termes de territoires.
L’Europe a un rôle majeure à jouer, notre pays « la France » aussi, forte de sa connaissance des sensibilités dans cette région, nous espérons qu’elle y oeuvrera pour le long terme.
A ceux qui annoncent qu’ils ne permettront jamais la destruction d’Israël, qu’ils commencent par ne pas permettre à des pays politiquement instables de se doter de l’arme nucléaire.
Je veux rester optimiste et confiant.
Je veux croire que les hommes sont aussi capables du meilleur, que l’Europe sortira renforcée et qu’elle contribuera à la paix dans cette région et dans le reste du monde.
Que les différences s’exprimeront dans le dialogue et non dans l’affrontement.
Si j’ai un seul souhait à formuler ce soir, c’est que le futur pour Marseille, ville de tolérance, de dialogue, et de brassage de cultures, ainsi que pour la France, soit à l’image de cette soirée, fraternelle et harmonieuse.
Vous tous qui êtes ici, quels que soient vos choix, religieux, politiques, éthiques.
Ensemble, méditons autour de cette réflexion. « Si les temps sont incertains, notre destin nous incombe. »
Isidore Aragones